En cette fin d’année 2018, quand on fait le bilan de tout ce qu’a fait la France en tant qu’État à propos de la Palestine et d’Israël, on ne peut qu’être consterné.
Salah Hamouri, citoyen français, a passé plus d’un an en prison en Israël sans procès. Aucune protestation publique. Au contraire, pendant cette détention, le président Macron a donné plusieurs fois l’accolade à son « cher Bibi ».
Pas plus de réaction face aux arrestations massives d’enfants, à la détention d’Ahed Tamimi ou de la députée Khalida Jarrar qui est en prison sans jugement depuis juillet 2017.
Depuis le 30 mars 2018, l’armée israélienne assassine comme dans un stand de tir des manifestant-e-s désarmé-e-s dans la bande de Gaza. Il y a à ce jour 230 mort-e-s et des milliers d’estropié-e-s, victimes des balles explosives, armes formellement interdites. Pas un mot de la France contre ce carnage prémédité. Ce silence permet que le crime continue et se renouvelle régulièrement chaque vendredi.
En juin le gouvernement français a maintenu l’inauguration de la saison croisée France-Israël, en dépit des exactions de l’armée israélienne dans la bande de Gaza.
En juillet-août, la flottille de la liberté part pour briser le blocus de Gaza qu’officiellement la France désapprouve. À Paris, la police fluviale empêche deux de ses bateaux d’accoster. Quand la marine de guerre israélienne attaque violemment en eaux internationales la flottille, la France se tait sur cet acte de piraterie alors qu’il y a deux Français-e-s à bord. Interpellée à la Chambre des Députés, la ministre Nathalie Loiseau reprendra la version israélienne affirmant que les médicaments transportés par la flottille seront acheminés à Gaza. C’est faux. Quatre mois plus tard, ils ne sont toujours pas arrivés.
Le 11 novembre, l’armée israélienne franchit sa propre « barrière de sécurité » et attaque à l’est de Khan Younès dans la bande de Gaza. Elle assassine plusieurs combattants de différents groupes. Un officier israélien est tué dans les combats. Plusieurs roquettes sont lancées, en riposte à cette agression, sur Israël. Réaction de la France ? Le président Macron téléphone à son ami Nétanyahou pour « fermement condamner les tirs de roquettes par le Hamas sur Israël » sans même parler de l’attaque israélienne. Dans la foulée la France vote à l’ONU une résolution états-unienne (qui n’a heureusement pas eu la majorité qualifiée) condamnant le Hamas et faisant silence sur le blocus et les attaques meurtrières d’Israël.
Enfin, le Conseil Européen (et avec lui la France) vient de reprendre la définition de l’antisémitisme rédigée par l’IHRA (International Holocaust Remembrance Alliance). Si certains aspects caricaturaux de cette définition (comme le fait d’assimiler la critique d’Israël à de l’antisémitisme) ont été supprimés, cette définition reprend l’amalgame manipulatoire classique entre antisionisme et antisémitisme. Cette déclaration a bien sûr pour but de criminaliser l’indispensable BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions).
Israël/Palestine n’est pas un accroc isolé dans la diplomatie française. Notre pays est aussi un des principaux marchands d’armes dans le monde. Un de ses principaux clients est l’Arabie Saoudite alors que plus personne ne peut ignorer que le régime en place dans ce pays commet des meurtres délibérés contre ses opposants et contre le peuple yéménite.
Ce n’est pas parce qu’il est mal informé que le gouvernement français agit ainsi. Tous les jours, il reçoit de ses propres diplomates, des informations détaillées sur les arrestations d’enfants, les tortures, les maisons et les écoles détruites, le vol de la terre et de l’eau en Palestine. Ce n’est pas par compassion pour les Juifs que ce gouvernement est complice de la politique israélienne : au contraire, la politique israélienne et cette complicité indigne et délibérée de la France mettent les Juifs ici et là-bas en danger.
Israël est aujourd’hui le laboratoire de l’enfermement et de la répression contre les populations jugées dangereuses ; c’est le pays des technologies de pointes et des armes sophistiquées. C’est l’exemple d’une conquête coloniale. C’est aussi un modèle pour l’atteinte aux libertés démocratiques et aux droits humains. C’est pour cela qu’il jouit de la complicité internationale et de l’impunité.
En Israël, la destruction de la société palestinienne est devenue « normale ». En France, notre gouvernement bafoue quotidiennement le droit en traquant comme il le fait les migrant-e-s et en généralisant arrestations arbitraires et répression violente.
L’Union Juive Française pour la Paix interpelle le gouvernement français.
Changez radicalement de politique !
Cessez de vous taire devant les crimes de guerre réitérés !
Cessez de légitimer par vos actes l’occupation, la colonisation et la destruction de la société palestinienne !
Quittez le camp du colonisateur, rejoignez celui qui aurait dû toujours être celui de la France : le camp du « vivre ensemble », le camp du droit, le camp de la dignité, de l’égalité et de la justice.
Le Bureau national de l’UJFP, le 11 décembre 2018