Intervention de Pierre Stambul à Toulouse le 18 octobre 2019 au meeting « Résister c’est exister ! » pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah
D’abord c’est pour moi un grand honneur d’être invité à prendre la parole dans cette soirée pour la libération de Georges.
J’évoquerai ici un seul aspect du déni absolu de justice que représente la détention honteuse de Georges depuis 35 ans : la situation en Palestine.
Utiliser le terme de « conflit » pour parler du Proche-Orient, c’est accepter le mot de l’ennemi. Il s’agit bien d’une guerre contre le peuple palestinien qui a commencé il y a un siècle. On dit parfois que Palestine/Israël c’est une question compliquée. En fait non. Il y a un occupant et un occupé. Le crime fondateur de cette guerre, c’est le nettoyage ethnique prémédité de 1948-49 : la plupart des Palestiniens ont été expulsés de leur propre pays, tout retour leur a été interdit et l’occupant s’est acharné à détruire leurs villages et à effacer leurs traces.
L’idéologie sioniste qui a prémédité et réalisé ce forfait est une idéologie colonialiste et raciste. L’État qu’elle a construit est un État d’apartheid. Le suprématisme juif qui est devenu la règle rappelle les heures les plus sombres de l’apartheid en Afrique du Sud ou dans le Sud des États-Unis.
Le peuple palestinien depuis plus de 70 ans est un peuple de réfugiés.
L’occupant a fragmenté la Palestine en autant de statuts de domination.
Occupé, expulsé, enfermé, discriminé, bombardé, le peuple palestinien résiste. Il s’acharne à continuer de faire société, il reste digne. Il continue d’exiger des choses simples : la liberté, l’égalité et la justice, ce qui signifie bien sûr le retour des réfugiés palestiniens. Il nous appelle à rejoindre le BDS (boycott, désinvestissement, sanctions) contre l’État d’Israël.
Chasser les Palestiniens et voler leurs terres ne suffisaient pas à l’occupant. Dès 1978 puis en 1982, il envahit le Liban. Cette occupation, qui durera plus de 20 ans, sera accompagnée de destructions massives et de crimes contre l’Humanité comme les massacres de Sabra et Chatila où l’occupant israélien et ses complices phalangistes se sont répartis les tâches. Les troupes israéliennes occuperont le Sud Liban, y installeront leurs collabos et essaieront d’installer un gouvernement fantoche à Beyrouth avec l’aide des impérialistes états-uniens et français qui ont envoyé leurs troupes.
C’est le contexte de l’engagement des FARL (Forces Armées Révolutionnaires Libanaises). Georges n’est pas palestinien mais libanais. Il a fait partie de la résistance à l’envahisseur sioniste et s’est engagé dans le FPLP (Front Populaire de Libération de la Palestine).
Il n’a jamais cessé de considérer que la résistance palestinienne est essentielle. Il a toujours lié l’indispensable révolution à la résistance palestinienne. En 35 ans de prison, par ses écrits et ses grèves de la faim en même temps que celles des prisonniers palestiniens, cette solidarité ne s’est jamais démentie.
À l’Union Juive Française pour la Paix, nous ne sommes pas palestinien.nes. Nous nous sommes engagés pour les droits du peuple palestinien parce que le crime se fait en notre nom et parce que, dans ce soutien, se posent toutes les questions essentielles : le refus du colonialisme, de l’apartheid, du racisme et de la participation active des gouvernements occidentaux à cette entreprise criminelle. C’est sans doute cette proximité dans l’analyse du rôle central de la résistance palestinienne qui explique notre engagement sans faille pour la libération de Georges.
Quand je rencontre Georges l’été dernier, je lui dis (il le savait) que l’UJFP est favorable au « vivre ensemble dans l’égalité des droits », en Palestine comme en France. Et que, pour nous, le sionisme n’est pas seulement criminel contre le peuple palestinien. Il est aussi suicidaire contre les Juifs/ves.
Il me dit que si la défaite du sionisme se traduisait par un exode massif, alors on aurait perdu. Je partage totalement cette idée.
Un dernier point : l’emprisonnement est un outil essentiel de l’occupant contre la Palestine. Depuis 1967, 800 000 Palestinien.nes ont connu la prison. L’occupant arrête les enfants, même très jeunes, utilise massivement la détention administrative, isole les détenus et a officialisé la torture.
Toute ressemblance avec la scandaleuse détention de Georges par l’État français depuis 35 ans alors qu’il est libérable depuis 20 ans n’est évidemment pas fortuite.