«Guerre Israël/Hamas » : une expression pour manipuler les esprits

Rappel sémantique

Comment qualifier ce qu’il se passe ? Génocide ? Éradication de Gaza ? Agression raciste de tout un peuple par l’extrême droite israélienne ? La justice internationale tranchera. En tout cas, certainement pas «guerre Israël-Hamas», si les mots ont encore un sens. Quiconque prétend encore faire du journalisme doit cesser d’employer cette expression.

«GUERRE ISRAËL/HAMAS » : UNE EXPRESSION POUR MANIPULER LES ESPRITS.

Les mensonges les plus gros sont parfois ceux qu’on ne remarque même pas tant ils sont sous notre nez.

L’expression «guerre Israël-Hamas» est un cas d’école de propagande de guerre. Une énorme fake news destinée à justifier les pires massacres. Pourtant, elle est utilisée des centaines de fois par jour depuis 11 mois mois dans la presse, à la radio, sur les plateaux de télévision, comme une évidence factuelle.

C’est un élément de langage de l’armée israélienne, qui est repris sans recul par tous les médias : la guerre opposerait «Israël», un pays, un peuple, un État, au «Hamas», une faction armée, un «groupe terroriste». Cette expression transforme totalement la situation, elle renverse le rapport de force. Ce serait juste une opération militaire contre un groupe présenté comme criminel et isolé. C’est comme si on avait renommé la guerre d’Algérie en «guerre France-FLN» ou la guerre du Vietnam «USA-Vietcong».

C’est la population qui est visée

La revue scientifique The Lancet estimait en juillet dernier le nombre de palestiniens tués à Gaza à 186.000, en plus de centaines de milliers de blessés. La zone est tellement dévastée et les infrastructures de soins et administratives sont tant détruites qu’un décompte exacte ne sera sans doute pas possible avant des années.

Une grande partie des corps est encore sous les décombres, dévoré par les chiens, cachés dans les charniers par l’armée israélienne. Et plus de 60% de la surface de Gaza est rasée. Quand on massacre quasiment 10% d’une population en moins d’un an – il y avait 2,5 millions d’habitants à Gaza avant le 7 octobre – et qu’on détruit tous les bâtiments, ce n’est pas une guerre «contre le Hamas» mais contre un territoire et ses habitants.

C’est factuellement faux

Car la Cisjordanie est aussi attaquée par Israël. L’armée israélienne y lance des offensives quotidiennes et même des bombardements. Plus de 600 personnes y ont été tuées depuis deux mois et des milliers d’hectares de terre colonisées. Pourtant, la Cisjordanie n’est pas contrôlée par le Hamas et n’a rien à voir avec l’attaque du 7 octobre. L’extrême droite israélienne a décidé d’annexer le plus de territoires palestiniens possibles et de liquider le plus de civils au passage.

Le Hamas n’est pas seul

Aucun média ne le rappelle, mais le 7 octobre, l’attaque a été menée non pas par le Hamas mais par 10 groupes palestiniens, identifiés par la BBC, dont le Jihad islamique palestinien (islamiste) ou le FPLP (communiste). Il faudrait expliquer les raisons d’une telle coalition, et dire que cette attaque qui a mis d’accord de nombreux groupes armés n’aurait pas eu lieu sans un contexte insoutenable pour les palestiniens. Mais cela compliquerait le scénario simpliste et binaire d’une guerre de la grand démocratie israélienne «contre les terroristes du Hamas».

Crimes contre l’humanité

Quand l’armée israélienne détruit méthodiquement tous les établissements de santé, tue plus de 160 journalistes et plus de 200 humanitaires et le plus grand nombre d’enfants de toutes les guerres depuis des décennies : ce n’est pas une guerre entre «Israël et le Hamas». C’est ce qui fonde l’humanité du peuple palestinien qui est visé.

Discours génocidaires

Le gouvernement israélien parle depuis des années des palestiniens comme des «animaux humains», comme le «peuple des ténèbres», utilise des références messianiques pour justifier leur extermination. Même dans les discours de ces dirigeants, cela n’a jamais été une guerre «contre le Hamas» mais bien contre tout le peuple palestinien.

Quand, pour un ennemi présumé tué, on assassine 20 civils, ce n’est pas une «guerre entre Israël et le Hamas», c’est une opération délibérée de massacre d’un peuple. Il s’agit d’un nettoyage ethnique.

Asymétrie absolue

Enfin, quand on déploie des moyens infiniment plus puissants que son ennemi : des avions de guerre, des drones, des chars, des tirs guidés par intelligence artificielle, face à une guérilla dotée d’armes rudimentaires au sein d’une zone assiégée, le tout appuyé par les plus grandes puissances militaires du monde, peut-on seulement parler de guerre ? Une guerre oppose deux forces armées de puissances comparables. Ici, c’est un conflit totalement asymétrique. Bien plus inégal encore que les grandes guerres coloniales du siècle passé comme le Vietnam ou l’Algérie. C’est comme parler d’une guerre entre un prédateur et sa proie.

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