Aux origines du sionisme et du colonialisme

Article publié dans le journal l’Humanité du 3 juin 2013 à la rubrique « Histoire » , page 23 :

Ni traître, ni complice : c’est pour réaffirmer cette position que Pierre Stambul, militant juif anti-sioniste, membre de l’Union Juive Française pour la Paix, publie ce livre.

Israël/Palestine

Du refus d’être complice à l’engagement

de Pierre Stambul

Éditions Acratie, 600 pages

25 euros

Comment un juif français devient-il pro-palestinien et anti-sioniste ?
C’est ce cheminement que l’auteur nous raconte. Cheminement qui s’inscrit dans l’engagement de ses parents, communistes engagés dans la résistance(son père est membre du groupe Manouchian) déportés par les nazis, échappant par miracle à la mort. Depuis une trentaine d’années, Pierre Stambul a écrit de nombreux articles, interventions et contributions diverses pour défendre l’idée d’un Etat palestinien. C’est une compilation de tout ce travail de réflexion et d’analyse qu’il nous livre dans cet ouvrage dense, riche de questions historiques et pourtant bien contemporaines : le sionisme, l’antisémitisme, la Bible, l’islamophobie… De ses débuts dans les kibboutz israéliens jusqu’à l’engagement pro-palestinien, l’auteur témoigne d’un itinéraire très personnel qui, croisant l’Histoire prend un relief passionnant. La rupture avec le sionisme ne s’est pourtant pas faite sans hésitation. Mais, dit-il, « c’est en tant que Juif que je me sens totalement du côté des Palestiniens ».

Dans ce livre il analyse et explicite deux concepts qui résument la nature de l’Etat d’Israël : le sionisme et le colonialisme.

Il décrit la genèse de l’idéologie et du mouvement sioniste dans les débats qui traversent le XIXème siècle en Europe sur la question juive jusqu’à la création d’un Etat juif. Il analyse la nature de ce mouvement nationaliste dans l’esprit de son temps autour des grandes idées de la seconde moitié du XIXème siècle : l’Etat-nation et le colonialisme.
Le deuxième concept qui caractérise la nature de l’Etat d’Israël est celui du colonialisme..
Au XIXème le colonialisme est perçu comme un phénomène positif, porteur de civilisation et de progrès.
Pour les nations européennes au lendemain de la guerre, installer des Juifs européens au Proche Orient permet de régler deux problèmes : celui de l’antisémitisme et celui du développement civilisationnel de cette région du monde, présentée comme une « terre sans peuple pour un peuple sans terre ».
L’Etat d’Israël est un ensemble d’institutions, de structures, de lois et de pratiques dont le but est de pérenniser et de renforcer le caractère juif de l’Etat et de défendre les privilèges de sa population juive.
Quelles perspectives peut-on alors envisager pour résoudre le conflit ?

Pour Pierre Stambul, il s’agit de mettre fin à un système de domination coloniale, à un régime d’apartheid. En clair déconstruire le colonialisme. Mais aussi dénoncer la manipulation de l’histoire et de la mémoire juive par les autorités israéliennes. Etre anticolonialiste aujourd’hui dans ce contexte, c’est être anti-sioniste.

Keltoum Staali