Roms massacrés à Auschwitz : l’anniversaire tragique du 2 août 1944

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A Auschwitz-Birkenau, dans la nuit du 2 au 3 août 1944, 2897 Roms survivants dans le camp, pour la plupart des femmes, des enfants et des vieillards, furent assassinés dans les chambres à gaz lors la liquidation du « Zigeunerlager » (« le camp des tsiganes »)

Des Roms déportés

Le « Zigeunerlager » avait été établi par un décret de Himmler en décembre 1942.

Le 29 janvier 1943, son administration, le RHSA, ordonne la déportation de tous les Roms d’Allemagne et des pays occupés vers Auschwitz ( ci-dessous)

Déjà le 8 décembre 1938, dans le décret sur « la lutte contre le fléau tsigane » Himmler avait ordonné le recensement « intégral » des Tsiganes. A partir de 1940, ils furent déportés par milliers dans des camps de travail et des ghettos en Pologne, en application de l’ordonnance nazie du 27 avril 1940 dite de « transplantation » ( Umsiedlungserlass .

Au total, 20.000 Roms sur les 23.000 détenus dans le « Zigeunerlager » à Auschwitz-Birkenau y ont trouvé la mort à partir du début de 1943. 13.000 d’entre eux étaient originaires d’Allemagne et d’Autriche, les autres venant de pays soumis au Troisième Reich ou collaborant avec lui.

Entre avril et juillet 1944, environ 3.500 Roms et Sinti ont été transférés vers d’autres camps. Certains d’entre eux ont survécu aux épreuves de la persécution, mais 85 % de ceux qui ont été transportés initialement à Auschwitz Birkenau ont été exterminés.

Les historiens estiment que les nazis et leurs alliés auraient exterminé 500 000 Roms et Sintis soit entre le tiers et la moitié de la population tzigane vivant en Europe avant la guerre.

Un exemple particulier est celui du lieu de mise à mort de Babi-Yar en Ukraine avec ses exécutions précoces dès 1941 ( voir ici)

Commémoration Rom à Auschwitz-Birkenau

Pendant des décennies, les Roms et Sinti qui avaient survécu aux persécutions nazies ont été réduits au silence.

Après 1945, de nombreux pays n’ont ni reconnu ni condamné leurs persécutions raciales, et ils ont en outre continué leurs pratiques discriminatoires à l’égard des Roms et des Sinti, y compris dans le processus de restitution des biens pillés par les nazis.

Du fait que la commémoration dépend de la reconnaissance officielle ainsi que de la recherche et de l’historiographie, les souffrances des Roms et des Sinti ont très peu attiré l’attention.

Face à cette situation, les Roms et les Sinti ont longuement lutté pour être reconnus et occuper la place qui est la leur parmi les victimes du régime nazi.

C’est en 1979 seulement que l’Allemagne de l’Ouest a reconnu officiellement que l’extermination des Roms et des Sinti était fondée sur des raisons raciales, par décision du Parlement de la république fédérale d’alors .

C’est à partir de 1984 que les Roms et les Sinti eux-mêmes ont commencé à commémorer leur génocide à Auschwitz, le 2 août, date de la liquidation du « Zigeunerlager », avec la participation des représentants des États et de la communauté internationale .

C’est en 2001 seulement que le musée national d’Auschwitz a ouvert une exposition permanente sur le génocide des Roms et des Sinti. Ce pavillon représente maintenant un lieu de mémoire important qui documente l’ensemble du processus de persécution mis en œuvre par les nazis et leurs alliés, dont la France de Pétain.

C’est depuis 2015 seulement que la date du 2 août a été reconnue officiellement par le parlement européen comme  » Journée européenne de commémoration de l’Holocauste des Roms »

On l’appelle « Porajmos », « Samudaripen », holocauste rom, ou encore « Kali Traš »,( littéralement « Terreur noire »).

En 2010, en France le secrétaire d’État aux anciens combattants a évoqué la participation de la France à l’internement des Tziganes, lors d’une Journée nationale de la mémoire des victimes de crimes racistes et antisémites de l’État français.

Trente et un camps, dans lesquels furent internés entre 6 000 et 6 500 « nomades », ont été gérés par les autorités françaises jusqu’en 1946. En 2016, François Hollande, lors d’une cérémonie d’hommage sur le site du plus grand de ces camps, à Montreuil-Bellay (Maine-et-Loire), déclarait :

« La République reconnaît la souffrance des nomades qui ont été internés et admet que sa responsabilité est grande dans ce drame ».

On connaît le sort de discrimination et de racisme qui continue à accompagner la vie des populations Roms en Europe, notamment en Hongrie et Slovaquie

C’est aussi le cas dans des pays comme l’Italie.

En France les Roms sont la cible de multiples attaques venant de tous les bords ; certains responsables de l’UMP se sont spécialisés dans la dénonciation haineuse des Roms à la suite de Sarkozy et de Le Pen.

Mais à gauche aussi, les propos et les actes discriminatoires à leur égard perpétuent l’oppression dont sont victimes ceux qui ont payé un si lourd tribut au nazisme.

Ils continuent à subir des attaques violentes alimentées par des rumeurs complaisamment répandues, notamment sur les réseaux sociaux .

Ce fut le cas notamment en Mars 2019 en Seine Saint-Denis après qu’une telle rumeur ait circulé sur les réseaux sociaux selon laquelle des Roms, à bord d’une camionnette, kidnapperaient des enfants.

Nous rendons un hommage particulier à Raymond Gurême, l’un des derniers témoins de la déportation tzigane. Cet ancien déporté est décédé le 24 mai 2020 à l’âge de 95 ans.
Il était un défenseur de la mémoire de la déportation et de la culture tzigane.

Raymond Gurême est décédé le 24 mai (©DR)

Interné au camp de Linas-Montlhéry

Il était l’un des derniers survivants du camp dit « d’internement des nomades » qui avait vu le jour en quelques heures à Linas-Montlhéry ( Essonne) , en novembre 1940.

Né au cœur des années 1920 dans une famille française tzigane, Raymond Gurême se destinait à suivre les pas de ses ancêtres dans le cirque familial ambulant. Mais tout bascule au moment des années 1940, quand l’ensemble de sa famille est arrêtée par la police française.

Après quelques jours près de Rouen dans le camp de Darnétal, il finit par atterrir au camp de Linas-Montlhéry. Avec sa famille, ils y connaîtront le froid, la faim ou encore la soif sous l’indifférence de leurs geôliers.

Un des derniers témoins

Parvenu à s’échapper à maintes reprises de camps et de situations périlleuses, il prend ensuite le chemin de la Résistance. Son action dans ses rangs lui permettra d’aider les siens et son pays, la France.

D’ailleurs, il ne reverra ses proches que près de dix ans après le conflit mondial.

Installé à Saint-Germain-lès-Arpajon,il passé une partie de sa vie à transmettre son histoire, comme lors de l’inauguration de la stèle en mémoire de la déportation à Brétigny-sur-Orge en 2011.

Père de quinze enfants, il s’est ainsi éteint ce dimanche 24 mai après une longue vie de lutte pour la culture tzigane.

Le combat continue pour la reconnaissance du génocide des Roms et Sinti et contre les discriminations dont ils sont victimes si fréquemment.

MEMORIAL 98

Voir en ligne : l’article sur le site de Mémorial98