Ce qui s’est produit à Aurillac (Cantal) à la fin du mois de mars 2018, montre comment un organisme gouvernemental censé lutter contre le racisme, la DILCRAH (Délégation Interministérielle à la Lutte Contre le Racisme, l’Antisémitisme et la Haine anti-LGBT), peut en arriver à combattre l’antiracisme, avec des méthodes coercitives.
Le 28 novembre 2017, l’Inspectrice d’Académie adresse au MRAP du Cantal une lettre autorisant la venue d’un conférencier de l’UJFP dans deux lycées d’Aurillac, les lycées Émile Duclaux et Jean Monnet, dans le cadre d’une quinzaine contre le racisme, prévue en mars 2018. Les fonctions du conférencier, alors co-président de l’UJFP, sont indiquées dans ce courrier.
Et pourquoi l’Éducation nationale n’aurait-elle pas autorisé ces conférences ? Le conférencier, Dominique Natanson, est militant antiraciste de longue date et un pédagogue reconnu de l’enseignement de la Shoah. Auteur de J’enseigne avec l’Internet la Shoah et les crimes nazis et animateur du site Internet Mémoire juive & Éducation qui répond aux questions des adolescents sur le génocide juif, il a été formateur d’enseignants. C’est un contributeur connu de la revue Les Cahiers Pédagogiques. Il a coordonné Une parole juive contre le racisme de l’UJFP et participe à des interventions dans les quartiers et dans les établissements scolaires, comme l’UJFP s’y est engagée auprès du CGET (Commissariat général à l’égalité des territoires) qui a en partie financé la publication d’Une parole juive contre le racisme .
Le conférencier prépare avec les enseignants concernés une trame d’intervention. Les professeurs préparent cette conférence avec leurs élèves… Il est prévu de partir de l’histoire de la Shoah pour aller vers les formes actuelles du racisme : islamophobie, négrophobie, antisémitisme, antitsiganisme, migrants…
Mais quatre jours avant l’intervention, la préfecture, par un simple coup de téléphone, interdit ces conférences. Aucun motif n’est donné au président du MRAP, pas plus qu’aux proviseurs et aux enseignants. La seule chose qui sera dite, c’est que la DILCRAH, nationalement, a demandé l’interdiction, que « le conférencier n’est pas admis ». L’Inspectrice d’Académie ne connaît pas plus la raison de cette interdiction. Un IPR (Inspecteur pédagogique régional) d’Histoire-Géographie dira, après coup, que cette conférence aurait dû se tenir normalement.
Dominique Natanson s’est rendu à Aurillac où il a tenu, le 27 mars au soir, une réunion publique et reçu le soutien des syndicats enseignants et d’organisations antiracistes et politiques d’Aurillac.
Après les « délinquants solidaires », va-t-on vers les « délinquants pédagogiques » ?
Il faut chercher la raison de tout cela dans la dérive sectaire de la DILCRAH, dirigée par Frédéric Potier, un proche de Manuel Valls et cofondateur avec Laurent Bouvet du Printemps républicain. Ainsi, des pressions ont été faites sur le président du MRAP du Cantal, qui avait demandé une subvention pour cette activité pédagogique, pour qu’il reformule sa demande de subvention à la DILCRAH en éliminant l’UJFP.
En ces temps où le tri et la sélection sont à l’ordre du jour du gouvernement, la DILCRAH effectue donc un tri entre les bons et les mauvais Juifs. Elle veut faire taire ceux qui ne soutiennent pas les crimes de l’État d’Israël, ceux qui ne hiérarchisent pas les différentes formes du racisme, qui sont solidaires des victimes de l’islamophobie, qui définissent les violences policières contre les Noirs ou les Rroms comme un « racisme d’État ».
L’UJFP est fière de l’action antiraciste qu’elle mène.
Contre toutes les officines racistes, contre les pressions de toutes origines, contre l’intolérance d’État, avec le soutien d’enseignants, de travailleurs sociaux, d’animateurs et de militants des quartiers populaires, l’UJFP continuera à mettre en avant un antiracisme solidaire.
On ne nous fera pas taire !
Le Bureau national de l’UJFP, le 21 avril 2018