Union juive française pour la paix

Témoignage d’Abu Amir le 12 septembre 2025 – Atelier de soutien psychologique pour les femmes du camp d’Al-Asdiqa’a : mon sac est ma bouée de sauvetage : séance de soutien psychologique et d’autonomisation des femmes dans les camps face aux urgences

Abu Amir 12 9 25 ateliers psy IMG 0288 1 Témoignage d'Abu Amir le 12 septembre 2025 - Atelier de soutien psychologique pour les femmes du camp d'Al-Asdiqa'a : mon sac est ma bouée de sauvetage : séance de soutien psychologique et d’autonomisation des femmes dans les camps face aux urgences

Dans la ville de Gaza, qui saigne chaque jour sous le poids des bombardements intenses, où il ne se passe guère une journée sans que la mémoire de ses habitants ne s’alourdisse d’une nouvelle page de terreur et de destruction, les équipes de soutien psychologique de l’UJFP ont tenté, la semaine dernière, à plusieurs reprises, d’organiser un atelier de soutien pour les femmes qui y vivent. Mais les colonnes de fumée montant de chaque quartier, le bruit des explosions transperçant les âmes avant les murs, et les déplacements constants qui ont poussé des milliers de familles à chercher un abri sûr, ont empêché la tenue de l’atelier. Il était impossible de réunir les femmes en un seul endroit, car toute la terre tremblait sous l’impact des missiles, et les esprits s’éparpillaient entre l’exil ici et l’attente de la mort là-bas. Face à cette réalité douloureuse, il nous a fallu trouver une autre voie. Nous avons donc déplacé la séance à Deir al-Balah, où certains déplacés se sont installés dans le camp des Amis, et là, nous avons décidé de planter une graine d’espoir, même sur une terre épuisée par la misère.

Le début de la séance : un rayon de lumière dans l’obscurité des tentes

Lorsque les spécialistes sont entrées dans la modeste salle du camp, la douleur se lisait sur les visages des femmes, et leurs yeux racontaient des histoires encore jamais dites. Les équipes ont choisi d’ouvrir la séance sous le titre « Le sac d’urgence de la femme dans les camps », mais ce n’était pas seulement un sac rempli d’objets, c’était une tentative de remplir des cœurs vides de sérénité et de force. Les spécialistes ont accueilli les participantes avec un sourire chaleureux, comme si elles tentaient de faire éclore une fleur sur une terre brûlée. Le premier exercice, « Mon sac magique », invitait chaque femme à mentionner un objet dont elle ne pourrait se passer dans son sac quotidien. Les réponses variaient entre « la photo de mon fils », « mon petit Coran », ou « une bouteille d’eau », mais toutes convergeaient vers un besoin vital : la sécurité.

Contexte et nécessité de la séance

La vie dans les tentes des camps de déplacés ressemble à une attente constante d’une catastrophe imminente. L’eau est rare, la nourriture limitée, et les bruits des explosions venant de Gaza-ville rappellent à chacun que le drame n’est pas terminé. Les femmes, en particulier, subissent une souffrance complexe : elles ont quitté leurs maisons, dorment à même le sol avec leurs enfants, et portent sur leurs épaules la peur pour leurs familles. Dans ces conditions, l’idée de cette séance a vu le jour comme un cri : « Même au cœur du chaos, nous pouvons nous préparer et tenir bon. »

Activités interactives : des pas vers la sécurité

Lors de l’activité « Carte de sécurité », les femmes se sont assises en cercle, et chacune a partagé les trois éléments qu’elle juge essentiels dans un sac d’urgence. Certaines ont mentionné l’eau et la nourriture, d’autres les médicaments ou les papiers d’identité. Les priorités variaient, mais elles se rejoignaient toutes sur un point : le sac est plus qu’un outil, c’est une bouée de sauvetage.

Puis vint « La boîte de la sérénité », une activité qui a ouvert un espace de réflexion collective. Réparties en petits groupes, les femmes discutaient : « Que faire si l’eau venait à manquer soudainement ? Que faire si nous devions quitter la tente en pleine nuit ? » Elles ont échangé des idées et proposé des solutions simples mais profondes : une petite bouteille d’eau dans chaque sac, un sac plastique pour protéger les papiers de l’humidité, une lampe de poche en cas de coupure de courant. On aurait dit qu’elles inventaient un avenir nouveau avec des moyens modestes, mais avec un immense courage.

Voix de femmes : récits d’exil et larmes contenues

Parmi les participantes, une jeune mère d’une vingtaine d’années, les yeux embués, a raconté son histoire.

« Une nuit, une roquette est tombée près de notre maison. Nous n’avons eu d’autre choix que de courir. Je n’ai rien emporté, je suis sortie en portant seulement mon bébé. Lorsqu’il a demandé du lait au milieu de la nuit, je me suis sentie comme une mère indigne : je n’avais même pas une petite bouteille pour lui. Ce n’est qu’aujourd’hui que je comprends combien un sac prêt aurait pu changer les choses. ».

Ses mots ont plongé la salle dans un silence pesant, rompu uniquement par les larmes des participantes.

Une femme d’une cinquantaine d’années, alourdie par l’expérience, a pris la parole : « Mon mari est diabétique. À chaque déplacement forcé, j’emporte des couvertures, mais j’oublie les médicaments. Je l’ai presque perdu plusieurs fois. Aujourd’hui, j’ai appris que les médicaments, c’est la vie, pas les vêtements. ».
Ses paroles résonnaient comme une leçon pour toutes, un rappel que les priorités peuvent signifier la survie.

Une jeune fille a partagé le récit d’une vieille femme ayant perdu tous ses papiers d’identité lors de l’exode : « Je l’ai vue pleurer avec désespoir, non pas pour sa maison ou ses affaires, mais pour son identité disparue. Elle n’avait plus rien pour prouver son existence. Alors j’ai compris que le sac d’urgence est aussi le sac de l’identité. ».

Cette histoire a bouleversé l’assemblée et poussé les spécialistes à insister sur l’importance de placer les documents officiels au sommet du contenu du sac.

Les aspects psychologiques de la séance

L’objectif n’était pas seulement de préparer un sac, mais aussi de contenir la douleur et la panique qui habitent les femmes. Les spécialistes ont proposé des activités psychologiques étudiées : respiration profonde pour réduire le stress, exercices courts de relaxation, et un espace sûr pour exprimer ses peurs sans honte. L’une d’elles a murmuré à une participante : « Tu es forte, tu es toujours là malgré tout. » Comme si elle lui offrait un nouveau certificat de vie.

En clôture, chaque femme a écrit une lettre à elle-même sous le titre « Lettre d’espoir ». L’une a écrit : « Je resterai forte pour mes enfants, et cette fois je serai prête. » Une autre : « Je ne me trahirai plus, mon sac sera prêt. » Ces messages n’étaient pas de simples mots sur du papier, mais des promesses personnelles de vie.

Conclusion : l’espoir malgré tout

La séance s’est achevée, mais son impact est resté gravé sur les visages des femmes. Leurs larmes se mêlaient à des sourires timides, comme si chacune avait trouvé un refuge après une violente tempête. Les spécialistes ont prouvé que le soutien psychologique n’est pas seulement des mots, mais une capacité à toucher la blessure sans aggraver l’hémorragie, et à transformer le chaos en démarches concrètes vers la sécurité.

Les femmes sont sorties de la séance avec plus qu’un sac : un sac rempli d’objets essentiels, et un autre rempli d’espoir.

Au final, une vérité s’impose : « La préparation est la clé de la sécurité, et la sécurité est la base de la résilience. » Et tandis que les bombardements continuent sur Gaza, une petite lumière brille à Deir al-Balah, au fond d’une tente, où des femmes ont appris qu’elles sont, malgré tout, capables de vivre.

(Voir aussi les chroniques et articles postés par Brigitte Challande du Collectif Gaza Urgence déplacé.e.s quotidiennes sur le site d’ISM France et du Poing, article hebdomadaire sur le site d’Altermidi, et sur l’Instagram du comité Palestine des étudiants de Montpellier..)

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