Qui menace la marche pour la liberté de Gaza ?

par Nahla Chahal ( [i]Al Akhbar[/i] 22-12-09)

Une semaine avant la date de la Marche pour la « Liberté de Gaza », le comité international d’organisation de l’initiative s’est vu signifier de la part du Ministère des Affaires Etrangères égyptiens que « [i]la frontière restera fermée jusqu’au mois prochain[/i] ». Cette réponse est ambigüe, surtout qu’elle fait suite à de longues négociations, qui ont duré plus de deux mois, entre les autorités égyptiennes et le comité international qui représente l’ensemble des délégations venues du monde entier. Négociations qui se sont déroulées dans la plus grande coopération. Ce comité est à l’origine de l’appel lancé pour la Marche dont l’objectif est de commémorer le premier anniversaire de l’agression israélienne sur Gaza. La marche est non violente et essentiellement humanitaire. Elle vise à constater la situation à Gaza « Un an après ». elle voudrait apporter aux gazaouis un message de solidarité, et les soutenir face à une situation épouvantable qu’ils endurent. Les informations concernant l’identité de chaque participant, dont le nombre a atteint les deux mille personnes, ont été réclamées et transmises aux autorités égyptiennes. Tout comme il leur a été demandé de se soumettre à l’ensemble des conditions décidées par ces autorités, ce que tous les participants ont admis. Ils ont suivi des séances d’information et d’encadrement pour assurer le bon déroulement de l’événement. Ils ont également pris en charge, individuellement et personnellement, le coût de ce voyage (billets d’avion et frais d’hébergement). Les Internationaux viennent de toutes les régions du continent américain, d’Europe, d’Inde, du Japon et d’ailleurs. Y participent à la marche de nombreuses personnalités intellectuelles, artistiques et politiques, les représentants d’organisations qui travaillent depuis des années à construire la solidarité avec la Palestine, mais aussi de simples citoyens touchés par la souffrance du peuple palestinien.

Il a été admis que la Marche ne fait que traverser l’Egypte. Aucune activité publique n’aura lieu durant la traversée du pays, afin d’éviter les difficultés avec les autorités égyptiennes. Toutes les sollicitations de rencontre émanant de l’opposition égyptienne, qu’elle soit politique ou sociale, ont été déclinées par le comité international, qui a expliqué que ce choix visait à préserver le caractère « international » de la marche et son unique objectif : arriver à Gaza ! Et ne pas laisser les donnes complexes de la réalité égyptienne entraver la réalisation de cet objectif. Ce positionnement a été compris et acceptée par ces mouvements de manière responsable et respectueuse de notre démarche.

Le comité d’organisation, qui gère les négociations avec les autorités égyptiennes au Caire ont réaffirmé leur intention de se soumettre à l’ensemble des recommandations qui pourraient être réclamées par les autorités égyptiennes afin de faciliter la logistique du transport, des modalités de contrôle et le respect des contraintes horaires d’entrée et de sortie de la bande de Gaza. Les différentes organisations participantes ont visité chacun dans son pays les ambassades égyptiennes afin de clarifier leurs positions. Le comité a également obtenu le soutien de l’ensemble des représentations officielles palestiniennes de tous les pays d’où partent les participants. Des pressions ont également été fait sur les ministères des affaires étrangères des différents pays pour leur demander de soutenir cette initiative auprès des autorités égyptiennes.

Dans le même temps, une deuxième marche internationale partira de Jérusalem en direction de Gaza, tout en sachant qu’elle ne pourra pas atteindre le point de passage d’Erez, ni entrer dans la bande de Gaza. Participeront à cette marche des militants internationaux, des israéliens anticolonialistes, des palestiniens de 48. Contrairement à la première Marche, vise à être symbolique du fait qu’aucune demande d’autorisation ni aucune coordination n’ont eu lieu avec les autorités israéliennes. Il s’agira ici de condamner les autorités israéliennes et de leur faire porter l’entière responsabilité des événements de Gaza de l’année dernière, marqués par les destructions massives, les bombardements au phosphore qui s’accompagnent aujourd’hui d’un blocus total visant à annihiler toute vie normale, à imposer la faim et l’humiliation au jour le jour.

Le Comité International, a su faire preuve de maturité politique exceptionnelle, parce qu’il été capable de différencier les deux situations, malgré la ressemblance formelle de la fermeture des frontière des deux côtés : il a clairement désigné Israël comme étant le responsable essentiel de la situation. C’est uniquement sur ce mot d’ordre que s’est construite la Marche, malgré les convictions de plusieurs organisations constituantes de la Marche, concernant les alternatives possibles à la gestion actuelle par les pays voisins de la Palestine. Ces convictions ont été tues pour faire aboutir la Marche.

L’ensemble des délégations participant à la marche mettront également en exergue la complicité de la communauté internationale qui traite Israël d’une façon exceptionnelle et la laisse jouir d’une totale impunité en refusant de la soumettre à d’éventuelles sanctions, lui permettant ainsi de continuer à agir comme elle le fait. La dernière en date de cette complicité étant la récente promesse faite par le gouvernement britannique à Netanyahou de modifier la loi afin d’empêcher le principe de « compétence universelle » qui permet aux tribunaux britanniques de recevoir les procédures pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, sans exiger l’intérêt personnel d’une personne lésée. Cette promesse a été faite suite à la délivrance d’un mandant à l’encontre de Tsipi Livni par un juge anglais. Et c’est un exemple parmi bien d’autres.

la voix pacifique et politique de cette marche sera-t-elle entravée par les craintes sécuritaires et les petites considérations ? La Marche pour la liberté de Gaza pourra t elle se dérouler sans entraves et entrer dans la bande de Gaza les 27, 28 et 29 décembre pour commémorer, avec les gazaouis l’avènement de la nouvelle année, dans une gigantesque manifestation commune ? Les participants internationaux pourront ils aller leur transmettre leur message, à savoir que les crimes commis ne peuvent être oubliés et que les gazaouis, et l’ensemble des palestiniens, ne sont pas seuls ? Car voilà bien l’objectif des organisateurs de cette initiative et l’objet de la Marche, et c’est ce qui est attendu.
(publié le mercredi 23-12-09 sur le site www.protection-palestine.org.)

    Tous les dossiers