Depuis huit jours, une cinquantaine jeunes mineurs migrants qui « campaient » dans le square Jules Ferry à Paris près de la place de la République ont été transférés dans le gymnase Japy à quelques encablures de là, à l’initiative de la préfecture de police parisienne, soi-disant pour les mettre en sécurité.
En raison des mesures de protection anti Covid-19, ces jeunes sont confrontés à des conditions de vie scandaleuses qui ont déjà été dénoncées par d’autres associations. La canicule aggrave encore ces conditions et s’il ne s’agit pas d’un internement, les mesures de surveillance policières sont fortes.
Nous n’avons pas la mémoire courte et nous nous souvenons que par trois fois, le gymnase Japy fut le lieu d’enfermements des juifs parisiens sous Vichy, ce qu’attestent les nombreuses plaques commémoratives apposées sur les murs du bâtiment : rafle du 14 mai 1941, dite rafle du billet vert, au cours de laquelle, 4232 juifs furent arrêtés par la police française, y furent enfermés avant d’être transférés à Drancy ;. rafle du 20 août 1941, au cours de laquelle, y furent enfermés 3700 juifs parisiens, arrêtés par la police française, avant d’être transférés dans des camps du Loiret ; enfin, au cours des rafles des 16 et 17 juillet 1942 dites Rafle du Vel d’Hiv, un certain nombre de juifs ont été regroupés à nouveau au gymnase Japy avant d’être transférés au Vel d’Hiv. La déportation suivra.
Plus près de nous, en octobre 1961, ce sera au tour des Algériens arrêtés les 16 et 17 octobre. Un certain nombre d’entre eux sera enfermé en ce lieu…
Ce lieu est donc chargé de mémoire, c’est un lieu symbolique du crime d’État depuis Vichy. Et, même si les choses aujourd’hui ne sont pas du même ordre, nous sommes particulièrement vigilants quand de jeunes migrants mineurs, stigmatisés par la xénophobie d’État, par la négrophobie et l’islamophobie, y sont regroupés dans des conditions absolument inacceptables.
Ces jeunes isolés, certains très jeunes, demandeurs d’asile devraient être sous la protection de tous. Au lieu de cela, on les installe dans des conditions de vie et d’hygiène déplorables et de surcroît imposées. C’est une honte !
Les responsables politiques – ministres, préfets, la mairie de Paris et les élus qui partagent ou cautionnent cette indignité, nous montrent – mieux que n’importe quel discours – le degré d’avilissement moral auquel nous sommes confrontés.
Le silence des institutions juives officielles, promptes à évoquer en toutes occasions « le devoir de mémoire » est tout autant criminel. Celui de certains partis de gauche également.
L’UJFP tient à exprimer haut et fort son indignation. Elle appelle les femmes et les hommes de conscience à manifester leur solidarité avec ces jeunes migrants victimes de cette indignité.
À tout faire pour que sortent ces jeunes de ce lieu maudit et pour qu’ils soient pris en charge dignement par les autorités responsables et mis réellement en sécurité.
Honte aux responsables politiques auteurs de cette atteinte aux droits humains élémentaires !
Solidarité avec les jeunes migrants au gymnase Japy !
La Commission Antiracisme politique, pour la Coordination nationale de l’UJFP, le 12 août 2020.