Intervention d’André Rosevègue, co-Président de l’Union Juive Française pour la Paix
Bonjour à touTEs,
Je vais d’abord vous lire le témoignage que j’avais préparé pour le Tribunal.
J’ai fait la connaissance de Yamina, Jeanne et Bernard à Perpignan le 18 avril 2009 à l’occasion des 6 heures pour la Palestine …
J’étais venu porter la parole de notre association, une parole juive laïque pour les droits des peuples, et notamment du peuple palestinien.
Question de génération, j’ai eu l’occasion ensuite d’évoquer longuement avec Bernard des combats communs menés pendant les dernières décennies, sans se connaître, à quelques centaines de kilomètres de distance.
Nous avons bien sûr évoqué le soutien à la lutte des Noirs d’Afrique du Sud pour faire tomber l’odieux système d’apartheid. A l’époque, et avant même que nos gouvernements se préoccupent d’appliquer les sanctions demandées par les Nations Unies, nous répondions à l’appel de l’ANC de Nelson Mandela et appelions au boycott des oranges Outspan et à l’exclusion de l’Afrique du Sud de toutes les compétitions sportives.
On ne nous opposait pas encore frauduleusement un article de la loi de 1881, il sera écrit plus tard. Mais il y avait plein de bonnes âmes pour nous dire que les Noirs étaient les premières victimes du boycott, et que ne pas recevoir les sportifs n’était pas la bonne méthode car on se privait d’une possibilité de dialogue. Aujourd’hui, on a du mal à trouver quelqu’un qui ne dise pas avoir boycotté l’Afrique du Sud. Au contraire, beaucoup présentent le boycott comme l’arme suprême de la chute de l’apartheid, quand il n’a été qu’une modeste aide à la lutte des africains du Sud eux-mêmes.
Aujourd’hui, d’autres expliqueront mieux que je ne le ferais que les citoyens qui appellent à ne pas consommer les produits israéliens et à refuser de collaborer avec les institutions de ce pays ont une attitude autrement plus conforme au droit international que ceux refusent de sanctionner les criminels de guerre. Bien sûr, le boycott est l’arme des sociétés civiles quand les Etats se dérobent.
Ce qu’il m’appartient de dénoncer, c’est le caractère ignoble, scandaleux et catastrophique de ceux qui prétendent voir de l’antisémitisme dans la campagne menée pour le Boycott, le Désinvestissement, et les Sanctions contre l’Etat d’Israël.
Le prétendu bureau de vigilance contre l’antisémitisme, la chambre de commerce France Israël, et diverses officines liées au Conseil dit représentatif des institutions Juives de France se font une spécialité de dénoncer dans la campagne BDS une entreprise antisémite. Un regroupement d’associations qui se voulaient au départ incarner l’esprit de la résistance au nazisme ne voit rien à redire à la réception officielle de l’extrême droite européenne par la Knesset en Israël. Mais le CRIF est fier de museler la parole de ceux qui s’opposent résolument à la politique criminelle et suicidaire d’Israël, à sa fuite en avant dans la colonisation, l’apartheid, les crimes de guerre. Il y a cependant de plus en plus de Français que cela choque, et de plus en plus de Juifs en France qui ne supportent plus de voir le CRIF prétendre au monopole de la parole juive, et parler en leur nom en instrumentalisant la destruction des Juifs d’Europe et l’antisémitisme pour justifier l’injustifiable. Depuis l’opération « plomb durci » de décembre 2008/janvier 2009 et depuis l’arraisonnement meurtrier de la flottille de la liberté le 31 mai 2010, ce discours du CRIF devient proprement insupportable qui produit ce qu’il prétend redouter. En prétendant mettre un signe d’égalité entre Juif, sioniste, israélien, alors même que les témoignages attestent des crimes commis par l’armée israélienne, que les lois israéliennes durcissent la discrimination, que le retour des réfugiés palestiniens prévu par le droit et les résolutions de l’ONU est exclu par les gouvernements israéliens successifs, c’est le meilleur moyen de rendre impossible une perspective de vie dans la Justice et dans la paix pour une communauté juive au Moyen Orient, c’est le meilleur moyen que la colère populaire et justifiée contre les crimes d’Israël se retournent contre tous les Juifs du monde.
Il faut le dire, nous devons également nous élever contre la tentative d’instrumentaliser la Justice qu’a eu Madame Alliot-Marie dans son poste précédent en invitant tous les procureurs à poursuivre les appels au boycott des produits casher et des produits israéliens, inventant à cette occasion un appel au boycott des produits casher dont elle a été dans l’incapacité de trouver une seule trace. Il s’agissait donc d’une pure manipulation pour tenter d’associer dans les esprits la campagne BDS et une attitude anti-juive.
Après Stéphane Hessel, avec Michel Warschawski et les anticolonialistes israéliens qui sont l’honneur de ce peuple et disent « boycottez nous », j’espère que les Juges de Perpignan sauront en toute indépendance mettre un terme aux poursuites absurdes contre Yamina, Jeanne et Bernard. C’est le meilleur service qu’ils pourraient apporter à la recherche d’une paix juste et durable là-bas, au respect des libertés publiques ici.
Voilà. Je ne sais pas si j’aurai l’occasion de le dire un jour aux Juges de Perpignan. Mais je voudrais ajouter quelque chose.
En octobre dernier, l’UJFP a participé à une mission judéo-arabe en Palestine avec des camarades de l’ATMF, l’Association des travailleurs Maghrébins en France, de IDD, l’association Immigration Développement Démocratie, et de la FTCR, la fédération Tunisienne des Citoyens des Deux Rives.
Vous l’imaginez aisément, c’est avec la FTCR que nous avons fété le départ de Ben Ali, et avec eux que nous soutenons la poursuite et l’approfondissement de la Révolution de Jasmin.
Je ne peux pas terminer cette intervention sans citer ceux qui font le lien dans le système de domination en Méditerranée.
Ben Ali, bourreau de son peuple, un des meilleurs alliés d’Israêl.
Israël, assassin, Sarkozy et Alliot-Marie complices !
Ben Ali assassin, Sarkozy et Alliot Marie complices !
Alors oui, vive la lutte du peuple tunisien, vive la lutte du peuple palestinien et des anticolonialsites israéliens,
Boycott,désinvestissement, Sanctions
Comme Alima et Omar qui ont été relaxés à Pontoise,
Comme Sakina condamnée à Bordeaux qui doit être relaxée en Cassation,
Comme les 12 de Mulhouse,
Yamina, Jeanne et Bernard doivent être relaxés !
Perpignan le 24 janvier 2011