Récit de l’arrestation de Mahmoud Zwahre de Al’Masara

Comme vous avez pu le voir sur plusieurs vidéos de cette journée, nous étions en colère et choqués de ce déni arbitraire de notre liberté de mouvement. Nous étions venus pour exercer certains de ces droits qui nous sommes régulièrement déniés, et nous n’allions pas partir dépouillés de nouveaux droits. Nous avons donc refusé de partir et d’enlever nos drapeaux.

Voici le récit de l’arrestation de Mahmoud Zwahre de Al’Masara

Chers tous,

Je voudrais remercier tous ceux qui sont à nos côtés, et ont manifesté cet incroyable soutien ces 3 derniers jours en réclamant notre libération immédiate des prisons israéliennes. J’espère que nous serons capables de libérer Omar Dar Ayoub de Nabi Saleh rapidement aussi. Bien qu’Omar ait été arrêté avec nous 4 mercredi, et il n’a pas été libéré comme nous peu de temps après, avec « l’échange de prisonniers ». Ils l’ont gardé seul jusqu’à dimanche. Nous avons besoin de libérer Omar MAINTENANT avec tous les autres prisonniers politiques.

Contrairement à Omar, nous, à savoir Anwar Abu Mousa, une jeune femme de Ramallah qui fut la première arrêtée, Azmi al Shyouhki d’Hébron, Khaled Tamimi de Nabi Saleh et moi même avons été libérés dans la nuit de jeudi après une première audience au tribunal militaire. Pendant cette audience, l’accusation s’est battue avec véhémence pour prolonger notre emprisonnement expliquant que pour des raisons diverses, il n’avait pas été soit disant possible de terminer les interrogatoires et qu’ils avaient besoin de plus de temps pour préparer leurs arguments contre nous. Heureusement, notre avocat a quand même pu obtenir la libération de 4 d’entre nous à la condition que nous payions 3000 shekels en liquide comme caution, et que nous signions un document nous engageant à payer encore 10 000 shekels que nous serions obligés de payer si nous ne nous présentions pas au tribunal, la signature d’une tierce personne devant garantir que nous nous présenterions (comme si il existait une quelconque possibilité que nous puissions nous enfuir en Palestine occupée).

Aucune accusation n’a été formellement émise contre nous jusqu’à présent, mais pendant l’audience, l’accusation nous a accusés tous les 5 d’avoir agressé physiquement les soldats et ainsi que de rassemblement illégal.

Malgré une vidéo et des preuves qui montrent clairement l’inverse, l’accusation prétend que Azmi, Khaled et moi-même avons poussé les soldats tandis qu’Anwar aurait soit disant giflé un soldat et Omar donné des coups de pied à 4 d’entre eux, comme si des soldats israéliens fortement armés appartenant à une unité militaire tout aussi armée étaient des cibles crédibles pour des civils palestiniens non armés et menottés.

Bien entendu, nous accuser d’agression est une manière facile et efficace pour l’accusation de nous criminaliser, mais après tout ce qui nous était arrivé au cours de ces dernières 30 heures, une telle accusation nous semblait complètement surréaliste. A un moment, on avait quasiment l’impression qu’il était nécessaire d’organiser une campagne de solidarité pour les soldats.

Voici ce qui s’est vraiment passé :

Tôt dans la matinée de jeudi, notre convoi est parti du centre de Jéricho. Notre projet était de voyager ensemble à Ramallah sur la route n°1, une des routes dites de « contournement » que les autorités israéliennes construisent sur les terres palestiniennes pour construire l’infrastructure des colonies qui sont elles aussi illégales.

Bien que ces routes traversent toute la Cisjordanie occupée, à l’intérieur et autour de terrains privés, « l’administration civile israélienne » s’arroge le contrôle complet de ces routes et nous « autorise », à nous palestiniens de Cisjordanie, de les utiliser aux côtés des colons. En pratique, cela signifie que la police israélienne patrouille non seulement sur ces routes mais aussi considère qu’ils en ont de fait l’autorité, nous arrêtant fréquemment pour nous faire payer des amendes arbitraires ; le long de ces routes, les colons israéliens attendent aux arrêts de bus des compagnies de bus ordinaires israéliennes à quelques mètres des arrêts de bus de fortune qui nous sont réservés ; des attaques venant des colons ou des arrêts forcés par les militaires israéliens sont fréquents…

Nous avions prévu d’aller jusqu’à Ramallah par une de ces routes, et seulement ensuite d’utiliser certaines routes réservées aux colons et qui nous sont interdites. Nous n’avons même pas pu aller jusque là.

Sur notre chemin vers Ramallah, avant d’atteindre la « route n°1 » que, selon leur loi militaire bizarre, nous avons la permission d’utiliser, nous avons été arrêtés par les forces israéliennes armées. On nous a dit que nous n’avions pas le droit de continuer notre voyage avec un drapeau palestinien, alors que depuis les accords d’Oslo ceci n’est plus considéré comme un acte illégal par les autorités israéliennes. A quelques 300 mètres, des colons illégaux nous avaient dépassé avec un drapeau israélien en pleine Cisjordanie occupée, sans en être empêchés.

Comme vous avez pu le voir sur plusieurs vidéos de cette journée, nous étions en colère et choqués de ce déni arbitraire de notre liberté de mouvement. Nous étions venus pour exercer certains de ces droits qui nous sommes régulièrement déniés, et nous n’allions pas partir dépouillés de nouveaux droits. Nous avons donc refusé de partir et d’enlever nos drapeaux.

Dans la dispute qui s’en est suivie, Awar brusquement et très arbitrairement été arrêtée. Quand Omar a essayé d’empêcher cette arrestation absurde, il a lui aussi rapidement été arrêté, suivi par Azmi. A ce moment-là les forces d’occupation israéliennes (FOI) ont pris ma carte d’identité ainsi que celle de mon ami Naim Manar, et nous ont ordonné de nous mettre sur le côté pendant qu’ils contrôlaient les informations sur nous. J’ai réalisé qu’ils allaient m’arrêter aussi et que ma voiture était bloquée sur la route, juste en face des soldats, aussi ai-je tendu les clefs à Khaled Tamimi, et me suis fait conduire à Jéricho. J’ai plus tard appris qu’ils avaient arrêté Khaled (qui – après avoir été relâché avec nous jeudi soir – a été de nouveau arrêté plus tard dans la nuit, au cours d’une incursion, avec Anan qui a 17 ans et Mahdi, 20 ans, et fut de nouveau libéré hier soir alors que Anan et Mahdi restaient en prison). L’armée a aussi empêché toute autre personne de déplacer ma voiture.

30 minutes après mon départ, les « services secrets » israéliens ont commencé à m’appeler sur mon téléphone portable me menaçant d’être mis sur la liste « wanted » si je ne me rendais pas immédiatement. Etant donné le peu d’options que nous avons en Palestine occupée, j’ai choisi de revenir en compagnie d’un avocat.

Dès que je suis arrivé, on m’a menotté et bandé les yeux et amené au « DCO » de Jéricho où je suis resté jusqu’à ce qu’on m’amène à la colonie de Ma’ale Adumim. Après qu’Anwar, Omar, Azmi, Khaled et moi-même aient été interrogés, nous avons été transférés à la prison militaire d’Ofer, ce qui signifiait notre arrestation officielle.

Ceci est un exemple de plus du déni flagrant de tout droit pour les palestiniens dans tout le système israélien, y compris le système soit-disant « légal ». Khaled, comme bien d’autres femmes, hommes et enfants palestiniens est maintenu dans cette prison militaire à cause de la politique arbitraire et criminelle d’une entité qui a le droit d’agir en toute impunité.

Ceci doit cesser !

Al-Ma’sara village – Bethlehem – Palestine P.O.Box 768

00970599586004

NDLR : Mahmoud nous avait guidé pendant une journée lors de notre mission 2010 .Il est s’est aussi impliqué dans un jumelage avec une commune de la région de Grenoble auquel participe l’UJFP (de Grenoble)