La Cour Internationale de Justice (CIJ) a rendu sa décision ce 26 janvier suite à la plainte déposée par l’Afrique du Sud : la plus haute juridiction internationale reconnaît un risque sérieux et plausible de génocide contre les Palestinien-ne-s de Gaza, et oblige Israël à prendre des mesures immédiates. Pour cela, elle pointe les éléments suivants de la définition de génocide :
* Meurtre de membres du groupe ;
* Atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;
* Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ;
* Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe.
La Cour a donc admis la requête de l’Afrique du Sud et exige qu’Israël prenne des mesures. En particulier son armée ne doit commettre aucun des actes sus-mentionnés et s’abstenir de détruire les preuves…
La Cour donne les noms des Israéliens qui incitent au génocide
La décision de la Cour est remarquable par la manière dont elle balaye les arguments d’Israël et dont elle met en cause les « déclarations haineuses, à caractère raciste et déshumanisante tenues à l’égard des Palestiniens » en citant les déclarations d’officiels israéliens :
* « 9 octobre 2023, Monsieur Yoav Gallant, ministre israélien de la défense, a annoncé qu’il avait ordonné un siège complet de la ville de Gaza, qu’il n’y aurait pas d’électricité, pas de nourriture, pas d’eau, pas de combustible et que tout était fermé. Le jour suivant, monsieur Gallant a déclaré (…): « J’ai levé toutes les limites. Vous avez vu contre quoi nous nous battons : nous combattons des animaux humains (…) Nous détruirons tout ! »…
* « Le 12 octobre 2023, Monsieur Isaac Herzog, le président d’Israël a déclaré, en parlant de Gaza, : « (…) C’est toute une nation qui est responsable. Tous ces beaux discours sur les civils qui ne savaient rien et qui n’étaient pas impliqués, ça n’existe pas. Ils auraient pu se soulever, ils auraient pu lutter contre ce régime maléfique qui a pris le contrôle de Gaza par un coup d’État, mais nous sommes en guerre, nous sommes en guerre, nous sommes en guerre, nous défendons nos foyers, nous protégeons nos foyers c’est la vérité, et lorsqu’une nation protège son pays, elle se bat et nous nous battrons jusqu’à leur briser la colonne vertébrale.»
* « Le 13 octobre 2023, Monsieur Israël Katz, alors ministre israélien de l’énergie et des infrastructures, a déclaré sur X, anciennement Twitter (…) : « Nous combattrons l’organisation terroriste Hamas et nous la détruirons. L’ordre a été donné à toute la population civile de Gaza de partir immédiatement. Nous gagnerons. Ils ne recevront pas la moindre goutte d’eau, la moindre batterie, tant qu’ils seront de ce monde. »
La Cour a également pris en compte les déclarations des officiels de l’ONU, de l’OMS, de l’UNRWA sur le désastre humanitaire en cours à Gaza. Elle cite un communiqué du 6 novembre 2023 dans lequel 37 rapporteurs spéciaux, experts indépendants (…) du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU, « se sont alarmés de la rhétorique (…) visiblement génocidaire et déshumanisante maniée par de hauts responsables gouvernementaux israéliens ».
Il est temps de sanctionner Israël !
Cette décision est inédite.
Cependant la Cour n’assortit pas sa reconnaissance d’un risque sérieux de génocide, d’un appel au cessez-le-feu.
Mais cette reconnaissance du risque génocidaire constitue une arme de combat : contrairement aux dénégations de Netanyahou et du ministre français des affaires étrangères Stéphane Séjourné (qui ose dire qu’“accuser l’État juif de génocide, c’est franchir un seuil moral”), ainsi que de la plupart des défenseurs plus ou moins assumés de l’État d’apartheid israélien, il est non seulement permis mais nécessaire d’alerter sur la dynamique génocidaire en cours. Il n’y a rien d’antisémite dans le fait d’accuser Israël de commettre un génocide. La preuve, l’Afrique du Sud l’a fait et la Cour Internationale de Justice y a fait droit en acceptant sa requête.
La Cour n’a pas encore jugé sur le fond et s’en tient, pour l’heure, à l’obligation légale d’Israël de mettre en œuvre des mesures urgentes pour éviter la commission du crime de génocide. Israël a un mois pour rendre compte de son action à la Cour.
La Cour rappelle que « ces ordonnances indiquant des mesures conservatoires (…) ont un caractère obligatoire et créent donc des obligations juridiques internationales »
Les États qui prétendent vouloir le respect du droit international devraient donc se sentir obligés par cette décision. Il n’y a cependant aucune illusion à se faire : les dirigeant-e-s des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de l’Union Européenne, ou de la France, vont continuer à se contorsionner pour poursuivre leur soutien indéfectible à l’État d’Israël, leur hypocrisie étant criante aux yeux des populations du monde entier. Seule la mobilisation internationale des populations peut changer la donne.
Ainsi, pour l’UJFP, il est urgent :
– de continuer à défendre l’établissement d’un cessez-le-feu immédiat pour permettre la mise œuvre des mesures humanitaires réclamées par la Cour,
– que notre gouvernement cesse tout soutien au projet génocidaire israélien ainsi dévoilé, au risque d’être complice d’un génocide et ses dirigeants poursuivis.
– que les criminels de guerre israéliens soient poursuivis dans tous les États où ils viendraient à se trouver.
– et de renforcer la campagne BDS de Boycott, Désinvestissement et Sanctions jusqu’à ce qu’Israël respecte le droit international.
L’heure est à la justice, à l’humanité, à la solidarité avec le peuple palestinien, plus que jamais.
Justice et paix
العدالة والسلام
צדק ושלום
La Coordination nationale de l’UJFP, le 27 janvier 2024