Les efforts des Nations Unies pour protéger les terres palestiniennes de l’exploitation économique ont échoué, et mettent en évidence l’hypocrisie des États occidentaux.
Source : https://www.jonathan-cook.net/2020-02-18/un-business-illegal-israel-settlements/
Traduction : lecridespeuples.fr
Après de longs retards, l’ONU a finalement publié la semaine dernière une liste des entreprises qui tirent profit des activités illégales de colonisation d’Israël en Cisjordanie. La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a annoncé que 112 grandes entreprises avaient été identifiées comme opérant dans les colonies israéliennes d’une manière qui viole les droits de l’homme.
Outre les grandes entreprises israéliennes (banques, services de transport, cafés, supermarchés, entreprises de l’énergie, du bâtiment et des télécommunications), les entreprises internationales de premier plan Airbnb, booking.com, Motorola, Trip Advisor, JCB, Expedia et General Mills sont désignées [voir la liste complète ci-dessous].
Human Rights Watch, un organisme de vigilance mondial pour le respect des droits de l’homme, a noté en réponse à la publication de la liste que les colonies violaient la quatrième Convention de Genève. L’organisme a fait valoir que les activités des entreprises signifient qu’elles ont aidé « à commettre des crimes de guerre ».
La présence des entreprises dans les colonies a contribué à brouiller la distinction entre Israël et les territoires palestiniens occupés. À son tour, cela a normalisé l’érosion du droit international et renversé un consensus international de longue date sur la création d’un État palestinien viable aux côtés d’Israël.
Les travaux de compilation de la base de données ont commencé il y a quatre ans. Mais Israël et les États-Unis ont exercé de fortes pressions sur l’ONU dans l’espoir d’empêcher la liste de voir le jour.
L’affirmation tardive de l’organisme onusien ressemble étrangement à une réprimande à l’administration Trump pour avoir rendu public ce mois-ci son plan de « paix » au Moyen-Orient. Celui-ci donne le feu vert à l’annexion par Israël des colonies et des zones les plus fertiles et les plus riches en eau de Cisjordanie.
En réponse à la publication de la liste, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a menacé d’intensifier l’ingérence de son pays dans la politique américaine. Il a noté que ses responsables avaient déjà « promu des lois dans la plupart des États américains, qui déterminent qu’une action ferme doit être prise contre quiconque essaie de boycotter Israël ».
Il était soutenu par tous les principaux partis juifs d’Israël. Amir Peretz, chef du parti travailliste de centre-gauche, a promis de « travailler dans tous les forums pour abroger cette décision ». Et Yair Lapid, un dirigeant de Bleu et Blanc, le principal rival de Netanyahou, a qualifié Bachelet de « Commissaire aux droits des terroristes ».
Pendant ce temps, Mike Pompeo, le Secrétaire d’État américain, a accusé l’ONU de « parti pris anti-israélien implacable » et de soutien au mouvement international de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS).
En fait, l’ONU ne prend aucune mesure significative contre les 112 entreprises et n’encourage pas à le faire. La liste est conçue comme un outil de stigmatisation, soulignant que ces entreprises ont toléré, par le biais de leurs activités commerciales, le vol de terres et de ressources aux Palestiniens par Israël.
L’ONU a même adopté une vision extrêmement étroite de ce qui constitue une implication dans les colonies. Par exemple, l’ONU a exclu des organisations comme la FIFA, l’association internationale de football, dont la filiale israélienne comprend six équipes des colonies.
Cette semaine, il est également apparu qu’Amazon aidait les colonies, bien que cette entreprise ne figure pas sur la liste. Le géant de la vente en ligne livre gratuitement aux adresses dans les colonies de Cisjordanie, tout en imposant des frais d’expédition élevés aux Palestiniens vivant à proximité (à moins qu’ils ne s’identifient comme vivant en Israël).
L’une des entreprises identifiées, Airbnb, a annoncé fin 2018 qu’elle retirerait de son site Web de réservation de logements toutes les propriétés situées dans les colonies, sans doute pour éviter d’être stigmatisée publiquement.
Mais peu de temps après, Airbnb a fait marche arrière. Il est difficile d’imaginer que la décision a été prise pour des raisons strictement commerciales : l’entreprise ne recense que 200 propriétés à louer sur son site.
Une conclusion plus réaliste est qu’Airbnb craignait le contrecoup de Washington, et a été intimidé par un déluge d’accusations de groupes pro-israéliens selon lesquels sa nouvelle politique était antisémite.
En fait, le moment choisi par l’ONU ne pourrait pas être plus tragique. La liste ressemble plus au dernier soupir de ceux qui, par leur négligence pendant près de trois décennies, ont permis à la solution à deux États de se flétrir.
Le soi-disant plan de paix de Trump n’a pu se permettre d’être aussi unilatéral que parce que les puissances occidentales avaient déjà permis à Israël d’annuler tout espoir d’un État palestinien à travers des décennies d’expansion ininterrompue des colonies. Aujourd’hui, près de 700 000 Juifs israéliens vivent sur les territoires palestiniens occupés. Le gouvernement israélien ne cesse d’annoncer des plans de construction de nouveaux logements dans les territoires occupés.
Lundi, les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne se sont réunis pour répondre au plan, mais comme prévu, ils ont accepté de reporter toute décision jusqu’après les élections israéliennes du 2 mars. Une opposition tiède est probablement la meilleure à laquelle on puisse s’attendre.
Les actions de plusieurs États européens continuent de parler beaucoup plus fort que n’importe quels mots.
Vendredi dernier, l’Allemagne s’est jointe à la République Tchèque en déposant une requête auprès de la Cour pénale internationale de La Haye en soutien à Israël, au moment où la Cour délibère sur l’opportunité de poursuivre les responsables israéliens pour crimes de guerre, y compris pour l’établissement de colonies.
L’Allemagne ne semble pas nier que les colonies sont des crimes de guerre. Mais elle espère bloquer le dossier pour des raisons techniques douteuses, à savoir que malgré le fait que la Palestine ait signé le Statut de Rome, qui a créé le tribunal de La Haye, ce n’est pas encore un État à part entière.
Jusqu’à présent, l’Autriche, la Hongrie, l’Australie et le Brésil semblent leur emboîter le pas.
Mais si la Palestine n’a pas les attributs propres à un État, c’est parce que les États-Unis et l’Europe, y compris l’Allemagne, ont constamment rompu leurs promesses faites aux Palestiniens.
Ils ont non seulement refusé d’intervenir pour sauver la solution à deux États, mais ont récompensé Israël avec des accords commerciaux et des incitations diplomatiques et financières, même si Israël a érodé l’intégrité institutionnelle et territoriale nécessaire à l’autonomie palestinienne.
La position de l’Allemagne, comme celle du reste de l’Europe, est hypocrite. L’UE a revendiqué l’opposition à l’expansion sans fin des colonies israéliennes, et maintenant au plan de Trump, mais ses actions ont ouvert la voie à l’annexion de la Cisjordanie que le plan tolère et légitime.
En novembre dernier, la Cour de justice des Communautés européennes a finalement décidé que les produits fabriqués dans les colonies de Cisjordanie, utilisant des ressources palestiniennes saisies illégalement sur des terres palestiniennes, ne devaient pas être étiquetés de manière trompeuse comme « fabriqués en Israël ».
Et pourtant, les pays européens continuent à reporter la mise en œuvre de la décision. Au lieu de cela, certains d’entre eux légifèrent contre le droit de leurs citoyens à exprimer leur soutien au boycott des colonies.
De même, l’Europe et l’Amérique du Nord continuent d’accorder au Fonds national juif (FNJ), une entité qui finance la construction de colonies, le « statut d’organisme de bienfaisance », lui accordant des allégements fiscaux lorsqu’il lève des fonds dans leurs territoires.
Les médias israéliens regorgent d’histoires sur la manière dont le FNJ aide activement les groupes de colons extrémistes à expulser des Palestiniens de leurs maisons à Jérusalem-Est. Mais la Grande-Bretagne et d’autres pays bloquent les efforts juridiques pour contester le statut spécial du JNF.
Bientôt, semble-t-il, l’Europe n’aura plus à se soucier que son hypocrisie soit si visible. Une fois les colonies annexées, comme le souhaite l’administration Trump, l’UE pourra mettre de côté ses jérémiades inefficaces et traiter les colonies comme irrévocablement israéliennes, tout comme elle l’a fait dans la pratique avec les « quartiers » israéliens de Jérusalem-Est occupée.
Ensuite, la liste de stigmatisation de l’ONU pourra rejoindre les décennies de résolutions condamnatoires qui ont accumulé de la poussière dans le silence.
Liste des 112 entreprises œuvrant dans les colonies illégales répertoriées comme l’ONU (les françaises sont indiquées en rouge, les américano-britanniques en vert et les autres nationalités non-israéliennes en bleu)
Middle East Eye note que « de nombreuses entreprises et banques impliquées, directement ou indirectement, dans des activités commerciales dans ou avec les colonies, ne sont pas encore incluses dans la base de données », souligne le BDS.
« G4S, les compagnies Hewlett Packard, Elbit Systems, Caterpillar, Hyundai Heavy Industries, Volvo, Heidelberg Cement et Cemex font partie des nombreuses autres compagnies de premier plan qui sont irréfutablement impliquées dans l’entreprise de colonisation illégale d’Israël, comme cela a été méticuleusement documenté par des groupes de défense des droits humains, le groupe de recherche israélien WhoProfits et le projet américain de l’American Friends Service Committee [quaker] Investigate. »
Entreprises impliquées dans les activités listées
1 – Afikim Public Transportation Ltd. Israel
2 – Airbnb Inc. United States
3 – American Israeli Gas Corporation Ltd. Israel
4 – Amir Marketing and Investments in Agriculture Ltd. Israel
5 – Amos Hadar Properties and Investments Ltd. Israel
6 – Angel Bakeries Israel
7 – Archivists Ltd. Israel
8 – Ariel Properties Group Israel
9 – Ashtrom Industries Ltd. Israel
10 – Ashtrom Properties Ltd. Israel
11 – Avgol Industries 1953 Ltd. Israel
12 – Bank Hapoalim B.M. Israel
13 – Bank Leumi Le-Israel B.M. Israel
14 – Bank of Jerusalem Ltd. Israel
15 – Beit Haarchiv Ltd. Israel
16 – Bezeq, the Israel Telecommunication Corp Israel
17 – Booking.com B.V. Netherlands
18 – C Mer Industries Ltd. Israel
19 – Café Café Israel Ltd. Israel
20 – Caliber 3 Israel
21 – Cellcom Israel Ltd. Israel
22 – Cherriessa Ltd. Israel
23 – Chish Nofei Israel Ltd. Israel
24 – Citadis Israel Ltd. Israel
25 – Comasco Ltd. Israel
26 – Darban Investments Ltd. Israel
27 – Delek Group Ltd. Israel
28 – Delta Israel Israel
29 – Dor Alon Energy in Israel 1988 Ltd. Israel
30 – Egis Rail France
31 – Egged, Israel Transportation Cooperative Society Ltd. Israel
32 – Energix Renewable Energies Ltd. Israel
33 – EPR Systems Ltd. Israel
34 – Extal Ltd. Israel
35 – Expedia Group Inc. United States
36 – Field Produce Ltd. Israel
37 – Field Produce Marketing Ltd. Israel
38 – First International Bank of Israel Ltd. Israel
39 – Galshan Shvakim Ltd. Israel
40 – General Mills Israel Ltd. Israel
41 – Hadiklaim Israel Date Growers Cooperative Ltd. Israel
42 – Hot Mobile Ltd. Israel
43 – Hot Telecommunications Systems Ltd. Israel
44 – Industrial Buildings Corporation Ltd. Israel
45 – Israel Discount Bank Ltd. Israel
46 – Israel Railways Corporation Ltd. Israel
47 – Italek Ltd. Israel
48 – JC Bamford Excavators Ltd. United Kingdom
49 – Jerusalem Economy Ltd. Israel
50 – Kavim Public Transportation Ltd. Israel
51 – Lipski Installation and Sanitation Ltd. Israel
52 – Matrix IT Ltd. Israel
53 – Mayer Davidov Garages Ltd. Israel
54 – Mekorot Water Company Ltd. Israel
55 – Mercantile Discount Bank Ltd. Israel
56 – Merkavim Transportation Technologies Ltd. Israel
57 – Mizrahi Tefahot Bank Ltd. Israel
58 – Modi’in Ezrachi Group Ltd. Israel
59 – Mordechai Aviv Taasiot Beniyah 1973 Ltd. Israel
60 – Motorola Solutions Israel Ltd. Israel
61 – Municipal Bank Ltd. Israel
62 – Naaman Group Ltd. Israel
63 – Nof Yam Security Ltd. Israel
64 – Ofertex Industries 1997 Ltd. Israel
65 – Opodo Ltd. United Kingdom
66 – Bank Otsar Ha-Hayal Ltd. Israel
67 – Partner Communications Company Ltd. Israel
68 – Paz Oil Company Ltd. Israel
69 – P legas Ltd. Israel
70 – Pelephone Communications Ltd. Israel
71 – Proffimat S.R. Ltd. Israel
72 – Rami Levy Chain Stores Hashikma Marketing 2006 Ltd. Israel
73 – Rami Levy Hashikma Marketing Communication Ltd. Israel
74 – Re/Max Israel Israel
75 – Shalgal Food Ltd. Israel
76 – Shapir Engineering and Industry Ltd. Israel
77 – Shufersal Ltd. Israel
78 – Sonol Israel Ltd. Israel
79 – Superbus Ltd. Israel
80 – Supergum Industries 1969 Ltd. Israel
81 – Tahal Group International B.V. Netherlands
82 – TripAdvisor Inc. United States
83 – Twitoplast Ltd. Israel
84 – Unikowsky Maoz Ltd. Israel
85 – YES Israel
86 – Zakai Agricultural Know-how and inputs Ltd. Israel
87 – ZF Development and Construction Israel
88 – ZMH Hammermand Ltd. Israel
89 – Zorganika Ltd. Israel
90 – Zriha Hlavin Industries Ltd. Israel
Entreprises impliquées en tant que sociétés mères
91 – Alon Blue Square Israel Ltd.Israel
92 – Alstom S.A. France
93 – Altice Europe N.V. Netherlands
94 – Amnon Mesilot Ltd. Israel
95 – Ashtrom Group Ltd. Israel
96 – Booking Holdings Inc. United States
97 – Brand Industries Ltd. Israel
98 – Delta Galil Industries Ltd. Israel
99 – eDreams ODIGEO S.A. Luxembourg
100 – Egis S.A. France
101 – Electra Ltd. Israel
102 – Export Investment Company Ltd. Israel
103 – General Mills Inc. United States
104 – Hadar Group Israel
105 – Hamat Group Ltd. Israel
106 – Indorama Ventures P.C.L. Thailand
107 – Kardan N.V. Netherlands
108 – Mayer’s Cars and Trucks Co. Ltd. Israel
109 – Motorola Solutions Inc. United States
110 – Natoon Group Israel
111 – Villar International Ltd. Israel
Entreprises impliquées en tant que concédants de licence ou franchiseurs
112 Greenkote P.L.C. United KingdomVoir en ligne : l’article également sur le site Le Cri des Peuples