Un nouveau consensus est né

« La majorité absolue des Israéliens ne veut pas d’une paix juste avec les Palestiniens, ne considère pas que ceux-ci ont droit à un État à eux et ne les voient en fait pas comme des égaux. Voilà comment nous sommes et voilà à quoi ressemble notre aspiration à la paix. » Ainsi résume Gideon Lévy, journaliste israélien, dans les pages du quotidien Ha’aretz le 19 mars.

Avant même le déroulement des élections législatives, Lévy a bien identifié ce qui est convenu d’appeler un nouveau consensus en Israël, favorable à l’annexion des « blocs de localités », nom pudique pour décrire les grosses colonies en Cisjordanie. Devant cette tendance dans l’opinion de plus en plus avérée, le journaliste ironise : « Pendant que les commentateurs et les sondages d’opinion pointent un supposé glissement à gauche, avec une majorité favorable à la création d’un État palestinien et à l’évacuation des colonies, la vraie carte politique s’est déplacée à droite, et radicalement. Les programmes des trois grands partis, Likoud, Kadima, et Parti Travailliste – censés représenter la droite, le centre et la gauche – s’unissent en un parfait accord sur la conservation par Israël des grandes colonies. Même le Plan de Genève, tenu pour ‘radical’, maintient Ma’ale Adoumim dans les frontières d’Israël. On se lève un beau jour en découvrant autour de soi un nouveau consensus : on ne voit pas au juste clairement comment s’est cristallisé ce consensus de droite. Auparavant, le consensus portait sur Jérusalem ; maintenant sur la moitié de la Cisjordanie. Et on appelle encore ça un ‘glissement à gauche’. » Lévy clame sans détour : « Ce masque trompeur doit être démoli : la société israélienne dit en réalité un grand ‘non’ à tout espoir de paix, à un accord juste et à la création d’un État palestinien… Les blocs de colonisation mettront en échec tout espoir de ce genre : une Cisjordanie dépecée ne sera jamais un État palestinien indépendant. C’est précisément à cette fin que les ‘blocs de localités’ ont été créés. » S’adressant aux lecteurs israéliens, le journaliste conclue : « Celui qui prétend avec passion que la vision du Grand Israël céderait au profit du ‘partage du pays’, de même que celui qui parle pompeusement de la conscience qu’aurait la société israélienne de la nécessité de mettre fin à l’occupation trompent à la fois cette société et le monde entier. La vérité est infiniment plus amère : le discours public en Israël continue d’entretenir l’aspiration nationale la mieux enracinée ici : avoir le beurre et l’argent du beurre. » Pour le texte complet de l’article, voir le fichier attaché . Traduit de l’hébreu par Michel Ghys.