Houria Bouteldja
12 novembre ·
Il fut un temps, pour jeter l’anathème sur les Musulmans, il fallait les accuser de négationnisme. Ils étaient réputés, tels une nuée de Faurrisson en puissance, être des négationnistes patentés. L’accusation ne tient plus, puisque porter cette étoile à 5 branches, c’est au contraire, non seulement reconnaître l’antisémitisme et ses conséquences mais souligner une analogie (avec toutes les limites objectives de cette comparaison) avec les années trente.
Le préjugé de négationnisme étant pulvérisé, quel est ce nouveau crime dont les Musulmans portant étoile sont-ils coupables ?
Limpide : comparer la condition des Juifs d’hier à celle des Musulmans aujourd’hui, c’est rendre les Juifs à l’Histoire, réinsérer leur oppression dans sa matérialité historique, et surtout redonner la possibilité à tout un chacun d’identifier les causes politiques et économiques du génocide, réaffilier le crime nazi dans la longue histoire des crimes occidentaux et par conséquent comprendre les mécanismes qui amènent à la persécution des Musulmans d’aujourd’hui. Bref : cela permet d’identifier un coupable qui n’est pas « le mal », ni une « bête immonde », mais un système qui perdure : la modernité capitaliste dont les représentants sont ceux la-même qui ouvrent les vannes de l’islamophobie pour juguler une crise sociale et économique qui s’annonce brutale et mener à bien un programme néo-libérale dicté par les classes dirigeantes.
Au lendemain de la marche du 10 novembre, ils sont nombreux à se prendre les pieds dans les 5 branches de cette étoile, à s’étouffer dans leurs vitupérations et à cracher leur venin sur une forme d’identification qu’il aurait fallu saluer pour ce qu’elle est : une fraternisation entre Juifs et Musulmans, dans la reconnaissance mutuelle d’une expérience commune à bien des égards. L’étoile jaune à 5 branches agit comme un acte d’accusation : plus que les criminels d’hier, elle pointe du doigt les responsables moraux de la barbarie qui vient.