Oom-Shmoom : la bataille d’Israël contre les Nations Unies

Par Avi Shlaim, 7 juillet 2023

Francesca Albanese, à gauche, prononce un discours lors du Forum des Nations Unies sur la question de la Palestine à la salle du Conseil de tutelle des Nations Unies à New York, États-Unis, le 18 mai 2018 [File: Atilgan Ozdil/Anadolu Agency/Getty Images]

David Ben Gourion, le premier Premier ministre d’Israël, avait de sérieuses réserves sur les Nations Unies (ONU). Fervent nationaliste juif et partisan de l’autonomie et de l’action directe, son principe directeur en politique étrangère était : « Ce qui compte, ce n’est pas ce que disent les Goyim (non-juifs), mais ce que font les juifs ». Conformément à cette maxime, il a dédaigneusement qualifié l’organisme mondial de « oom-shmoom ». Oom  est l’acronyme hébreu pour Nations Unies. Le sobriquet  oom-shmoom  implique que l’ONU n’a aucune importance et peut être ignorée sans conséquence. 

Alors que le dédain prôné par Ben Gourion continue de définir l’approche d’Israël envers l’ONU, le sentiment ne s’étend pas à ceux au sein de l’organisme mondial qui enquêtent sur les pratiques israéliennes ou souhaiteraient lui demander des comptes. Dans de tels cas, la dérision cède la place à une diffamation en règle. Un exemple particulièrement flagrant est l’effort d’Israël et de ses apologistes pour discréditer et disqualifier Francesca Albanese, l’actuelle « Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans les Territoires palestiniens occupés depuis 1967 ».

Les rapporteurs spéciaux des Nations Unies sont d’éminents experts juridiques nommés par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies et chargés de surveiller et de rendre compte de la situation des droits humains dans le monde. Non rémunérés et servant pour des durées déterminées, ils jouissent d’une plus grande indépendance politique que les fonctionnaires salariés de l’ONU. 

Plusieurs fois par an, le Rapporteur spécial sur la Palestine produit des rapports détaillés sur les transgressions israéliennes. Parfois, cela aboutit à des résolutions qui condamnent les actions d’Israël. Israël, cependant, répond rarement au contenu et aux conclusions de ces rapports, et toute résolution critique se trouve splendidement ignorée. Sa réponse est de tirer systématiquement sur le messager —  son arme de prédilection en matière de diffamation étant de présenter le messager (ici la messagère) comme antisémite. Il le fait même si le Rapporteur spécial se trouve être juif, comme ce fut le cas de Richard Falk, qui a occupé ce poste de 2008 à 2014.

Critiquer l’État d’Israël n’est pas intrinsèquement antisémite. L’antisémitisme et l’antisionisme sont deux phénomènes distincts. Le sionisme est l’idéologie officielle de l’État d’Israël ̶ celle donc d’un État souverain dans un lieu géographique spécifique. Le judaïsme est une religion dont les adeptes vivent à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de l’État d’Israël. L’antisémitisme est la haine des juifs en tant que juifs où qu’ils soient. L’antisionisme est une opposition à l’idéologie de l’État d’Israël ou à certaines de ses politiques et pratiques spécifiques en tant que puissance occupante. Il est donc tout à fait possible d’être antisioniste sans pour autant être antisémite. 

Il est également possible d’être à la fois antisioniste et antisémite. Si c’est la haine des juifs qui constitue le motif pour critiquer Israël, c’est de l’antisémitisme dont il s’agit. Israël et ses apologistes en Occident, cependant, confondent constamment, et souvent délibérément, les deux phénomènes afin de salir, avec le pinceau empoisonné de l’antisémitisme, les partisans des droits du peuple palestinien et les détracteurs d’Israël. 

Comme l’on pouvait s’y attendre, ce sont des accusations d’antisémitisme qui ont été privilégiées dans le traitement infligé à l’actuelle Rapporteuse spéciale sur la Palestine, Francesca Albanese. Albanese est exceptionnellement bien qualifiée pour cette fonction, une lourde tâche qu’elle accomplit pro bono. Elle est une universitaire, une avocate internationale et une experte de premier plan sur les réfugié.e.s de la Palestine, la plus grande communauté de réfugié.e.s apatrides au monde aujourd’hui. Elle est autrice, avec Lex Takkenberg, de  Palestinian Refugees in International Law , le traité juridique le plus complet sur le sujet, publié pour la première fois en 1998 par Oxford University Press ( une seconde édition mise à jour est sortie en 2020). 

En décembre 2022, Albanese a été mise au pilori par un groupe de responsables israéliens, d’apologistes d’Israël, de journalistes idéologiquement motivés et d’activistes des médias sociaux, ceci à cause de commentaires prétendument antisémites faits il y a des années qui, prétend-on, devraient la rendre indigne de servir l’ONU à quelque titre que ce soit. La mission israélienne auprès de l’ONU, qui s’était dès le départ opposée à sa nomination, l’a qualifiée de militante pro-palestinienne qui abriterait des préjugés importants contre l’État juif. Le gouvernement israélien, qui a interdit à ses prédécesseurs immédiats, Michael Lynk et Richard Falk, d’effectuer des visites sur le terrain en Cisjordanie, entrave de façon similaire l’accès d’Albanese. De hauts responsables américains se sont également joints au chœur de protestations visant à dénoncer certains des commentaires d’Albanese. 

Le Centre Simon Wiesenthal, dans une lettre du 14 décembre 2022 au secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a écrit que « Albanese doit être renvoyée, et la chasse aux sorcières du Conseil des droits humains contre Israël doit être stoppée si l’ONU espère conserver sa crédibilité ». Ce n’est ni une critique nouvelle ni originale, mais plutôt un vieux refrain utilisé et réutilisé pour faire taire toute voix au sein des Nations Unies, qui critiquerait, même de façon discrète, l’État d’Israël. C’est la là véritable chasse aux sorcières.

Albanese a son franc-parler, personne ne peut le nier. Contrairement à de nombreux diplomates de l’ONU, elle n’a pas peur de dire la vérité au pouvoir. Son mandat est « d’enquêter sur les violations par Israël des principes et des bases du droit international », et c’est ce qu’elle fait sans crainte ni recherche d’intérêt. Elle se décrit comme une juriste militante. Elle aime son métier et insiste qu’il ne saurait avoir de justice si elle n’est pas pour toutes et tous. Contrairement à ses détracteurs  qui accordent à l’antisémitisme un statut à part, elle s’oppose avec un grand souci de cohérence à toutes les formes de racisme, y compris l’antisémitisme et l’islamophobie. Elle est de même admirable dans sa défense inébranlable des droits humains et de la liberté d’expression.

Les preuves avancées à l’appui de l’affirmation selon laquelle Albanese serait antisémite défient l’entendement. Le Times d’Israël a mené la charge le 14 décembre 2022. Se livrant à une attaque apparemment politiquement motivée, il a repêché un de ses messages Facebook de 2014. Elle y avait écrit : « L’Amérique et l’Europe, la première sous l’emprise du lobby juif, et la seconde submergé par son sentiment de culpabilité à propos de l’Holocauste, restent à distance.»  Le message incriminé a été écrit à titre personnel, huit ans avant qu’elle n’occupe son poste à l’ONU. Le contexte, passé sous silence comme à l’habituel par ses détracteurs, était l’assaut israélien sauvage sur la bande de Gaza qui a coûté la vie à plus de 2 000 palestiniens, dont 550 enfants. L’assaut a été – comportement dont Israël est coutumier – frauduleusement nommé « Operation Protective Edge ».

 Mais il n’y eut point de « protection » là-dedans . Il s’agissait d’un recours à la force contre des civils à des fins politiques lequel, à ce titre, constituait un acte de terrorisme d’État. 

Albanese avait toutes les raisons pour fustiger l’Amérique et l’Europe de n’avoir rien fait pour contenir l’agresseur. L’utilisation du terme « lobby juif » était malheureuse car elle alimente le stéréotype d’un pouvoir juif dissimulé. Il eut été plus juste d’utiliser le terme « lobby israélien ». Et dire que l’Amérique est « sous l’emprise » de ce lobby était sans doute exagéré.  

Albanese a reconnu qu’elle s’était mal exprimée et s’est distanciée du langage qu’elle avait alors utilisé. Dans le même temps, elle a affirmé sa détermination à ne pas se laisser distraire de son mandat de rendre compte des violations des droits de l’homme par Israël, mais aussi  de ne pas permettre à autrui de définir qui elle est ou quelle sont ses convictions.

Cette remise en question d’elle-même par Albanese n’a rien changé pour ses détracteurs. Leur problème avec elle n’est pas le langage qu’elle utilise, mais plutôt l’examen minutieux des violations flagrantes du droit international par Israël que son action génère, et sa défense de principe des droits humains du peuple palestinien. Implicite dans les attaques contre elle est la notion que quiconque ose tenir Israël responsable de ses violations des droits des palestiniens et palestiniennes peut être qualifiée ipso facto d’antisémite. Il aurait été plus honnête de leur part de le dire sans ambages. Plus largement, ces attaques visent à détourner l’attention du fait, affirmé par la population palestinienne depuis des décennies et confirmé ces dernières années par les principales organisations mondiales de défense des droits humains, que des millions de palestiniens – hommes, femmes, et enfants – vivent sous un régime d’apartheid qui les prive de leurs droits fondamentaux.  

Se focalisant sans relâche sur les anciens commentaires publiés par Albanese sur les réseaux sociaux, ses détracteurs visent aussi à détourner l’attention du travail de fond qu’elle a produit depuis sa nomination par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Son  premier rapport, soumis en septembre 2022, rendait compte d’un examen profondément analytique et méticuleusement documenté du droit à l’autodétermination tel qu’il s’applique aux Territoires palestiniens occupés depuis 1967. Dans ce document, Albanese va plus loin, ou plutôt plus en profondeur, que les rapports historiques sur les droits humains qui ont conclu récemment que le traitement du peuple palestinien par Israël équivaut au crime d’apartheid. Elle n’a pas abandonné le cadre de l’apartheid, le tenant pour nécessaire mais aussi pour insuffisant. La nouveauté de son analyse réside, en effet, dans l’établissement d’un cadre juridique qui permet de considérer l’Occupation comme le produit d’un colonialisme de peuplement. Vu sous cet angle, dans le cas d’Israël-Palestine, il ne s’agit pas d’un simple conflit mais du rapport entre occupant et occupé, entre colonisateur et colonisé. Cette réalité coloniale, selon Albanese, piège les deux peuples : la réalisation du droit palestinien à l’autodétermination est la clé pour transformer cette réalité– sans elle, le peuple palestinien ne pourra s’assurer d’aucun de ses droits fondamentaux. Le démantèlement de l’Occupation et du régime d’apartheid qui lui est inextricablement lié est donc, selon elle, la condition préalable à tout règlement pacifique en Israël-Palestine.

Albanese critique ouvertement la communauté internationale pour son hypocrisie en préconisant une solution à deux États sans rien faire pour la promouvoir, bref pour avoir parlé sans agir. Son rapport représente un changement de paradigme : la loi doit diriger la politique et non l’inverse. Rien d’étonnant à ce qu’elle ne soit pas populaire auprès d’Israël et du lobby pro-israélien. Incapables de réfuter ses arguments, ils recourent à des attaques ad hominem et à la diffamation. Leur but est de la discréditer, de la détourner de l’accomplissement de son mandat onusien et de saper ses efforts pour tenir Israël responsable de ses violations quotidiennes du droit international humanitaire.  

Récemment, plusieurs campagnes ont été lancées pour faire pression sur l’ONU afin qu’elle démette Albanese de ses fonctions. Une dernière série d’attaques fait suite à un tweet qu’elle a publié, déclarant : « Israël a le droit de se défendre, mais ne peut revendiquer ce droit lorsqu’il s’agit des personnes qu’il opprime et dont il colonise les terres ». Cet argument est une interprétation légitime de la loi. Son tweet fut cependant dénaturée, et la précaution prise au début de sa déclaration négligée afin de soutenir la fausse affirmation qui voudrait qu’Albanese nie tout droit d’Israël à la légitime défense. Pour des groupes sionistes politiquement motivés tels que UN Watch, NGO Monitor et le International Legal Forum, le tweet a servi de prétexte pour intensifier les attaques personnelles contre la Rapporteuse. 

Le International Legal Forum, qui se présente comme un réseau mondial de plus de 4 000 avocats et militants pro-israéliens, dans une lettre du 11 avril 2023 au Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, et au Haut-commissaire aux droits humains, Volker Türk, a lancé une diatribe effrénée contre Albanaise et a cité son tweet comme une « preuve supplémentaire » de son « parti pris implacable, systématique et franchement dément contre Israël ». Fait révélateur, il a appelé le Secrétaire général non seulement à renvoyer Albanese, mais à supprimer son poste. « L’ONU serait bien mieux servie », a-t-il conclu,   « en remplaçant le mandat de Me Albanese par celui d’un Rapporteur spécial pour la lutte contre l’antisémitisme ». L’ILF coopère étroitement avec le gouvernement israélien et a également bénéficié de son soutien financier. 

Suite à cela, le gouvernement israélien est intervenu directement au niveau officiel dans un effort agressif pour ostraciser et réduire au silence la Rapporteuse spéciale. Amichai Chikli, Ministre israélien des affaires de la diaspora et de la lutte contre l’antisémitisme, a envoyé à son tour une lettre au Secrétaire général de l’ONU et au Haut-commissaire aux droits de l’homme. Après avoir dénoncé les « propos répréhensibles, irresponsables et incitant à la terreur » d’Albanese, Chikli a exhorté l’ONU à « supprimer définitivement le poste de Me Albanese ».

Cette conduite est dans la droite ligne du parcours de Chikli en tant que politicien de la droite ultra-nationaliste. Dans un podcast en 2021, par exemple, Chikli a rejeté d’emblée toute notion d’une identité palestinienne et a appelé à son élimination pure et simple. « [‘L’identité palestinienne], a-t-il dit,  « s’est construite uniquement sur l’opposition au sionisme.  Il n’y a pas d’identité nationale palestinienne avec son contenu propre. Nous ne serons donc débarrassés de ce conflit qu’une fois cette identité nationale abolie. »   

Une autre cible choisie par le gouvernement israélien est la « Commission d »enquête internationale permanente pour enquêter dans le Territoire palestinien occupé et en Israël », créée par le Conseil des droits humains (CDH) des Nations Unies en 2021. Son mandat est d’enquêter sur toutes les violations présumées du droit international, ainsi que sur les causes profondes du conflit, « y compris la discrimination et la répression  systématiques »  dans les Territoires en question. Son  premier rapport, publié en mai 2022, a mis en évidence un vaste réseau de preuves témoignant de nombreuses violations israéliennes des droits humains internationaux et du droit international humanitaire, ainsi que de l’impunité systématique dont ont joui les auteurs de ces abus sans que personne ne leur demande d’en rendre compte. Israël refuse de coopérer avec la Commission et a rejeté son rapport en le qualifiant de « manifestement antisémite ». 

Un autre haut responsable de l’ONU visé par une campagne de diffamation est Craig Mokhiber, le directeur du Bureau de New York du Haut-commissariat aux droits humains (HCDH). Mokhiber a un palmarès impressionnant dans le domaine des droits de l’homme s’étendant sur plus de quatre décennies. En raison de sa critique explicite du traitement réservé au peuple palestinien par Israël, les médias pourvoyeurs d’idéologie, et les organisations spécialisées dans la défense d’Israël, comme UN Watch et le Centre Simon Wiesenthal, ont lancé une attaque concertée en mars 2023, qualifiant Mokhiber d’ »extrémiste anti-israélien » et de « antisémite ». La mission israélienne auprès de l’ONU à Genève a sans surprise publié une déclaration amplifiant ces attaques ad hominem.

L’arme préférée d’Israël pour mener sa campagne mondiale de  délégitimation de ses détracteurs est la  définition ad hoc (working definition)  de l’antisémitisme, que la International Holocaust Remembrance Alliance (IHRA) a adoptée en mai 2016. Comme l’ont souligné de nombreux  commentateurs, avocats et spécialistes de l’antisémitisme, cette « définition » est mal rédigée, incohérente, désespérément vague, vulnérable aux abus politiques et totalement inadaptée au but affiché. Elle ne satisfait pas à l’exigence la plus élémentaire d’une définition, qui est de définir. La définition de base, deux phrases vides de sens, ne mentionne pas Israël par son nom, mais pas moins de sept des onze « exemples contemporains d’antisémitisme » qui doivent servir d’illustration, se rapportent à Israël. 

Comme on pouvait s’y attendre, l’un des éléments de la mise en accusation d’Albanese est sa vive critique de la définition de l’IHRA et son appel à l’Union européenne pour que celle-ci réexamine et reconsidère son approbation et son utilisation de cette définition. Elle a souligné que confondre la critique d’Israël avec l’antisémitisme conduit souvent à accuser d’antisémitisme des groupes de défense des droits humains, alors qu’en fait ils expriment à l’égard de la politique israélienne, des préoccupations légitimes et fondées sur des preuves. Citant Kenneth Roth, l’ancien directeur exécutif de Human Rights Watch, Albanese a écrit sur Twitter qu’ »une telle formulation dégrade également le sens de l’antisémitisme et affaiblit la lutte contre celui-ci ».  

Les Nations Unies, que Me Albanese compare à un dinosaure dans sa lenteur et son excessive prudence, a récemment pris quelques nouvelles mesures qui cherchent à demander des comptes à Israël. En janvier 2023, l’Assemblée générale a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye de rendre un avis consultatif sur les conséquences juridiques de l’Occupation par Israël des Territoires palestiniens. Israël a dénoncé la demande, arguant que la CIJ a un parti pris contre lui. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu l’a qualifiée de « décision ignoble ». Le soutien palestinien au recours à la CIJ a été qualifié par les responsables israéliens d’acte de « terrorisme diplomatique ».  C’est le genre de discours qui sied mal au célèbre « chutzpah ». La vérité est qu’Israël a peur de la CIJ, non pas parce qu’elle est partiale – mais parce qu’elle est impartiale !  

Plus inquiétante pour Israël est la décision de l’ancienne procureure en chef de la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye, Fatou Bensouda, d’enquêter sur les crimes de guerre en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. La CIJ se charge de procédures civiles; la CPI de mener des investigations criminelles. Quelle que soit la nature du défi, cependant, la réaction instinctive d’Israël est de passer à l’offensive. C’est un adepte de longue date de la maxime en quoi l’attaque est la meilleure défense. Plus les actions brutales et criminelles d’Israël se sont mises en lumière, plus ses porte-paroles et ses groupes de pression dédiés deviennent agressifs dans leurs efforts pour vilipender et dissuader ses détracteurs. 

Ce que le gouvernement israélien et ses alliés à l’étranger ont en commun, c’est l’incapacité ou plutôt le refus d’accepter toute donnée objective sur Israël. Ils sont programmés pour traiter toute critique d’Israël, même logique et rationnelle, fondée sur des faits, comme une preuve de sectarisme anti-juif. Paradoxalement, les seuls à bénéficier d’un blanc-seing sont de vrais antisémites comme l’ancien président américain Donald Trump, Viktor Orbán, le premier ministre hongrois, et Jair Bolsonaro, l’ancien président du Brésil. Tous trois sont des politiciens notoirement racistes mais de fermes partisans d’Israël. L’antisémitisme et le pro-sionisme ne sont pas aussi incompatibles qu’il y paraît à première vue. Comme Theodor Herzl, fondateur du mouvement sioniste et visionnaire du futur État juif, l’avait prédit il y a plus d’un siècle : « Les antisémites deviendront nos amis les plus fidèles ». 

Aujourd’hui, c’est Israël qui est sur le banc des accusés, et non la  Rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des droits humains dans les Territoires palestiniens occupés depuis 1967 . Albanese est un expert international extrêmement compétent et consciencieux. Elle ne mérite que des félicitations pour le courage et l’engagement dont elle fait preuve dans l’exercice de son mandat à l’ONU. Elle serait même en droit de porter la plupart des attaques contre elle depuis les quartiers sionistes comme badge d’honneur. 

Une dernière ironie. Les trois principaux piliers du judaïsme sont la vérité, la justice et la paix. Albanese incarne ces valeurs de façon remarquable. Et il y aura de nombreux juifs dans le monde, troublés par la trahison par Israël de ces valeurs juives fondamentales — en particulier depuis la formation du gouvernement de coalition agressivement anti-palestinien, d’extrême droite, xénophobe, homophobe et ouvertement raciste, dirigé par Benjamin Netanyahu —  qui serait bien avisés de la remercier d’avoir défendu ces valeurs à ce moment critique de l’histoire d’Israël.

Source : Jadaliyya

Traduction BM pour l’Agence Média Palestine