Madame Pécresse, non au négationnisme

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Lettre ouverte à Valérie Pécresse à propos des crimes contre l’humanité commis en Algérie.

Madame,

Je viens de prendre connaissance de vos propos tenus le 3 janvier : « En Algérie, il y a eu effectivement des exactions, il y a eu des pages sombres de l’histoire de France qui ont été écrites mais crimes contre l’humanité, c’est ce qu’on reproche aux nazis et à Hitler, et je ne pense pas qu’on puisse parler de crimes contre l’humanité ».

Je dois dire que je suis inquiet qu’une candidate à la Présidence de la République puisse déclarer une telle énormité.

Appelé pendant la Guerre de Libération de l’Algérie, j’ai été affecté de juin 1961 à mars 1962 à la Villa Susini à Alger. Cette Villa a eu le « privilège » d’être un centre de torture qui a fonctionné pendant toute cette période (d’autres centres de torture à Alger n’ont fonctionné que quelques mois ou quelques années). C’est là que Jean-Marie Le Pen s’est « remarquablement » distingué pendant la Bataille d’Ager, faisant disparaître, selon les rumeurs, des corps dans des cuves d’acide. La Légion étrangère avait « abrité » de nombreux SS qui s’y étaient réfugiés pour échapper aux jugements, mais qui ont mis en œuvre leur expérience et formé des tortionnaires français.

Je vous joins mon livre de témoignage sur cette triste expérience que j’y ai vécue dans cette villa. Je vous invite aussi à visiter mon site qui devrait vous permettre de combler une partie de vos lacunes au sujet de cette période.

Comment pouvez-vous dire, compte tenu de la pratique institutionalisée de la torture, qu’il ne se serait pas commis de crimes contre l’humanité. En 2002, dans le cadre des émissions qui allaient éclairer la commémoration du 40ème anniversaire de la fin de cette Guerre, un documentaire, essentiellement tourné à la Villa Susini (dans lequel je témoigne) est passé sur France 2 relatant justement ces tortures et tout particulièrement les viols massivement utilisés alors.

Mais il n’y a pas eu que ce type de crimes contre l’humanité commis au nom de la France. La liste est longue : il y a eu aussi les crevettes Bigeard, les camps d’internement pudiquement appelés de regroupement (à ce sujet, le rapport Rocard établi avant la fin de cette guerre dénombrait déjà plusieurs centaines de milliers de morts).

Il y a eu aussi ces crimes de guerre comme les villages rasés au napalm : les historiens estiment entre 600 et 800 villages. Sur mon site vous trouverez le reportage que j’ai fait quand j’ai découvert les ruines de ce village de Zaatcha, village alors de 800 habitants (2 fois Oradour sur Glane, même si ce n’est pas seulement le nombre des victimes qui en détermine l’importance) et ce, dès novembre 1954. Dans les crimes de guerre il y a aussi l’utilisation du Gaz VX et Sarin, les essais nucléaires au Sahara…

Il y a eu également ces crimes d’État (même si dans ce cas il n’y a pas eu de définition juridique) commis à Paris le 17 octobre 1961 et le 8 février 1962 où la décision de répression a été prise en conseil des ministres.

Cette liste n’est malheureusement pas exhaustive !!!

Alors, non, Madame de tels propos sont inacceptables, d’autant plus pour une candidate à la fonction suprême à la Présidence de la République. Un tel négationnisme est comparable à celui de Jean-Marie Le Pen considérant que les chambres à gaz sont un « point de détail de l’histoire de la Seconde Guerre Mondiale »

 Recevez, Madame, mes salutations indignées