Responsable de l’Union juive française pour la paix (UJFP), Pierre Stambul réagit au rassemblement d’hier soir.
La Marseillaise. Comment analysez-vous la manifestation de soutien à l’État d’Israël sur le Vieux-Port de Marseille ?
Pierre Stambul. C’est un rassemblement communautariste de soutien à une armée en train de commettre des crimes de guerre. Ça va très loin en France dans ce que j’appellerais le complexe de Massada qui consiste à se sentir de façon irrationnelle assiégés et victimes alors qu’aujourd’hui des enfants, des femmes, des vieillards palestiniens meurent.
La Marseillaise. En tant que juif engagé pour la paix, comment ressentez-vous cette expression faite au nom des juifs de France ?
Pierre Stambul. Je ne dis pas que ces manifestants ne sont pas représentatifs de quelque chose mais ils ne représentent pas l’ensemble des 6 à 700.000 juifs de France. J’éprouve un sentiment de honte, une forme de dégoût devant ce ralliement à l’impérialisme et cette forme de soutien à l’extrême droite israélienne raciste et islamophobe. Ce genre de démarche suscite des réactions anti-juives. À ceux qui poussent les juifs de France à faire leur aliyah en Israël parce que nous ne serions pas en sécurité ici je dis que c’est eux qui nous mettent en danger par leurs prises de positions irresponsables.
Il y a dans cette attitude une négation, une trahison de l’histoire et de la mémoire du judaïsme de France, partie prenante du combat pour la liberté, l’égalité et les droits depuis l’abbé Grégoire jusqu’à la résistance au nazisme en passant par l’affaire Dreyfus. Cette attitude tourne le dos à l’héritage de grandes figures intellectuelles comme Raymond Aubrac, Pierre Vidal-Naquet ou Stéphane Hessel.
Propos recueillis par Léo Purguette (La Marseillaise, le 28 juillet 2014)