Le 21 et 22 décembre 2023 à Nuseirat : la situation est catastrophique

Le vendredi 22 décembre, nouvelle terrible

Abu Amir a reçu l’ordre d’évacuer sa maison d’où il organisait l’aide pour des centaines de personnes.
On ne sait pas où ils vont aller ni comment, ni avec quelle possibilité de s’abriter.

Le jeudi 21 décembre 2023 au soir, par téléphone

Abu Amir de Nuseirat (centre de la bande de Gaza) :

C’est le premier soir, depuis longtemps, où il fait nuit : pas de bombardements en ce moment sur Nuseirat. Nous savons qu’il y a au Caire des discussions, pour un tout petit moment de calme ?

Les nouvelles qui arrivent de la ville de Gaza, par plusieurs familles en fuite, sont terribles : tant de cadavres jonchant les rues. Nombreux bombardements, puis les soldats qui ont pris pied dans la ville arrivent, ils ordonnent aux gens de sortir des maisons, et les abattent directement.

Un récit parmi d’autre : un appel à la Croix Rouge, pour des gens blessés, et la réponse : « nous ne pouvons répondre après 20 h le soir, nous n’avons plus ni infirmières ni médecins. Mais d’où appelez-vous ? – de Moldavie ».

Les communications internes sont coupées, les deux réseaux téléphoniques principaux, l’Internet.

Comment comprendre cet acharnement ? La résistance a tué beaucoup de leur gens, ils veulent tuer un maximum de Gazaouis à leur tour. Les résistants se battent ensemble, le Hamas, le Jihad Islamique, le Fatah, le FPLP ; mais le leader est le Hamas, au sens où c’est lui seul qui publie les informations.

Ici à Nusseirat on voit toujours arriver de nouvelles nombreuses familles, quittant Burej, Magazi, les abords de la route Salah ad-Din. Hier, nous sommes allés dans une partie de Nusseirat où s’entassent, s’abritant dans les ruines, de nombreuses familles. Ils ont appelé l’UNRWA, pour expliquer qu’ils n’avaient rien à manger depuis plusieurs jours, mais l’UNRWA ne pouvait rien faire. Nous avons pu distribuer 100 repas, ce n’est pas beaucoup mais il n’y avait pas de possibilités supplémentaires.

Les cuisines qui préparent les repas ne peuvent plus travailler chaque jour, plus de matériel, plus de produits, plus de bois pour cuire. Elles fonctionnent un jour sur deux. C’est pourquoi nous n’avons pu faire préparer que 100 repas, en n’en distribuant qu’un seul par petites familles.

Nous cherchons toujours des tentes, soit des stocks non encore trouvé (on nous en a promis une dizaine, pas plus, et on ne les a pas encore), soit même des particuliers ayant encore une maison et vendant leur tente. Nous trouvons encore des jerricans à remplir d’eau potable, c’est très important pour les familles.

Recouvrer l’argent de la solidarité est toujours aussi difficile. Les envois Western Union depuis la France sont extrêmement limités, pour le prochain je dois attendre un délai de 30 jours. Les banques « palestiniennes » sont très lentes à enregistrer les virements de l’étranger. Passer par un compte étranger d’un pays d’où WU applique moins de restriction est pour l’instant le plus efficace.

Il faut comprendre l’extrême fatigue des Gazaouis. « Je pense que si maintenant, une porte s’ouvrait pour la sortie de Gaza, les gens sortiraient ».

Abu Amir décrit ses discussions avec les nombreux déplacés installés au long de la rue qu’il a emprunté hier pour se rendre dans une des écoles-refuge, à deux km de chez lui : des gens épuisés, se parlant tout seuls, constatant que leurs autorités les ont laissé complètement seuls. Oui, s’ils peuvent, ils s’échapperont.

Au seul hôpital restant, à Deir al Balah, il n’y a plus la place de poser un pied. C’est bondé de médecins, de réfugiés, de blessés qui ne peuvent même plus être pris en charge, allongés par terre, pour lesquels les médecins ne peuvent plus rien.

L’un des médecins a dit à Abu Amir : « cela fait trois jours que je n’y vais plus, je n’y trouve rien à faire, on ne peut plus rien pour les blessés. A l’appel : ‘venez docteur, ce blessé a besoin de soins’, l’un des médecins a répondu : ‘laissez-le mourir tranquillement, nous ne pouvons pas l’aider’. Je jure que dès que je ferme les yeux je rêve de ces gens, je ne peux plus dormir ».

Car les survivants des bombardements sont dans des conditions épouvantables, une histoire parmi d’autre : un médecin qui venait de tenter d’installer des enfants, aux visages entièrement noircis, sort un instant, et voit sa femme à la porte. ‘Que fais-tu là ?’. ‘Mais c’est nos enfants que tu viens de recevoir là’. Il a fallu qu’il tente de nettoyer les visages pour les reconnaître…

L’occupation s’acharne contre les soignants. Chaque jour on apprend la mort d’un médecins. Vous pouvez trouver des listes sur Internet.

Compte-rendu des actions du 21 décembre 2023

L’équipe de Nusseirat auprès d’Abu Amir, 21 décembre 2023. Suite à l’attaque féroce de l’occupation sur la bande de Gaza du 7 octobre à aujourd’hui, l’occupation a déplacé près d’un million de Palestiniens des zones de la ville de Gaza et du nord de la bande de Gaza vers le centre et le sud de la bande de Gaza. Les réfugiés ont été contraints de tout laisser derrière eux et de sauver leur vie et celle de leur famille, et ils ont été forcés de s’abriter dans des écoles et des espaces vides, avec juste les décombres des bâtiments détruits pour échapper à la pluie et au froid. Vous pouvez imaginer la densité de réfugiés qui se sont retrouvés sans abri et dans des conditions humanitaires catastrophiques. Ce nombre de réfugiés augmente jour après jour avec l’occupation qui envahit de nouvelles zones dans le sud et le centre de la bande de Gaza.
Les maladies se sont répandues parmi les réfugiés, et les enfants affamés sont proche de la mort. Les pharmacies sont vides de médicaments et le seul hôpital de la région de Deir al-Balah est surchargé de réfugiés. Il n’y a plus de place pour soigner les blessés. Dans cet hôpital, les blessés sont allongés sur le sol et les médecins ne peuvent que leur prodiguer les soins de premier secours, car ils n’ont pas de matériel médical. Bref, l’endroit ici est devenu un cimetière, et les gens sont désespérés, attendant de mourir, soit par les bombardements, soit par la famine.

Aujourd’hui, l’équipe de travail a distribué 100 repas aux personnes déplacées dans la zone du marché de New Nuseirat, après plusieurs appels de la part de ces familles à l’UNRWA indiquant qu’elles étaient sans nourriture depuis plusieurs jours. Nous avons donc travaillé aujourd’hui pour fournir 100 repas à un certain nombre de personnes déplacées, et le reste de la distribution sera achevé demain ou après-demain, si l’une des cuisines avec lesquelles nous traitons peut travailler. A condition que nous trouvions de quoi fournir le nécessaire pour ces repas.

Les repas d’aujourd’hui ont été distribués à 44 familles, soit 244 personnes. Le nombre de demandeurs était élevé et les repas peu nombreux, mais c’est ce que nous avons pu fournir aujourd’hui.

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