Union juive française pour la paix

Témoignage d’Abu Amir, le 20 septembre 2025 – Parmi les décombres de la peur naît le courage : atelier pour les femmes de Gaza sur la gestion des peurs en temps de crise

Abu Amir 19 9 25 Ateliers psychologiques IMG 0603 Témoignage d’Abu Amir, le 20 septembre 2025 - Parmi les décombres de la peur naît le courage : atelier pour les femmes de Gaza sur la gestion des peurs en temps de crise

Dans le camp du Retour, à l’ouest de la ville de Gaza, au milieu des échos des bombardements violents qui font trembler la terre et les maisons, un groupe de femmes a tenu à trouver pour elles-mêmes une lueur au cœur de l’obscurité. Ce sont des femmes épuisées par des années de déplacements, par la perte de leurs proches et par des responsabilités accrues dans des conditions inhumaines. Pourtant, elles se sont réunies pour affirmer que la peur n’est pas un destin éternel, mais un état qui peut être géré et apprivoisé. Dans ce contexte difficile, l’équipe de l’UJFP a organisé un atelier unique intitulé « Gérer les peurs en temps de crise », auquel ont participé trente femmes qui ont bravé les explosions et les cœurs tremblants pour s’asseoir ensemble et découvrir en elles une nouvelle énergie pour affronter leur réalité.

Les femmes dans les camps vivent une situation complexe d’anxiété quotidienne : peur de l’avenir, perte du foyer, disparition des enfants. Mais au milieu de cette réalité, la femme devient le pilier de la maison et son fondement. C’est elle qui cache ses larmes pour sourire à ses enfants, qui dissimule les battements affolés de son cœur pour inspirer la sérénité à son entourage. Cet atelier est donc venu comme une fenêtre d’espoir, leur permettant d’exprimer leurs émotions sans honte et leur offrant des outils pratiques pour transformer l’angoisse en énergie positive.

La séance a commencé par une activité symbolique et émouvante appelée « La boîte de mes peurs ». Chaque participante devait écrire sur un petit papier la peur qui pesait sur son cœur, puis la déposer dans une boîte devant toutes les autres. Ce n’était pas qu’un simple exercice, mais un rituel de libération d’un lourd fardeau. L’écriture fut un moment d’aveu, et déposer le papier dans la boîte devint une déclaration collective : la peur peut être contenue. L’une des femmes a dit, les larmes aux yeux : « Quand j’ai mis le papier, j’ai senti que j’avais enlevé une partie de mon lourd fardeau. » Une autre a ajouté : « J’ai écrit ma peur de perdre mon fils, et lorsque j’ai jeté le papier dans la boîte, j’ai imaginé que cette peur s’éloignait de moi. » Ainsi, la peur se transforma en une chose tangible sur laquelle on pouvait reprendre le contrôle.

Vint ensuite l’activité intitulée « La peur, mon amie », où les femmes, assises en cercle, ont partagé des récits personnels de situations où la peur avait sauvé leur vie. L’image de la peur changea dans leurs esprits : elle ne fut plus un ennemi terrifiant mais un gardien appelant à la vigilance. Une mère raconta : « Quand un bombardement est tombé près de notre maison, ma peur m’a poussée à rassembler rapidement mes enfants et à fuir. Si je ne l’avais pas fait, j’en aurais peut-être perdu un. » Une jeune femme ajouta : « Ma peur m’a rendue plus prudente lors du déplacement, et cette prudence m’a évité le danger. » Ce fut un moment de reprogrammation mentale, où la peur devint une énergie protectrice plutôt qu’un obstacle paralysant.

La troisième activité, intitulée « L’ancre du calme », a offert aux femmes de rares instants de paix. Malgré le vacarme des explosions, elles ont appris à pratiquer la respiration profonde : une longue inspiration suivie d’une lente expiration, comme si elles amarraient le navire de leur vie dans un port de sérénité au milieu d’une mer déchaînée. Cet exercice simple a permis à beaucoup d’entre elles de retrouver le contrôle de leur corps. L’une témoigna : « Je tremblais avant l’exercice, mais après quelques minutes, j’ai senti que je maîtrisais mon cœur et mes pulsations. » Une autre dit en souriant : « J’ai eu l’impression de reprendre le fil de la vie et de ne plus être prisonnière de la peur. » Elles comprirent alors que le calme ne signifie pas l’absence de bombardements, mais une compétence intérieure à mobiliser.

L’activité finale, intitulée « Lettre à moi-même », fut l’une des plus marquantes. Chaque participante devait écrire un court message à elle-même, rempli de courage et d’encouragement. Lire cette lettre à voix haute a rempli la salle d’une profonde énergie humaine. L’une écrivit : « Je resterai forte quoi qu’il arrive », et lorsqu’elle la lut d’une voix tremblante, ses yeux s’embuèrent, mais elle confirma : « J’ai senti que je venais de conclure un pacte avec moi-même que je n’abandonnerai pas. » Une autre écrivit : « Ma peur ne me tuera pas, elle me rendra plus vigilante », et en lisant son message, toutes applaudirent chaleureusement comme pour célébrer la naissance d’un nouvel espoir. Ce moment fit naître en chacune un engagement intérieur à continuer sans céder.

Cet atelier ne fut pas une simple rencontre passagère, mais une formation pratique à la gestion de crise dans les conditions les plus dures. Les femmes qui ont appris la respiration profonde sont désormais capables de calmer leurs enfants pendant les bombardements ; celles qui ont compris que la peur peut être une alliée savent désormais prendre des décisions justes dans les moments de danger ; et celles qui ont écrit des lettres à elles-mêmes sont sorties avec un pacte intérieur indestructible. Ces activités furent de véritables outils de survie au cœur d’une guerre qui vole toute sérénité.

L’atelier « Gérer les peurs en temps de crise » a démontré que le soutien psychologique n’est pas un luxe, mais une nécessité vitale. C’est le bouclier qui protège les femmes de la rupture, la main qui les relève du désespoir, la clé qui ouvre les portes de l’espoir. Cet atelier n’a pas appris aux femmes à cacher leurs peurs, mais à les transformer en force, à les utiliser comme carburant pour la résilience au lieu d’être une cause d’effondrement. Et à Gaza, où les bombes ne cessent de tomber, naissent des instants d’espérance du sein même de la peur. Les femmes y prouvent que le courage ne signifie pas l’absence de peur, mais la capacité à l’affronter et à la gérer. Ainsi, ces ateliers demeurent le témoignage que l’esprit humain peut toujours se relever, quelles que soient les tempêtes.

Photos et vidéos ICI

(Voir aussi les chroniques et articles postés par Brigitte Challande du Collectif Gaza Urgence déplacé.e.s quotidiennes sur le site d’ISM France et du Poing, article hebdomadaire sur le site d’Altermidi, et sur l’Instagram du comité Palestine des étudiants de Montpellier..)

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