Palestine
La guerre contre la population de Gaza, entrée dans une nouvelle phase aiguë depuis l’action du 7 octobre 2023, constitue le plus grand massacre de Palestiniens depuis 1948. Ce n’est pas une guerre entre Israël et le Hamas, c’est un nettoyage ethnique :
- anéantissement de la population de la Bande de Gaza où 75 % de la population sont des réfugiés originaires de toute la Palestine historique.
- attaques concertées des villes et des villages de Cisjordanie par l’armée israélienne et les colons.
Au 1er décembre à Gaza, le bilan était de 21000 morts ou disparus (1 % de la population), en grande majorité des enfants, des femmes et des vieillards, plus de 60 % des habitations totalement détruites, 80 % de la population déplacée et bombardée là où elle avait trouvé refuge. Les hôpitaux, les ambulances, les secouristes, les personnels de l’UNRWA, les journalistes, les réservoirs d’eau, les panneaux solaires, les écoles … ont été systématiquement visés, l’intentionnalité de l’ensemble de ces destructions ayant clairement été précisée par le gouvernement Netanyhaou. Tout ceci correspond à la définition en droit international du terme « génocide ». Personne ne pourra dire « nous ne savions pas ».
Le déni, pour ne pas dire le négationnisme par rapport à ce que subit la Palestine est criminel. Les médias reprennent le discours de l’armée israélienne au nom du « droit d’Israël à se défendre », alors que Gaza est occupée. Israël viole ouvertement le droit international : le « droit d’Israël de se défendre » est en réalité un illégitime massacre de populations civiles.
L’UJFP n’emploie pas le terme « terrorisme » qui n’est pas défini en droit international et a été toujours utilisé contre les mouvements de résistance. Si ce terme désigne le massacre de civils désarmés, il est clair que parler du « terrorisme du Hamas » sans parler de celui de l’armée israélienne n’a aucun sens. En revanche, les termes « crimes de guerre », « crimes contre l’humanité », « génocide » et « apartheid » sont définis dans le droit international et tous s’appliquent à l’État d’Israël. L’UJFP, comme Amnesty International, considère que le Hamas a commis des crimes de guerre. L’UJFP a soutenu le discours des anticolonialistes israéliens qui ont dit après le 7 octobre avoir des proches parmi les morts ou les kidnappés et qui ont expliqué que le gouvernement suprémaciste israélien en était le responsable.
Depuis des décennies l’enfermement massif des Palestiniens est une pièce maîtresse de l’occupation : 40 % de la population masculine palestinienne a connu la prison depuis 1967, sans compter les femmes et les enfants à partir de l’âge de 12 ans. Aux 5200 prisonniers politiques au 7 octobre 2023, dont de nombreux en détention administrative, ce sont rajoutés des milliers d’arrestations. Dans ces conditions, le mot « otage » utilisé par les médias doit être manipulé avec précaution car les personnes enlevées par les groupes palestiniens le 7 octobre constituent un groupe hétérogène : des civils, des réservistes et des soldats. Tout civil ou résistant prisonnier doit être libéré.
Il est inexact de parler de « riposte » ou de « représailles » de l’armée israélienne. Le peuple palestinien, à Gaza comme en Cisjordanie est agressé en permanence depuis des décennies. À Gaza, avant le carnage actuel, il y a eu des bombardements incessants et sept agressions massives (près de 5000 morts). En 2018-19, les Marches du Retour, des manifestations non-violentes, ont été réprimées avec une violence extrême (350 morts, 8000 estropiés). En Cisjordanie, les colons et l’armée attaquent ensemble quotidiennement la population. Ce qui s’est passé à Huwara a été qualifié de pogrom, y compris par un général israélien. Partout, des maisons sont détruites, des oliviers arrachés, des jeunes tués ou arrêtés, les camps de réfugiés sont bombardés. En Cisjordanie, on compte plusieurs centaines de morts, impunies, depuis le début de l’année 2023. Ce qui est à l’œuvre ressemble à une nouvelle « Nakba » (catastrophe) : obliger la population à partir, préparer l’annexion de nouveaux territoires et un « Grand Israël » ethniquement pur.
L’offensive contre la Palestine est générale. L’épuration ethnique à Jérusalem -Est et les destructions des villages bédouins se poursuivent pendant que les yeux du monde entier sont braqués sur Gaza.
Le droit international affirme que résister à une occupation n’est pas seulement un droit, c’est un devoir.
Dans le monde et en France
La complicité de l’Occident avec le crime en cours est totale et ses dirigeants portent une responsabilité directe. Israël bénéficie d’une aide militaire et politique. Une nouvelle fois les États-Unis protègent Israël en imposant leur veto et encouragent le massacre en cours. Ils réarment Israël et poussent à « éradiquer le Hamas ». L’Union Européenne surenchérit. Les médias, en particulier les médias français, dans leur immense majorité, criminalisent les Palestiniens, assimilés à des terroristes et donnent quasiment exclusivement la parole aux génocidaires et à leurs soutiens.
Dans le monde entier, des manifestations monstres pour soutenir Gaza ont eu lieu, y compris en Grande Bretagne et aux États-Unis. Dans ce dernier pays, Jewish Voice for Peace (JVP) a organisé des manifestations spectaculaires contre le génocide, montrant l’opposition claire d’une partie importante des Juifs états-uniens aux suprémacistes israéliens. Dans le monde arabe, l’ampleur des manifestations a forcé les régimes qui avaient normalisé leurs relations avec Israël ou qui s’apprêtaient à le faire, à changer de politique. Les opinions publiques arabes n’accepteront pas qu’un pays arabe aide Israël à nettoyer ethniquement la Palestine.
En Israël, les manifestations qui avaient eu lieu pour défendre la Cour Suprême ou pour faire condamner Nétanyahou ont montré leurs limites. Sur la question palestinienne, les barrières morales se sont effondrées et il y a un large consensus pour tuer sans retenue. Même divisée, l’extrême droite est largement hégémonique dans l’opinion et ce qui reste de la « gauche sioniste » prône « l’anéantissement » des « terroristes ». Si Israël n’est pas sanctionné, il n’y aura pas de rupture du front intérieur. La gauche anticolonialiste, affaiblie, réagit avec dignité et courage mais est très peu entendue. L’UJFP diffuse sa parole.
En France, le pouvoir, en interdisant les manifestations de soutien à la Palestine et en envoyant plusieurs dignitaires en Israël apporter leur soutien inconditionnel à Nétanyahou, a franchi un pas supplémentaire dans l’attaque contre les libertés fondamentales. Les principaux médias et le pseudo « arc républicain » qui va du Parti Socialiste à l’extrême droite raciste rivalisent pour criminaliser la défense du peuple palestinien et soutenir le génocide en cours.
L’UJFP a participé activement et dans l’unité la plus large, aux manifestations. Avec Tsedek et avec les Israéliens opposés à la destruction de la Palestine, un collectif juif anticolonialiste est désormais largement visible et reconnu au sein du mouvement de solidarité et sur plusieurs réseaux sociaux. Ce collectif réussit ponctuellement à accéder malgré tout aux médias dominants. La parole juive portée par l’UJFP est très attendue et l’UJFP s’efforce de répondre aux nombreuses sollicitations pour faire entendre cette voix juive contre la guerre. Dans de nombreuses villes hors région parisienne, l’UJFP est partie prenante des collectifs qui se sont constitués et sa parole est entendue dans les manifestations, comme dans les autres formes d’activité. L’expression résolue du mouvement de solidarité contre tout dérapage antisémite a été minorée et le plus souvent ignorée par la plupart des médias.
L’antisémitisme, qui est l’histoire intime de beaucoup de membres de l’UJFP, est toujours présent dans notre pays. Mais il est instrumentalisé par le gouvernement et par le CRIF. La politique officielle qui consiste à stigmatiser les Noirs, les Arabes, les Roms, les Musulmans tout en disant que contre les Juifs c’est interdit ne protège pas les Juifs. Au contraire, elle les met en danger. La « manifestation contre l’antisémitisme » du 12 novembre qui comprenait tout ce que notre pays compte d’extrême droite et de racistes de tout poil avait un côté obscène et a joué le rôle de soutien au génocide en cours. L’UJFP se félicite que quelques élus aient résisté à la pression médiatique en n’y allant pas.
La solidarité
Les mêmes dirigeants qui n’ont rien fait pour arrêter les tueurs de l’armée israélienne, essaient de ressusciter la « solution à deux États ». L’UJFP rappelle que les Palestiniens n’ont qu’une seule exigence : que le droit international leur soit appliqué. Cela signifie la liberté (fin de l’occupation, de la colonisation, libération des prisonniers, destruction du mur, fin du blocus de Gaza …), l’égalité des droits pour tous les habitants de la région et la justice (le retour des réfugiés, le jugement des criminels de guerre). La solution étatique viendra après l’obtention de ces droits.
L’impunité d’Israël a déjà largement discrédité la notion de droit international. Choisir une autre voie, comme celle qui est en cours, c’est choisir la destruction du droit international.
L’UJFP a défendu une position de fermeté et d’unité à l’intérieur du mouvement de solidarité en France. Si elle regrette que des associations, syndicats ou partis restent timides et crispés sur des positions qui n’ont plus rien à voir avec l’actualité, elle se félicite de l’évolution de l’AFPS. Dans BDS France, l’UJFP s’est montrée active. Le BDS est plus que jamais une arme pour combattre et délégitimer l’apartheid israélien. L’engagement de nombreuses associations juives dans le monde contre la politique israélienne impose à l’UJFP de revivifier et d’étendre ses liens avec ces associations.
L’UJFP a participé à la tentative de membres du mouvement de solidarité d’entrer à Gaza par l’Égypte. Après des mois de tergiversations, la diplomatie française a accepté de déposer auprès des autorités égyptiennes la demande que 7 solidaires (dont un député) entrent à Gaza par Rafah. Ces solidaires étaient au Caire quand la guerre a éclaté, et cette tentative n’a pas pu aboutir.
Depuis 2016, l’UJFP travaille en solidarité avec les paysans de la bande de Gaza. Les grandes réalisations, dont certaines en coopération avec l’association Humani’Terre, ont probablement presque toutes été détruites (c’est le cas de la pépinière qui était utilisée par un millier de paysans). Mais les liens établis par l’UJFP pour apporter une aide immédiate à Gaza existent. L’UJFP a un correspondant à Gaza, venu trois fois en France ces dernières années et plus que jamais très actif.
L’UJFP depuis 2018, travaille à la publication des Gaza Stories (225 épisodes réalisés par Iyad Alasttal sur la vie quotidienne à Gaza avant le massacre en cours).
La nouvelle souscription lancée en novembre 2023 a un très grand succès. L’UJFP a trouvé les moyens d’envoyer à Gaza des sommes de plus en plus importantes. Les destinataires pour l’instant sont les réfugiés autour de Nuseirat (nourriture, chaussures, vêtements chauds, tentes) et l’association Ibn Sina (nourriture, eau, aide psychologique pour enfants traumatisés, aide aux hôpitaux …).
L’UJFP a gagné de nombreux nouveaux adhérents et les dons qui affluent attestent d’une crédibilité importante.
L’UJFP participe à l’action judiciaire internationale lancée auprès de la Cour Pénale Internationale (CPI) pour (enfin) inculper les criminels de guerre israéliens.
Elle participe activement à la campagne pour la libération de Georges Abdallah qui a déposé en juin dernier une nouvelle demande de libération conditionnelle.
L’UJFP a activement participé à la tournée en France de Mariam Abu Daqqa qui a été hébergée
- Marseille et à Paris chez des militants de l’UJFP. Elle a vigoureusement protesté contre l’expulsion ignominieuse de Mariam le 10 novembre. Avec des avocats, l’UJFP participe au combat judiciaire pour faire annuler l’expulsion et la perte du visa Schengen de Mariam.
Dans le combat idéologique indispensable il y a :
- la diffusion des Parcours de Juifs antisionistes en France et de Une parole juive contre le racisme.
- le livre Antisionisme, une histoire juive, avec des textes de Juifs qui se sont exprimés contre le sionisme depuis plus d’un siècle, recueillis par trois militantes de l’UJFP. Il est fondamental de le diffuser et de multiplier les conférences de présentation en librairie comme par la présence des livres dans les manifestations en salle.
- Le film « Yallah Gaza » de Roland Nurier qui montre ce qu’était Gaza avant la destruction actuelle. Le film avait dépassé les 10000 entrées le 1er décembre. L’UJFP soutient le film, a participé à la tournée (avec danseurs de dabké) pour présenter le film en avant-première et aide Iyad Alasttal (auteur des images tournées à Gaza) et sa famille.
Antiracisme
Le projet de loi Darmanin contre les immigrés et les Sans Papiers aura vu plusieurs groupes parlementaires faire le jeu de l’extrême droite en rivalisant dans la stigmatisation et les mesures répressives. L’UJFP dénonce le racisme d’État qui multiplie les lois nouvelles et détruit chaque jour un peu plus les libertés fondamentales. L’année aura vu de nouvelles violences policières impunies comme le meurtre de Nahel et une explosion de colère légitime dans toute la France.
Le gouvernement et le ministre Darmanin ont poursuivi leur politique de dissolution d’organisations et les interdictions de manifestations et de réunions publiques. La plupart des grands médias rivalisent dans l’islamophobie sur le thème musulman = terroriste.
La lutte contre le racisme sous toutes ses formes est une priorité absolue à l’heure où l’extrême droite se renforce partout dans le monde. L’antisémitisme a été considéré comme un racisme à part » après l’extermination nazie. L’UJFP considère qu’il ne l’est pas. L’UJFP réagit contre tous les actes racistes, d’où qu’ils viennent et le fait avec tous les racisés. Il y a une persistance en France d’actes antisémites et il y a un sentiment de peur et d’anxiété. Il y a des actes avérés (agressions, tags, profanations …) mais il ne semble pas qu’il y ait une explosion d’actes antisémites, ni de force politique organisée dont l’antisémitisme figure officiellement au programme.
Ces actes sont recensés par un gouvernement ou des institutions comme le CRIF pour qui scander « Palestine vivra, Palestine vaincra » ou être antisioniste est aussi antisémite et est vraisemblablement inclus dans le décompte des actes antisémites. La confusion est organisée par des pompiers pyromanes. Combattre l’antisémitisme avec des racistes et des gens qui soutiennent un génocide n’a aucun sens. Faire de l’antisémitisme la grande question du moment, y compris en accusant la gauche d’être antisémite, c’est de l’instrumentalisation.
Les tâches de l’UJFP
Lutter contre le racisme, c’est prôner le « vivre ensemble dans l’égalité des droits », en France comme au Proche-Orient. C’est la voie choisie par l’UJFP. L’UJFP sera partie prenante des mobilisations contre la loi Darmanin comme elle sera présente dans les manifestations de sans-papiers, même si nous n’avons pas toujours réussi à être aussi actifs qu’il aurait été souhaitable ces derniers mois.
La destruction de la bande de Gaza ramenée des décennies en arrière, la présence de fascistes affirmés à la tête de l’État d’Israël, la montée de l’extrême droite en France, l’apparition avec bonheur du groupe Tsedek, le vieillissement des membres de la coordination nationale, la crédibilité nouvelle de l’UJFP, l’explosion du nombre des utilisateurs du site et des réseaux sociaux de l’UJFP et l’attente des nouveaux adhérents, tout ceci nécessite un mode de fonctionnement renouvelé.
Des propositions seront présentées par la coordination nationale lors de l’assemblée générale.
La Coordination Nationale de l’UJFP le 10 décembre 2023