Khalil Tafakji, un géographe palestinien à Paris à l’occasion de la sortie de son livre « 31° Nord, 35° Est – Chroniques géographiques de la colonisation israélienne »

À l’occasion de la venue exceptionnelle à Paris de Khalil Tafakji, géographe palestinien, chercheur internationalement reconnu pour son travail de cartographe et acteur-témoin du conflit israélo-palestinien, une rencontre dédicace et une discussion sont organisées au Bar 61 le jeudi 6 février 2020 à 19 H.

Khalil Tafakji avec Stéphanie Maupas publiera 31° Nord, 35° Est – Chroniques géographiques de la colonisation israélienne (La Découverte) à paraître le 23 janvier 2020 en librairie.

Khalil Tafakji sera à Paris du jeudi 6 au 9 février.

  •  Jeudi 6 février 2020 à 19 h 00
  • Bar 61 – 3, rue de l’Oise (Canal de l’Ourcq) 75019 Paris
  • Dédicace et discussion avec Khalil Tafakji & la journaliste indépendante Stéphanie Maupas

 Il participera également, à l’invitation de l’IREMMO, à une rencontre au « Maghreb-Orient des Livres » le dimanche 9 février à 15 H 15 qui se tiendra dans les Salons de l’Hôtel de Ville.

Enfant de Jérusalem, Khalil Tafakji a sillonné la Palestine historique pendant trente ans, et cartographié la colonisation des territoires, depuis la création d’Israël en 1948 et l’occupation de la Cisjordanie et Gaza. Le géographe de Jérusalem raconte son histoire et, à travers ses cartes, celle de la colonisation israélienne.

Stéphanie Maupas a accompagné Khalil Tafakji dans l’écriture de son récit, écrit en français, à la première personne. Journaliste indépendante, elle collabore notamment avec Le Monde.

« Ce jour du printemps 1995, je roulais vers la plus vieille cité du monde. J’avais rendez-vous dans les bureaux de Yasser Arafat à Jéricho. Depuis mai 1994, les Palestiniens jouissaient de l’autonomie sur la bande de Gaza, au sud-ouest d’Israël, et sur Jéricho, à l’est des Territoires occupés. Abu Amar, de son nom de guerre, était contraint de se déplacer par les airs entre ces territoires distants d’une petite centaine de kilomètres. Circuler par la route l’aurait obligé à traverser les frontières d’Israël.

Dans le sillage de la déclaration d’Oslo, première étape de nos tractations vers une paix incertaine, il m’avait invité, en tant que géographe, à présenter mes recherches sur l’évolution présente et future de la colonisation israélienne.

Plus je progressais dans ma démonstration, plus mes auditeurs se raidissaient. Le futur chef de l’Autorité palestinienne balançait nerveusement ses jambes, et je pouvais percevoir un léger tremblement sur ses lèvres. Il me fusilla du regard lorsque j’annonçai : “Je ne sais pas si quelqu’un vous a promis que vous auriez un État, mais je parle à partir des cartes, et, si l’on regarde les cartes, il n’y a pas d’État palestinien… Vous n’avez rien.” »

Khalil Tafakji, né après la Nakba de 1948, est un enfant de Jérusalem. Il a sillonné la Palestine pendant trente ans et cartographié la colonisation des Territoires occupés. Membre de la délégation palestinienne lors des pourparlers de paix et directeur du département de cartographie de la Société d’études arabes, il raconte son histoire et, à travers ses cartes, celle de la colonisation israélienne.

Avant-critique publiée dans Livres Hebdo le 10 janvier 2020

« Qui de mieux placé qu’un cartographe pour rendre visible un conflit de frontières toujours irrésolu ?

Depuis plus de trente-cinq ans, le géographe palestinien Khalil Tafakji né en 1950, deux ans après la création de l’État d’Israël, dans la vieille ville de Jérusalem et habitant aujourd’hui à Jérusalem-Est (31° Nord, 35° Est selon les coordonnées GPS qui donnent leur titre à ces chroniques écrites en collaboration avec la journaliste Stéphanie Maupas), retranscrit en cartes l’évolution des contours d’un territoire âprement disputé sur lequel il espère encore voir un jour naître un État pour son peuple. Au sein du département de cartographie de la Société d’études arabes depuis 1983, il documente cartes et photos satellites à l’appui cette bataille des mètres carrés qui se joue entre la Méditerranée et le Jourdain et à laquelle aucun accord n’a pu jusqu’ici mettre fin, décrivant « la stratégie colonisatrice de l’État israélien », sa politique d’occupation et d’annexion planifiée. Khalil Tafakji dont l’une des premières missions a été d’établir une carte de la Palestine en 1945 (publiée en 1988 et reproduite dans le livre) est conscient des enjeux très politiques de son travail à la dimension à la fois historienne et prospective, même s’il assure n’avoir jamais été militant d’aucun parti. C’est fort de sa connaissance de terrain, des années passées à arpenter au sens premier ce « territoire en peau de léopard », en qualité d’expert – de « simple technicien » dit-il – qu’il a été amené à conseiller le leader de l’OLP Yasser Arafat et les négociateurs palestiniens avant et après l’accord d’Oslo signé avec Yitzhaz Rabin en 1993, et qu’il a été « cartographe de la délégation » notamment dans la préparation d’Oslo I et Oslo II (ou Accords de Taba) en 1995. La Ligne verte, le tracé du Mur – « clôture de sécurité » pour Israël et selon lui « la manifestation la plus criante du régime d’apartheid auquel est aujourd’hui soumis ce qu’il reste de Palestine », Hébron, le Golan, la bande de Gaza, la Cisjordanie morcelée en trois zones d’autonomie différente, les colonies et les avant-postes israéliens et la question très épineuse de Jérusalem…, tous les dossiers conflictuels sont ainsi saisis à travers son œil de géographe. Une lecture qui ne rend pas très optimiste quant à la proximité d’une issue pacifiée mais qui permet de mieux visualiser les enjeux et les rapports de force. » Véronique Rossignol – Livres Hebdo


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