Voici un communiqué de l’association catalane Junts traduit en français
Jamais plus pour personne
JUNTS – Association catalane de juifs et Palestiniens,
IJAN – Réseau juif antisioniste international
et l’Institut de Droits humains de Catalogne,
célébrons la résolution en défense du Droit international humanitaire (DIH) et des Droits humains du peuple palestinien, approuvée avec les voix de BEC, ERC, PSC et la CUP, et l’abstention de Convergencia, à la Commission de Présidence, Droits de Citoyenneté, Participation, Sécurité et Prévention de la municipalité de Barcelone, le 19 avril dernier.
Il s’agit d’un premier pas dans la défense des Droits humains et du Droit international humanitaire et en particulier dans son application au niveau global, car il contribue à ce que les violations de ces droits par les États, les institutions ou les entreprises, n’importe où dans le monde, puissent être prises en compte dans les mécanismes d’achats publics et des contrats réalisés par la municipalité. Ainsi, Barcelone cessera d’être complice des atteintes aux droits humains et au droit international humanitaire.
La motion recueille la préoccupation générée par la violation continue de ces droits par l’État d’Israël en Palestine, par ses institutions et ses entreprises, mais aussi par toute entreprise qui soit directement liée à ces atteintes, que ce soit en Palestine ou ailleurs dans le monde.
Elle reconnaît aussi la légitimité d’initiatives et de campagnes non-violentes promues par la société civile palestinienne et internationale pour revendiquer la défense des droits humains et du droit humain international en Palestine, et reste ferme et engagée dans la protection de la liberté d’expression et la liberté d’association.
Les organisations signataires :
Voient avec préoccupation la nouvelle apparue dans le journal La Vanguardia le 26 avril qui affirme que la « communauté juive voit dans cette résolution un puits d’antisémitisme ».
Nous souhaitons d’abord dire qu’il n’existe pas une communauté juive unique, mais une diversité de communautés. Judaïsme et identité juive couvrent une variété d’expressions religieuses et séculaires et un ensemble robuste et varié de traditions, de cultures et d’expériences vécues. En ce sens, les collectifs auxquels cet article prête sa voix sont des communautés religieuses spécifiques et ne recueillent pas l’opinion de citoyens et citoyennes juives non-inscrits. Les communautés d’IJAN et de JUNTS représentent une autre opinion et nous présentons ce manifeste en soutien à la motion approuvée par la mairie de Barcelone, car nous ne nous sentons pas représentés par les communautés précédemment mentionnées, ni par leurs déclarations.
De plus, la pratique consistant à appliquer l’étiquette « d’antisémitisme » à n’importe quelle critique de la politique sioniste de l’État d’Israël, nous préoccupe, car elle débouche sur la banalisation de l’antisémitisme, trouble sa compréhension, fait qu’il soit plus difficile de le combattre, et elle donc est néfaste. L’antisémitisme doit être poursuivi, comme toute autre forme de racisme.
Nous entendons par antisémitisme la discrimination, la violence ou les préjugés envers les personnes juives du fait qu’elles sont juives, qui se sont manifestées à travers l’histoire dans des inégalités structurelles, par des expulsions et par le génocide, dont le plus grave est le génocide nazi en Europe.
D’autre part, les Israéliens sont des citoyens de l’État d’Israël, majoritairement juifs, séculiers ou religieux. Il existe chez eux une variété de positions dans le domaine politique, parmi lesquelles l’antisionisme, ainsi qu’en ce qui concerne l’identité et les pratiques religieuses.
L’État d’Israël a pour fondement idéologique le sionisme, idéologie basée sur un nationalisme exclusif, dans le contexte de l’essor des nationalismes européens. Le sionisme est un colonialisme de peuplement, parrainé et encouragé par les puissances coloniales de l’époque, son acte fondateur étant l’expulsion par la force de la moitié de la population palestinienne en 1947, 750 000 personnes dont les descendants continuent à vivre en exil ou ailleurs dans le pays. L’État utilise d’innombrables lois complètement discriminatoires envers la population non juive, palestinienne en majorité, ce qui constitue d’évidence un exemple de ségrégation ou apartheid selon le terme utilisé dans l’ancienne Afrique du Sud.
C’est pourquoi les membres juifs de JUNTS, IJAN et d’autres collectifs s’opposent au sionisme, car il est le fondement des politiques racistes et colonialistes de l’État d’Israël, et par conséquent, être antisioniste c’est être antiraciste. Critiquer Israël est un droit démocratique au même titre que critiquer n’importe quel autre état.
Lutter contre l’antisémitisme, c’est aussi dénoncer la manière dont les définitions imprécises ou frauduleuses de l’antisémitisme ont un impact néfaste sur les mouvements pour la justice. Ces définitions arbitraires et superficielles sont souvent utilisées pour défendre les politiques israéliennes et insérées dans l’élaboration de discours islamophobes à l’échelle globale.
La campagne de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS), est une campagne antiraciste et non violente initiée par la société civile palestinienne en 2005 et qui demande que s’appliquent le Boycott, les Désinvestissements et les Sanctions à l’État d’Israël et à ses institutions, ainsi qu’aux entreprises qui profitent de l’occupation et de la colonisation de la Palestine. C’est un appel à la solidarité internationale de la société civile et elle demande son application jusqu’à ce que les trois revendications basées sur la légalité internationale soient respectées : la dévolution des terres occupées jusqu’en 1967 et la destruction du mur, le droit au retour des refugiés, et l’égalité des droits pour la population palestinienne vivant dans les frontières actuelles de l’État d’Israël. Le BDS est un outil de lutte non violente qui compte avec notre soutien et notre participation active.
Accuser d’antisémitisme ceux qui défendent le respect des droits humains banalise les véritables manifestations d’antisémitisme qui, tenant compte de l’essor des partis politiques et mouvements d’extrême-droite tant en Europe qu’aux Etats-Unis, nous appelle à être vigilants par rapport à ces orientations.
Pour toutes ces raisons, les organisations signataires refusent d’être complices de l’instrumentalisation que fait Israël de certaines communautés juives dans le monde pour justifier ses politiques de colonisation systématique et d’occupation illégale.
Comme l’affirme Jewish Voice for Peace[note]Jewish Voice for Peace est une communauté juive des États-Unis constituée par des milliers de personnes, qui défend un projet d’égalité des droits entre juifs et Palestiniens.]] « Jamais plus pour personne » signifie être pour toute l’humanité. Jamais plus pour personne veut dire que nous nous inspirons de nos histoires et restons fermes contre toutes les discriminations.
C’est pourquoi nous appelons à rester unis dans la défense des droits humains et du droit international humanitaire, comme un des mécanismes nécessaires pour la décolonisation de la Palestine et pour permettre que se développent des sociétés libres en Palestine et dans le monde entier.