Témoignage d’Abu Amir, le 30 juillet 2025 – Un tsunami politique frappe l’État d’occupation : un moment charnière dans l’histoire politique internationale

Sommet du groupe de la Haye a Bogota Témoignage d'Abu Amir, le 30 juillet 2025 - Un tsunami politique frappe l’État d’occupation : un moment charnière dans l’histoire politique internationale
Le sommet du Groupe de La Haye s’est tenu à Bogota, en Colombie, le 15 et 16 juillet 2025 – Photo : via X

Au cœur d’une tempête de mutations internationales et de fractures régionales, le sionisme traverse l’un des chapitres les plus critiques et les plus reculés de son histoire politique depuis sa création. Il ne s’agit plus simplement de critiques médiatiques ou d’appels à l’arrêt de la guerre, mais bien d’un véritable tsunami politique qui secoue les fondations du système politique israélien et affaiblit son crédit sur la scène internationale de manière sans précédent.

D’un côté, on assiste à une accélération notable des reconnaissances internationales de l’État palestinien, non seulement de la part des pays du Sud global, mais aussi depuis le cœur même des capitales occidentales, qui ont longtemps constitué un parapluie diplomatique et moral pour Israël. Ce basculement ne sort pas de nulle part : il est la conséquence directe des scènes de destruction et de souffrance que Gaza diffuse chaque jour, traversant la conscience mondiale sans permission, avec les images de femmes égorgées, d’enfants déplacés, de vieillards mourant de faim et de chagrin. Ces images ont brisé le récit de l’occupant et réduit considérablement l’impact du « 7 octobre », un événement que Netanyahou utilisait jusqu’alors comme arme de chantage auprès de l’Occident pour justifier ses crimes.

Alors que les critiques se multiplient dans les cercles de décision occidentaux à l’encontre des pratiques de l’occupation, Netanyahou apparaît de plus en plus désorienté, incapable de maîtriser les ficelles du jeu politique, tiraillé entre la pression de ses alliés d’extrême droite comme Smotrich et Ben Gvir, une armée embourbée dans une guerre sans issue, et une opinion publique israélienne qui commence à prendre conscience que l’État se dirige vers un gouffre diplomatique et sécuritaire sans précédent.

Netanyahou comprend mieux que jamais que la crise internationale à laquelle Israël fait face est en grande partie liée à son image personnelle dégradée, ainsi qu’à celle de ses partenaires représentant le pire du racisme, du repli religieux et de l’extrémisme politique. L’absence de toute vision politique pour “le jour d’après” ou d’un projet crédible pour l’après-guerre transforme le gouvernement de l’occupation en une simple machine de destruction – et c’est précisément ce qui pousse la communauté internationale à s’en éloigner, voire à chercher à le tenir pour responsable dans certaines enceintes.

Mais le vrai dilemme de Netanyahou, c’est qu’il ne peut pas se permettre d’organiser des élections anticipées, car cela signerait sa fin politique. Dans le même temps, poursuivre la guerre et l’élargir aggraverait les divisions internes et continuerait d’éroder l’image d’Israël à l’extérieur. Entre le feu intérieur et la glace extérieure, Netanyahou reste paralysé, ne pouvant que répéter des discours creux qui ne convainquent même plus ses partisans.

Le tableau se complique davantage avec les discussions croissantes sur de nouvelles annexions et des objectifs militaires expansionnistes dans la bande de Gaza, accentuant la rupture entre Israël et de nombreux pays du monde. Cette situation place l’armée israélienne elle-même en confrontation avec la communauté internationale, et même avec une large partie de la société israélienne qui commence à considérer que le projet de l’occupation est devenu un fardeau pour l’avenir et la stabilité de l’État.

De l’autre côté, le dilemme n’est pas moins complexe pour le mouvement Hamas. La majorité des États appelant aujourd’hui à un cessez-le-feu et reconnaissant l’État palestinien ne le considèrent pas comme un partenaire politique fiable. Ils le perçoivent comme une partie du problème et non de la solution. Cette évaluation politique, même si elle peut paraître injuste du point de vue de la résistance, reflète pourtant la réalité de l’état d’esprit international actuel, qu’il convient de lire avec lucidité et responsabilité.

L’un des acteurs les plus importants reste Donald Trump. Malgré ses liens étroits passés avec Netanyahou, il comprend que le climat mondial évolue et qu’il ne peut pas s’opposer à toutes les nations du monde pour défendre les ambitions de Smotrich ou les illusions de Netanyahou. Fidèle à son pragmatisme bien connu, Trump pèse les choses selon les gains potentiels, et il pourrait se montrer ouvert à tout règlement protégeant les intérêts américains, même si cela implique d’abandonner certains alliés.

Nous sommes face à un moment politique rare, né du sang des victimes, des gémissements des affamés, des douleurs des vieillards, des femmes et des enfants à Gaza. Ce moment n’est pas un cadeau du monde, mais le fruit d’un long combat, de souffrances continues, forgé par d’immenses sacrifices qui n’ont jamais cessé. C’est pourquoi l’Autorité palestinienne et le mouvement Hamas doivent comprendre que ce moment ne peut être manqué, et qu’ils doivent s’accorder sur un programme politique national unificateur, susceptible d’ouvrir les portes de la reconnaissance et du soutien international à notre cause.

Mais il est important de mettre en garde : il serait non seulement imprudent, mais gravement préjudiciable, que toute faction palestinienne – en particulier le Hamas – considère cette évolution comme une victoire partisane, et cherche à en tirer des fruits politiques immédiats. Celui qui voit en cette conjoncture une simple opportunité d’accroître ses gains organisationnels prend le risque de faire échouer cette dynamique politique internationale, et pourrait condamner notre peuple à plus d’isolement et de souffrance.

Ce moment exige une conscience stratégique, une vision nationale, une lecture profonde de la situation, et une réelle volonté de sortir du tunnel de la division. Il faut bâtir un partenariat national capable de saisir cette opportunité rare, et de transformer le sang de Gaza en une aube politique nouvelle pour le peuple palestinien.

(Voir aussi les chroniques et articles postés par Brigitte Challande du Collectif Gaza Urgence déplacé.e.s quotidiennes sur le site d’ISM France et du Poing, article hebdomadaire sur le site d’Altermidi, et sur l’Instagram du comité Palestine des étudiants de Montpellier..)

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