Union juive française pour la paix

Témoignage d’Abu Amir, le 6 septembre 2025 – Ateliers de soutien psychologique, une nécessité vitale

Abu Amir 4 9 25 Ateliers psy WhatsApp Image 2025 09 03 at 8.49.16 PM Témoignage d’Abu Amir, le 6 septembre 2025 – Ateliers de soutien psychologique, une nécessité vitale

Dans le camp d’Isra, au cœur de la ville de Gaza, où les tentes s’entassent les unes sur les autres dans une scène qui résume la souffrance du déplacement, les femmes vivent un long chapitre de douleur et d’attente. Dans ce lieu saturé par les blessures de la guerre, trente femmes déplacées portent sur leurs épaules des histoires alourdies par la peur, la perte et la privation des besoins les plus élémentaires de la vie. Les tentes étroites ne leur offrent aucune intimité, et les parois délabrées ne les protègent ni des regards indiscrets ni des lourdeurs de la nuit. Beaucoup d’entre elles ont perdu leur maison, d’autres un être cher ou leur source de revenu. Mais ce qui les unit toutes, c’est un profond sentiment d’exil et d’abandon. C’est dans cette atmosphère sombre que s’est tenu un atelier psychologique, semblable à un mince rayon de lumière au milieu de l’obscurité du camp.

L’équipe UJFP a organisé un atelier intitulé « Guérison et renouveau : soutien psychologique pour les femmes dans le camp de déplacement », avec la participation de trente femmes de différents âges et horizons. Le but n’était pas seulement de tenir une simple séance thérapeutique, mais de créer un espace sûr dans ce lieu surpeuplé, où les femmes pouvaient respirer librement, à l’abri des regards et du vacarme du camp. L’atelier fut semblable à une oasis au milieu d’un désert de souffrance, offrant aux participantes une rare opportunité d’exprimer leurs émotions, de se libérer d’une partie de leur fardeau intérieur et de créer de nouveaux liens humains avec d’autres femmes vivant la même expérience.

L’atelier a commencé par une activité symbolique émouvante appelée « Le panier de mes émotions ». Un petit panier fut placé au centre de la salle, et chaque femme devait écrire sur un papier plié un sentiment pesant sur son cœur, puis le déposer dans le panier. Un profond silence a régné un instant, comme si les femmes faisaient face à leur propre cœur pour la première fois depuis longtemps. L’une d’elles écrivit le mot peur, et en le déposant dans le panier, elle dit d’une voix éraillée : « C’est comme si je le sortais de mon cœur. » Une autre écrivit solitude, puis sourit en disant : « Aujourd’hui, j’ai compris que je ne suis pas seule. » Le panier s’est transformé en un lieu sacré où déposer le fardeau, permettant au cœur d’en ressortir plus léger et plus apte à accueillir la vie.

Après ce moment de libération émotionnelle, vint l’activité « Histoires de résilience venues de nos cœurs ». Les femmes se sont assises en cercle, dans un espace sûr, et ont commencé à partager leurs expériences, mélange de douleur et de force. Une femme ayant perdu sa maison parla les yeux embués de larmes : « Quand ma maison a été détruite, j’ai cru que ma vie s’achevait. Mais en écoutant vos histoires, j’ai compris que la ruine ne tue pas l’âme. »

Une jeune fille d’à peine vingt ans se leva et dit avec assurance : « Je suis forte parce que j’aide ma mère et je souris malgré tout. » Les mots n’étaient plus de simples sons, mais des ponts tendus entre les cœurs, reliant trente femmes entre elles et affirmant que la force naît du partage et de la confidence.

Les participantes sont ensuite passées à une autre activité intitulée « Fenêtre sur l’espoir », où il leur fut demandé de dessiner un symbole qui leur donnait un sentiment d’optimisme. L’objectif n’était pas artistique, mais d’ouvrir une fenêtre sur la lumière qui subsistait en elles. L’une d’elles dessina un arbre majestueux, rappelant son jardin détruit. Une autre dessina une porte ouverte comme symbole du rêve du retour. Une troisième se contenta d’un soleil radieux et dit avec un sourire hésitant : « Je veux croire que demain pourrait être lumineux. » Les feuilles blanches se transformèrent en tableaux remplis de vie et de couleurs, prouvant que l’espoir trouve toujours son chemin, même dans les cœurs les plus épuisés.

Vint ensuite l’exercice méditatif « Je respire », durant lequel les femmes, assises en cercle, furent guidées dans une pratique de respiration profonde. Pour la première fois depuis des mois, elles sentirent l’air pénétrer pleinement leur poitrine, longtemps oppressée par la tension. L’une d’elles dit à la fin : « J’avais l’impression que ma poitrine était fermée ; aujourd’hui, je l’ai ouverte grâce à l’air. » Une autre garda longtemps les yeux fermés après l’exercice, et lorsqu’elle les rouvrit, un éclat brillait dans son regard, comme si elle avait retrouvé une part d’elle-même. Ces quelques minutes furent une renaissance insufflée dans leurs poumons.

Le voyage ne pouvait s’achever sans passer par le port de la musique. Les lumières furent tamisées, et une douce mélodie se répandit dans la salle telle une brise légère. Les femmes s’assirent en silence ; certaines fermèrent les yeux, d’autres laissèrent échapper un timide sourire, disparu depuis longtemps de leurs visages. Une jeune fille dit ensuite : « Ce moment m’a fait oublier que j’étais dans un camp, j’avais l’impression d’être de retour dans ma vieille chambre. » La musique fut plus que de simples notes : elle invoqua des souvenirs de sécurité et de sérénité, depuis trop longtemps absents.

Au fil de l’atelier, il devint évident que ces femmes souffraient d’une répression psychologique intense due à la vie dans un espace surpeuplé, dépourvu d’intimité. Le camp ne leur offrait aucune marge pour se libérer, pas même un moment pour pleurer ou méditer en solitude. Ce manque a fait s’accumuler les émotions jusqu’à devenir un fardeau étouffant. Beaucoup exprimèrent leur besoin d’un temps personnel, ne serait-ce que quelques minutes par jour, pour évacuer cette pression intérieure. L’atelier leur offrit cet espace, même temporaire, mais suffisant pour leur rappeler leur droit à un temps personnel et à s’exprimer sans peur.

Les femmes quittèrent l’atelier en portant avec elles quelque chose de nouveau, absent à leur arrivée : un sentiment d’appartenance et la certitude qu’elles ne sont pas seules dans ce monde brutal. Une participante dit : « Je me sens plus légère, comme si j’avais déposé un poids de mes épaules. » Une autre, parlant du dessin, affirma que les couleurs lui avaient redonné la capacité d’imaginer un avenir meilleur. Une jeune fille décrivit l’atelier comme « un cadeau pour le cœur », car il lui fit voir sa force dans de petits détails qu’elle n’avait jamais remarqués auparavant. Les larmes versées devinrent une eau purifiant les âmes, et les timides rires, des graines d’espoir nouvelles, lentes à pousser mais solides.

Cette expérience a prouvé que le soutien psychologique pour les femmes déplacées n’est pas un luxe, mais une nécessité vitale pour reconstruire l’être humain après la catastrophe. L’atelier fut un message puissant, affirmant que la guérison est possible, que le traumatisme peut se transformer en force et que l’espoir peut germer même dans les terres les plus arides. Ces ateliers ne sont pas de simples rencontres passagères, mais de véritables projets de sauvetage de l’âme, de la mémoire et de la dignité. Ils redonnent à la femme déplacée sa voix, ses petits rêves et la conviction qu’un lendemain, aussi lointain soit-il, pourra porter une nouvelle lumière.

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