Témoignage d’Abu Amir, le 10 juillet 2025 – Soutien psychologique et de sensibilisation sanitaire

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Abu Amir, Bande de Gaza, 10 juillet 2025

Au cœur de la douleur, sous un soleil accablant, dans l’ombre de tentes qui ne protègent ni de la chaleur ni du froid, les équipes de l’UJFP poursuivent leur mission essentielle de soutien psychologique et de sensibilisation sanitaire auprès des familles déplacées dans la bande de Gaza. Ces familles sont confrontées quotidiennement aux ravages de la guerre et du blocus, luttant contre les fardeaux du déplacement et de la perte. Dans un contexte où l’agression s’intensifie et où les destructions s’étendent, la tragédie ne se limite plus aux ruines fumantes. Elle s’infiltre désormais dans les détails de la vie quotidienne, privés des conditions les plus élémentaires de dignité humaine : eau potable, nourriture saine, et même une simple brise fraîche.

Cette semaine une session unique animée par les équipes de soutien psychologique : « Comment nous protéger, nous et nos enfants, de la chaleur et des maladies estivales », dans le camp des Amis à l’ouest de Deir al-Balah. Dix-sept femmes déplacées y ont participé, trouvant dans cette session un espace d’espoir, un souffle d’humanité au milieu de l’étouffement ambiant. La session a fusionné savoir sanitaire et soutien psychologique, devenant ainsi un moment de répit face à l’étreinte brûlante de l’été et de la guerre.

Évoquer la douleur avant de commencer

Les participantes, assises proches les unes des autres, semblaient chercher la sérénité dans la proximité. La formatrice a lancé une question simple « Comment s’est passée votre nuit dernière ? »

« Une autre nuit sans sommeil… Mon enfant hurle toute la nuit à cause de la chaleur sous la tente, et tout ce que je peux faire, c’est placer un tissu mouillé sur son front et prier pour que sa fièvre ne monte pas davantage. »

Ces paroles ont ouvert la voie à une série de confidences. Une autre femme, les larmes aux yeux, a évoqué les diarrhées persistantes de son fils et l’absence d’installations sanitaires ou d’eau propre pour s’en occuper.

Activité de soutien psychologique : « Dessine ta tristesse sur une feuille »

Des feuilles et des crayons ont été distribués aux femmes, invitées à dessiner leurs sentiments face à la chaleur ou à la vie dans le camp.

  • Une femme a dessiné un soleil énorme fondant sa tente.
  • Une autre a représenté un corps d’enfant allongé au sol avec une seule goutte d’eau au-dessus de sa bouche.
  • Une troisième a dessiné une pile de vêtements trempés de sueur et de larmes.

Après avoir montré leurs dessins, les femmes ont commencé à en expliquer la signification, révélant colère, impuissance et peur. L’intervenante psychologue est intervenue pour souligner l’importance de l’expression visuelle comme outil de libération émotionnelle.

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Conseils et informations dans un cadre humain

La session a ensuite proposé un contenu scientifique simplifié sur la prévention des maladies estivales. L’importance de l’hydratation régulière a été expliquée, notamment pour les enfants.

« Je pensais que boire de l’eau n’était nécessaire que si l’enfant avait soif… Mais maintenant je comprends que la soif arrive trop tard, et que la déshydratation peut déjà être là sans qu’on s’en aperçoive. »

On a également abordé le choix des vêtements, la nécessité d’éviter l’exposition directe au soleil aux heures les plus chaudes, et les moyens de refroidir le corps avec les moyens disponibles, notamment l’usage de linges mouillés à l’eau propre.

Deuxième activité psychologique : « Lettre à mon corps »

L’intervenante a proposé aux participantes d’écrire une lettre à leur corps, en signe de réconciliation et de reconnaissance.

« Mon corps résistant, je sais que tu es fatigué, je sais que tu t’effondres chaque nuit, mais tu continues à avancer et à me porter. Pardonne-moi de ne pas pouvoir te donner le repos que tu mérites. »

Quelques larmes ont coulé, non par faiblesse, mais comme un exutoire à une souffrance tue depuis des semaines, voire des mois.

Hygiène personnelle et sécurité alimentaire : la connaissance comme outil de protection

Dans la deuxième partie de la session, un exposé a été donné sur l’importance du lavage régulier des mains, en particulier après usage des sanitaires et avant les repas. Des scénettes simples ont illustré la manière dont la contamination se transmet de la main à la bouche.

« Parfois, nous n’avons même pas assez d’eau pour nous laver les mains, nous utilisons juste des mouchoirs… Mais nous faisons de notre mieux. »

Il a aussi été question de la conservation des aliments et des dangers des nourritures non couvertes ou non réfrigérées, même si cela reste difficile dans les conditions du camp. Des solutions pratiques ont été évoquées, comme recouvrir les aliments d’un tissu mouillé ou les conserver à l’ombre.

Activité collective : « Cercle de confiance »

Les femmes se sont placées en cercle, chacune tenant la main de sa voisine. On leur a demandé de prononcer à voix haute une phrase encourageante. Elles ont ensuite scandé avec force :

  • « Nous sommes plus fortes que la chaleur. »
  • « Mes enfants méritent d’être protégés. »
  • « Je prendrai soin de moi pour eux. »

Histoires vécues : des témoignages poignants et sincères

Pendant la session, une femme a partagé que ses enfants souffraient d’infections cutanées douloureuses, exprimant son impuissance à leur donner un bain faute d’eau.

« Chaque jour j’entends des enfants pleurer, je sens l’odeur de la maladie se propager dans l’air. Je ne sais pas si c’est l’été… ou si la mort s’approche lentement. »

Entre soulagement et persistance de l’espoir

À la fin de la session, les visages des femmes montraient un certain apaisement, comme si un poids avait été allégé, même temporairement. Les intervenantes ont souligné que la sensibilisation sanitaire, même élémentaire, constitue la première ligne de défense contre des conditions extrêmes pouvant mener au pire.

Les femmes sont reparties avec de petites stratégies de protection, des savoirs capables de sauver un enfant de la déshydratation ou d’éviter une intoxication alimentaire.

En fin de compte, la voix humaine demeure la plus forte face à l’oppression, et la conscience sanitaire est la première arme pour défendre la vie — même sous les tentes du déplacement, même au cœur de l’été le plus cruel… celui de Gaza meurtrie. »

(Voir aussi les chroniques et articles postés par Brigitte Challande du Collectif Gaza Urgence déplacé.e.s quotidiennes sur le site d’ISM France et du Poing, article hebdomadaire sur le site d’Altermidi, et sur l’Instagram du comité Palestine des étudiants de Montpellier..)

  • Suivre le journal quotidien tenu par Abu Amir, représentant de l’UJFPà Gaza

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