15 Août 2022
Injustice, oppression, arbitraire, persécution et coercition sont autant de termes qui peuvent s’appliquer à ce que vit le peuple palestinien depuis un siècle, depuis que la Société des Nations a imposé le mandat britannique – qui avait tout du colonialisme sauf le nom – à la Palestine.
Le mandat de la Société des Nations pour la Palestine a été approuvé et mis en œuvre en 1922. Il s’agissait d’un projet visant à s’approprier et à prendre le contrôle de la Palestine afin de mettre en œuvre la tristement célèbre déclaration Balfour de 1917 au nom du mouvement sioniste, dans le but d’établir un « foyer national pour le peuple juif ».
L’article 2 du Mandat pour la Palestine stipulait : « Le mandataire [la Grande-Bretagne] sera chargé de placer le pays dans des conditions politiques, administratives et économiques qui garantiront l’établissement du foyer national juif, tel que décrit dans le préambule, et le développement d’institutions autonomes, ainsi que de sauvegarder les droits civils et religieux de tous les habitants de la Palestine, indépendamment de leur race et de leur religion. »
L’article 7 du même document stipulait : « L’Administration de la Palestine sera chargée de promulguer une loi sur la nationalité. Cette loi comprendra des dispositions visant à faciliter l’acquisition de la citoyenneté palestinienne par les Juifs qui établissent leur résidence permanente en Palestine. »
Depuis lors, le peuple palestinien a été victime de tous les crimes possibles et imaginables, y compris de crimes de guerre, commis d’abord par les bandes terroristes sionistes, puis par les forces de « défense » israéliennes et les colons, y compris des massacres, comme ceux de Deir Yassin, Kafr Qassem et Al-Tantora.
Le nettoyage ethnique a transformé 70 % de la population palestinienne en réfugiés, dont le nombre s’élève aujourd’hui à sept millions ; ils sont victimes des crimes de l’occupation et de la discrimination raciale – l’apartheid – et de toutes sortes de violations des droits de l’homme.
Le nombre de martyrs palestiniens depuis 1948 est d’au moins 100 000, tandis que plus d’un million de Palestiniens sont passés par les prisons israéliennes.
Selon le célèbre historien israélien antisioniste Ilan Pappe, une partie de la Palestine, la bande de Gaza, est devenue, depuis 2006, la plus grande prison de l’histoire de l’humanité, dans laquelle plus de deux millions de Palestiniens sont assiégés parterre, ciel et mer.
Ils sont privés d’eau, d’électricité et de toute possibilité de vivre décemment, et 80 % des diplômés sont au chômage.
Chaque jour qui passe, l’occupation sème la pauvreté, la maladie, la dépression et les catastrophes parmi les Palestiniens. Il y a 642 points de contrôle militaires israéliens dans la Cisjordanie occupée, qui a été divisée et fragmentée par les colonies illégales et le mur d’apartheid en 224 îlots ou bantoustans ; ou, plus exactement, en « ghettostans ».
En raison de ces points de contrôle, les Palestiniens perdent 60 millions d’heures de travail chaque année, pour un coût estimé à 234 millions de dollars, à quoi s’ajoutent les 135 millions de dollars de dépenses supplémentaires en carburant causés par les longues attentes aux checkpoints.
Des millions de Palestiniens ne sont pas autorisés à se déplacer entre Gaza et la Cisjordanie ni à se rendre dans le reste de la Palestine, y compris Jérusalem, et des millions d’autres sont interdits de voyages à l’étranger, même pour le traitement de maladies mortelles.
Des centaines de milliers de personnes ne peuvent pas voir leurs proches et leur famille tous les jours et des centaines de mères n’ont pas vu leurs enfants depuis des décennies.
Il y a des maris qui ne peuvent pas vivre avec leur femme, des enfants séparés de leur famille, et des enfants qui n’ont jamais rencontré leurs grands-parents, leurs oncles, leurs tantes et parfois même leurs frères et sœurs.
Sous les régimes d’apartheid de l’occupation et de l’Autorité palestinienne la vie des Palestiniens est un enfer de tous les instants. Ils ne peuvent pas travailler, se nourrir, s’habiller, se soigner, se déplacer librement, ni bien sûr défendre leurs droits en prison.
Il n’y a pas d’endroit au monde comme la Palestine occupée, où le meurtre de Palestiniens, y compris de journalistes, de médecins, d’infirmières et d’enfants, est un événement presque quotidien, sans que les assassins n’aient à rendre de compte, ni même ne soient blâmés.
Il n’existe aucun endroit au monde comme la Palestine occupée, où les victimes sont considérées comme des criminels, où leur résistance légitime est appelée « terrorisme » et où leurs sacrifices sont qualifiés de violences.
Existe-t-il une forme d’oppression plus horrible que celle qui consiste à traiter de « terroristes » ceux qui se battent pour défendre leur terre et leurs enfants, et à punir leurs familles en démolissant leurs maisons quand ils sont assassinés ou arrêtés ?
Je me souviens du tollé qu’il y a eu aux États-Unis et en Occident quand le Juif russe le sioniste Natan Sharansky a été interdit de voyage. Mais on n’entend aucune protestation quand des millions de Palestiniens sont emprisonnés dans leurs villages et leurs villes ou menacés d’expulsion.
De plus, si une personne a le courage et l’honnêteté de protester contre l’oppression qu’ils subissent, il est accusé d’être antisémite. Si cette personne se trouve être juive, on l’accuse de trahir le sionisme et de souffrir de « haine de soi » ou même de maladie mentale.
Non seulement les Palestiniens se sont vu voler leurs terres et une grande partie de leur patrie, mais les Israéliens leur volent aussi chaque jour leurs objets d’art anciens, leur patrimoine, leurs vêtements, leur nourriture traditionnelle et les noms de leurs villes et villages.
La Palestine occupée est le seul endroit au monde où il règne un racisme tel, que des routes sont réservées aux Juifs israéliens et que les Palestiniens sont punis s’ils y marchent ou roulent par une peine de prison de six mois ou plus.
Il existe toutes sortes d’injustices causées par le colonialisme, l’oppression coloniale, l’exploitation capitaliste brutale et le fanatisme nationaliste, dans de nombreuses régions du monde, mais il n’y a rien de comparable à l’injustice systématique, planifiée, organisée et perpétuelle que les Israéliens font subir aux Palestiniens.
Les mots me manquent pour décrire la bravoure sans précédent dont font preuve les Palestiniens face à cette injustice. On se souvient d’ailleurs que le plus féroce et le plus fanatique des fondateurs du sionisme, Ze’ev Jabotinsky, disait que le peuple palestinien est déterminé et attaché à sa patrie, et qu’il ne peut être brisé et vaincu qu’en répandant le désespoir et la frustration dans ses rangs.
Aujourd’hui, les Israéliens tentent de semer le désespoir et la frustration en prétendant isoler le peuple palestinien avec l’humiliante normalisation de leurs relations avec les gouvernements arabes, et ils s’efforcent de faire croire au monde que les Palestiniens sont abandonnés et ostracisés par les leurs. Cela me rappelle le dicton bien connu : « L’injustice de ceux qui sont les plus proches de nous est la plus dure à supporter. »
Cependant, les Palestiniens ont surpris Israël et le monde entier par leur détermination à persévérer dans la résistance. Ils rappellent chaque jour à l’Occident son double langage, ainsi que l’hypocrisie de son discours sur les droits de l’homme, qui se manifeste par son refus d’exercer la moindre pression sur Israël, qui viole pourtant les droits de l’homme à tous les niveaux.
L’attitude de l’Occident rappelle les paroles de l’auteur syrien Abd Al-Rahman Al-Kawakibi : « Si l’oppresseur voyait une épée dans les mains de l’opprimé, il n’oserait pas l’opprimer”. Et les mots éloquents du Dr Martin Luther King Jr, au plus fort de sa lutte contre le racisme : « La plus grande tragédie n’est pas l’oppression et la cruauté des méchants, mais le silence des gens de bien. »
Contrairement au souhait des dirigeants du mouvement sioniste, les jeunes générations palestiniennes ne sont pas frustrées ou désespérées ; elles sont plus conscientes que les générations passées et rejettent les stratagèmes et les mensonges qui ont servi à tromper le monde entier et à déformer la conscience des Palestiniens, à savoir les soi-disant « accords de paix », de « normalisation » et de « paix économique ».
La foi des jeunes générations s’est approfondie et intensifiée car, comme dit d’Ali Bin Abi Talib : « Le règne de l’oppression est éphémère, mais le règne de la vérité n’a pas de fin ».
10 août 2022 – Middle East Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – Dominique Muselet