Témoignage d’Abu Amir, le 25 juin 2025 – Le monde supplie… et Israël refuse : quand le diable est au-dessus des lois

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Des Palestiniens se rassemblent le 25 juin 2025 à un point de distribution d’aide installé par la Fondation Humanitaire de Gaza, fondation privée, près du camp de réfugiés de Nuseirat, au nord de la Bande de Gaza. (Photo d’Eyad BABA / AFP)

Dans un moment critique de l’histoire de l’humanité, l’image est devenue choquante de clarté : le monde entier supplie, et Israël refuse. Les ministres des Affaires étrangères de 22 pays, issus de cultures, d’intérêts et de sensibilités variés, se sont dressés ensemble pour exiger qu’Israël autorise immédiatement l’entrée d’aide humanitaire à Gaza, où des innocents meurent de faim, et où des enfants décèdent lentement sous le poids du siège, du manque d’eau, de médicaments et d’électricité. Cet appel n’était pas un geste diplomatique de routine : c’était une reconnaissance collective de l’échec du système international à endiguer une catastrophe humaine se déroulant sous les yeux de tous. Pourtant, Israël n’a montré aucune réaction. Aucun signe d’attention, aucun respect, aucune volonté d’agir. Comme si ces voix internationales n’étaient que du bruit – un écho dans un vide moral où règne une mentalité coloniale et raciste, qui voit les Palestiniens comme des chiffres à réduire par tous les moyens.

Il est terrifiant de constater que ce refus ne traduit ni faiblesse ni incapacité, mais une arrogance confiante d’être immunisé contre toute sanction. Israël sait très bien qu’il ne sera jamais tenu responsable : ni pour les meurtres, ni pour la famine, ni pour la destruction des hôpitaux, ni pour l’enfouissement d’enfants sous les décombres. Le principe qui prévaut est devenu limpide : « Fais ce que tu veux, tant que les puissants te soutiennent. » Pendant que l’ONU rédige rapports et recommandations, et que les grandes puissances ne se contentent que d’exprimer leur « profonde inquiétude », Israël poursuit son œuvre d’extermination lente des habitants de Gaza – mais par des moyens plus insidieux et silencieux : famine collective, punition collective, humiliation collective.

C’est un moment historique honteux : le monde supplie pour la miette de pain d’un enfant assiégé, et Israël répond par le déni et l’indifférence. Un moment où la justice internationale se révèle factice et les rapports de force totalement biaisés. Israël est déjà devenu, à tous égards, une entité au-dessus des lois, au-dessus de l’humanité, au-dessus de la morale – tout comme le diable est le symbole du mal qu’on ne juge pas, mais qu’on craint, à qui on obéit et qu’on sert sous couvert de puissance.

Deux années de massacres : et la justice absente

Depuis près de deux ans, la bande de Gaza vit sous le feu d’une guerre sans relâche, une guerre qui ne distingue ni combattants ni civils, ni maisons ni hôpitaux, ni quartiers résidentiels ni boulangeries. Des dizaines de milliers de morts, majoritairement des enfants et des femmes, et des centaines de milliers de blessés aux séquelles souvent irréversibles. Des familles entières ont été rayées des registres, des quartiers réduits à des amas de décombres, et des maisons effondrées sur leurs habitants sans aucun avertissement. Même les tentes n’ont pas été épargnées, et les écoles pas davantage ; quant aux hôpitaux, ils sont devenus des cibles directes, bombardés du ciel et privés d’approvisionnements, transformés par la pénurie en centres de mort où les blessés saignent et les malades expirent dans le silence.

Tout cela se produit dans un silence international oppressant, et un silence arabe encore plus profond. Aucune sanction contre Israël, aucun recours aux tribunaux internationaux, aucun dépôt de plaintes effectives conduisant à des poursuites, aucune commission d’enquête produisant des mesures contraignantes. Tout ce qui existe sont des condamnations verbales répétitives et des déclarations de « profonde inquiétude », mais les mots ne guérissent plus une blessure, ni ne consolent un enfant pleurant sur le cadavre de sa mère. Israël agit simplement comme une entité protégée, irréprochable, hors de portée de la loi, comme si la justice internationale n’était faite que pour les faibles, tandis que les puissants protégés par le veto sont hors d’atteinte ou à jamais hors de portée.

La justice est absente, non seulement du terrain, mais aussi de la conscience internationale.

Aujourd’hui, poser la question des droits de l’homme à Gaza est considéré comme un acte « politique », et demander la mise en cause des responsables est immédiatement interprété comme de « l’antisémitisme », comme si les valeurs mêmes de l’humanité étaient otages d’un discours partial. Chaque jour où une maison est bombardée, où une famille est ensevelie sous les décombres, confirme que la communauté internationale voit, entend et comprend… mais refuse d’agir, car l’agresseur est Israël, et la victime, palestinienne.

Quand le diable devient le maître du jeu

Le fait le plus atroce dans cette guerre, ce n’est pas seulement qu’Israël commette des crimes hors de la loi, mais qu’elle monopolise la loi pour la façonner à son avantage. Par ses actions politiques et militaires, elle incarne un mal qui se revendique de sa propre légitimité : un mal qui ne cache rien, ne cherche pas à se justifier ou à s’excuser. Ce n’est plus un criminel qui fuit la justice, mais un criminel qui dicte à la justice ce qu’elle doit déclarer, qui impose qui est victime et qui est coupable. Israël enferme Gaza, détruit des maisons avec leurs occupants à l’intérieur, empêche l’arrivée de nourriture et de médicaments, puis exige les applaudissements du monde pour ses « victoires éthiques » dans la « lutte contre le terrorisme ».

Elle a su se positionner dans l’ordre international comme une puissance du fait accompli, forte de son soutien occidental aveugle et du silence – ou de la complicité – de certains pays arabes. Elle est désormais au-dessus de la critique, des pressions et de toute forme de reddition de comptes. Cela en fait, aux yeux de beaucoup, le véritable diable du conflit au Moyen-Orient, non parce qu’elle utilise la force, mais parce qu’elle le fait en toute confiance, sous protection juridique, dans l’indifférence mondiale, écrasant sans relâche des victimes impuissantes. Chaque crise qu’elle orchestre devient une opportunité pour étendre son influence, imposer sa vision, et manipuler la communauté internationale en se présentant comme défenseuse de la sécurité, tout en continuant de détruire un peuple entier, impunément.

Dans ce contexte, Israël n’a plus rien à craindre ; elle gère les conflits selon sa volonté, déclare la trêve à sa convenance, distribue des certificats de légitimité aux pays qui normalisent, et efface l’existence de ceux qui lui résistent. Elle n’est plus un acteur parmi d’autres, mais l’autorité qui décide de la vie, de la famine, de l’étiquette « terroriste » ou « victime » – jusqu’à ce que toute contestation de ses crimes soit perçue comme hors des limites autorisées. Dans ce cadre perverti, le diable est devenu l’arbitre suprême, non seulement par sa puissance, mais parce qu’il détient également le pouvoir de redéfinir les règles, d’inverser les rôles du bien et du mal à sa guise.

Netanyahou… l’empereur en marche

Dans un paysage politique régional marqué par le vide, la confusion et la division, la figure de Benjamin Netanyahou émerge comme celle d’un empereur qui redessine la carte du Moyen-Orient selon ses ambitions. Il n’est plus simplement le Premier ministre de l’État d’occupation ; il est devenu un acteur clé des événements, une référence implicite pour les décisions déterminantes qui touchent des peuples entiers. Dans un contexte d’effondrement des positions arabes, de certains régimes devenant des instruments de normalisation, et d’une communauté internationale paralysée, il remplit ce vide politique avec une assurance absolue. Il s’adresse à son environnement comme s’il était un monarque non couronné, imposant ses conditions, menaçant, faisant pression, pilotant la politique par la force, avec le soutien externe.

Les décisions militaires de Netanyahou ne relèvent plus de la politique intérieure israélienne ; elles sont désormais des outils de recomposition des équilibres régionaux, fondés sur la répression et le contrôle, et non sur la justice ou la paix. Ses intimidations orientent la boussole de nombreux pays, et ses politiques sécuritaires servent de modèle pour des régimes répressifs qui justifient leur autoritarisme par la « lutte contre le terrorisme ». Ce qui renchérit grandement le danger qu’il représente, c’est qu’en dépit des scandales, enquêtes et accusations de corruption qui le visent en Israël, il instrumentalise la guerre à Gaza pour se maintenir au pouvoir, brandissant le conflit à chaque crise de popularité, déclenchant des crises pour générer un appui interne temporaire, détournant l’attention de ses défaillances nationales. Il est devenu un maître des crises préfabriquées : il attise la guerre quand sa popularité décline, et proclame des victoires à son convenance, libéré de toute contrainte morale ou juridique.

Avec l’effondrement du contre-pouvoir arabe, les silences des grandes puissances et les tergiversations des institutions internationales, Netanyahou dirige désormais sans craindre la moindre réprimande, comme si le Moyen-Orient lui avait remis ses clés. Ce leader avide de domination voit dans le sang palestinien un moyen d’extension, dans l’absence de justice une chance de renforcer sa position, et dans la reddition des autres un passage vers la pérennité politique.

Où est le monde ? Et les Arabes ?

Des scènes de mort devant les centres de distribution d’aide à Netzarim – où les affamés sont abattus ou piétinés en tentant de récupérer un sac de farine ou une bouteille d’eau – aux mères fouillant sous les décombres, aux enfants enterrant leurs proches de leurs petites mains tremblantes… Rien de tout cela ne semble suffisant pour émouvoir les consciences internationales. Le drame de Gaza est devenu un simple décor banal dans les journaux télévisés, des images tragiques mais éphémères, incapables de susciter la sidération ou de provoquer un véritable élan moral. On dirait que le sang palestinien a perdu son pouvoir d’émouvoir ; ces petits cadavres extraits des ruines ne semblent plus appartenir à l’humanité. Le monde, qui autrefois se pressait pour aider des régions frappées par des désastres moindres, reste impassible devant

Gaza : complice, ou craintif, ou tout simplement indifférent, pendant qu’un peuple est anéanti aux yeux de tous.

Et côté arabe, la douleur est plus aiguë encore. La division a atteint l’insensibilité politique ; certains États normalisent ouvertement, d’autres se murent dans le silence, d’autres encore publient des communiqués aussi froids que des avis de décès. Le positionnement arabe est devenu sans influence et sans respect sur la scène internationale. Il n’y a ni mesures concrètes, ni conférences efficaces, ni actions diplomatiques fortes devant l’ONU ou les tribunaux internationaux. Le sang palestinien est devenu une carte secondaire dans les priorités arabes, alors qu’autrefois, la question palestinienne était le symbole de la dignité et du principe. Cela révèle l’échec des élites politiques arabes à transformer le soutien populaire massif à la cause palestinienne en une action officielle forte et unifiée. Les Palestiniens se retrouvent seuls, face à une machine de guerre, forcés de résister, de supporter l’inimaginable pour survivre, de chercher la subsistance dans la poussière de leurs maisons détruites, et d’extraire leur fierté des canons qui les écrasent.

Ce qui se déroule à Gaza n’est pas une guerre passagère, mais un chapitre prolongé de crime organisé, perpétré au vu et au su du monde, dans un silence international honteux et une passivité arabe douloureuse. Un peuple entier est lentement massacré, délibérément affamé, cruellement assiégé, tandis que les appels à l’aide des capitales résonnent sans trouver d’écho dans l’arène politique israélienne, sûre de sa puissance et protégée des lois. Israël, devenue une entité au-dessus de la justice, tue, détruit et bloque l’aide dans un scénario qui prouve qu’avoir la force et l’appui politique permet d’agir sans limite ni conséquence.

Dans ce décor obscur, Benjamin Netanyahou brille comme un empereur contrôlant le destin du Moyen-Orient, imposant sa volonté par les armes, redéfinissant les équilibres à son profit, au moment même où le système international révèle sa faillite morale face au premier véritable test humanitaire. Tandis que les régimes arabes restent paralysés, divisés ou complices par la normalisation, le Palestinien se retrouve seul, luttant pour vivre, défendant sa dignité face à une machine de guerre implacable.

Et pourtant, malgré les meurtres, la famine et la conspiration, Gaza tient bon : elle ne s’incline pas, elle ne meurt pas. Elle résiste avec l’esprit qui lui reste. Et voici le message à tous ceux qui ont perdu leur boussole morale : vous pouvez détruire des murs, enterrer des vies, mais vous ne briserez jamais la volonté d’un peuple qui croit en son droit, reste debout sur les ruines de sa terre, et hurle au monde : « Nous sommes là, et nous ne partirons pas. »

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