Poème « Carte d’identité » de Mahmoud Darwich : apologie du terrorisme ?

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Rima Hassan, auditionnée pendant 11h30 pour son soutien à la Palestine a rapporté : « Durant cette audition on m’a demandé de m’expliquer sur la publication d’un poème de Mahmoud Darwich, « Carte d’identité », parce que le dernier extrait de ce poème serait trop « violent » et « menaçant ». »

Face à l’oppression coloniale, il n’y a pas de doute sur qui détient le monopole de la violence. Mahmoud Darwich est mort en 2008 : il n’était plus question de menace depuis longtemps. Suite à la Nakbah, l’expropriation des Palestinien.ne.s, l’enfermement sans inculpation ni procès, l’apartheid, la violation de pas moins de 220 résolutions de l’ONU, le colonialisme de remplacement qu’est le sionisme a toujours été on ne peut plus efficace pour éliminer les Palestinien.ne.s.

Aujourd’hui, les camp de réfugiés de Jénine, Tulkarem et Nour (Cisjordanie occupée) sont complètement vidés de leurs habitant.es, plus de 40 000 résident.es ont été expulsé.es. Israël a complètement rasé Rafah, Netanyahou veut créer un « camp de concentration ». Alors que le génocide s’amplifie le Hamas est traité de « rats ». Nous assistons à une inversion totale des valeurs, un génocide a lieu sous nos yeux prétendument au nom de la lutte contre l’antisémitisme.

Rima Hassan a donc décidé de republier « Carte d’identité » : nous aussi.  Écrit en 1964 en Palestine-occupée, ce poème est aussi connu que celui d’Éluard, Liberté, écrit dans la France-occupée en 1942, diffusé sous le manteau.

Totale solidarité à Rima Hassan.

La Coordination nationale de l’UJFP, le 26 avril 2025

Poème de Mahmoud Darwich Carte d’identité

Inscris
Je suis Arabe
Le numéro de ma carte est cinquante mille
J’ai huit enfants
Et le neuvième viendra… après l’été
Te mettras-tu en colère ?

Inscris
Je suis Arabe
Je travaille avec mes camarades de peine
Dans une carrière
J’ai huit enfants
Pour eux j’arrache du roc
La galette de pain
Les habits et les cahiers
Et je ne viens pas mendier à ta porte
Je ne me rabaisse pas
Devant les dalles de ton seuil
Te mettras-tu en colère ?

Inscris
Je suis Arabe
Mon prénom est commun
Je suis patient dans un pays
Bouillonnant de colère
Mes racines…
Fixées avant la naissance du temps
Avant l’éclosion des siècles
Avant les cyprès et les oliviers
Avant la croissance végétale
Mon père…
De la famille de l’araire
Et non des seigneurs de Noujoub
Mon grand-père, un paysan
Sans arbre généalogique
Il m’a appris les mouvements du soleil
Avant la lecture
Ma maison
Une hutte de gardien
Faite de roseaux et branchages
Es-tu satisfait de ma condition ?
Mon nom est commun

Inscris
Je suis Arabe
Cheveux… noirs
Yeux… marron
Signes distinctifs
Sur la tête un keffieh tenu par une cordelette
Ma paume, rugueuse comme le roc
Écorche la main qu’elle empoigne
Mon adresse :
Je suis d’un village perdu, sans défense
Et tous ses hommes sont au champ et à la carrière…
Te mettras-tu en colère ?

Inscris
Je suis Arabe
Tu m’as spolié des vignes de mes ancêtres
Et de la terre que je cultivais
Avec tous mes enfants
Et tu ne nous as laissé
Ainsi qu’à notre descendance
Que ces cailloux
Votre gouvernement les prendra-t-il aussi
Comme on le dit ?

Alors
Inscris
En tête de la première page
Moi je ne hais pas mes semblables
Et je n’agresse personne
Mais… si jamais on m’affame
Je mange la chair de mon spoliateur
Prends garde… prends garde
À ma faim
Et à ma colère !

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