Nous pourrions être les prochains

Par Nour Khalil AbuShammala, le 19 mai 2021

Israël a bombardé à plusieurs reprises la ville de Gaza au cours de la semaine dernière. (Ashraf Amra APA images)

J’ai passé une nuit de plus sous les attaques des Israéliens sur la ville de Gaza. C’était terrifiant.

Pour l’instant, les dégâts causés sur notre maison restent mineurs. Mais le bruit des explosions et les vibrations qu’elles provoquent peuvent déconcerter même les plus forts d’entre nous.

Ma famille, comme des centaines de milliers d’autres familles, a été chassé de sa maison pendant la Nakba, le nettoyage ethnique de 1948 de la Palestine. Nous sommes maintenant enfermés dans la minuscule Gaza et n’avons nulle part où aller.

Il est difficile d’exprimer pleinement l’horreur de ce à quoi nous sommes confrontés. Tous, nous craignons d’être la prochaine cible.

Nous voyons les images des voisins, y compris des enfants et des nourrissons, tirés des décombres. Certains sont morts, d’autres en vie.

Nous sommes bien conscients que nous pourrions être les prochains.

Les vies sont précieuses

De nombreux journalistes internationaux font leurs reportages depuis Israël, et non pas d’ici, à Gaza. Et les journalistes qui se trouvent dans Gaza sont souvent attaqués.

Israël a fait exploser les bureaux des médias à Gaza. Ce qui peut être considéré comme une tentative délibérée visant à empêcher que les images sinistres des attaques d’Israël ne soient diffusées à travers le monde.

J’ai cessé de penser à ma propre vie.

Mon seul souhait est de mourir avec tout mon corps intact. Je détesterais être déchiquetée par les armes étatsuniennes qu’Israël est en train de nous envoyer.

Il y a quelques nuits, Israël nous a soumis à toute une série de frappes aériennes, en cinq minutes. Ces cinq minutes nous ont paru être cinq années de terreur.

Nos vies sont précieuses et nous méritons d’être traités comme des êtres humains. Nous ne sommes pas des nombres.

Et pourtant, c’est ainsi que nous sommes présentés par bien des médias internationaux. Dix tués ici, des dizaines là.

Les Américains ne comprendront jamais notre situation aussi longtemps que l’ « analyse » présentée dans leurs journaux et sur leurs écrans TV restera aussi superficielle. Il est rarement fait mention des problèmes de fond.

Nous nous sentons effrayés et en danger.

Nous avons peur de perdre des personnes que nous aimons ou que nos maisons soient détruites – avec tous les souvenirs qu’elles renferment.

Mes aïeux ont perdu leurs maisons. Les émotions qui accompagnent cette perte – et la crainte de la perte – sont intenses.

Le traitement des Palestiniens répond à la définition du génocide par les Nations unies, sans parler de l’apartheid et du nettoyage ethnique.

Il est peu probable que nos peurs et ce que nous vivons soient correctement documentés, que nous vivions ou que nous mourrions.

Joe Biden, le président des États-Unis, ne ressent pas notre peur ou ne connaît pas notre dépossession. L’Union européenne ne fait que des déclarations vides de sens – à répétition.

Est-ce mal d’être palestinien ?

J’étudie le droit. Je me souviens avoir appris le droit humanitaire et sa pertinence pour les Palestiniens.

Notre professeur évoquait toutes les conventions et tous les traités qui, en théorie, défendent nos droits. Alors j’avais demandé : « Pourquoi les Palestiniens sont-ils confrontés à toutes ces injustices si ces lois sont là pour nous protéger ? ».

Je me pose toujours cette question.

Est-ce mal d’être palestinien ?

Partout, les peuples veulent que leurs droits soient respectés. Les droits de vivre sur leur propre terre, de vivre en sécurité, de voyager librement et de passer la journée sans la crainte d’être tué.

L’occupation israélienne « justifie » ses actions barbares contre Gaza en prétendant ne viser que le Hamas. Une grande partie du monde occidental applaudit et les dirigeants de trop de pays arabes et musulmans restent silencieux.

Biden et une grande partie du Congrès étatsunien soutiennent qu’Israël ne fait simplement que se défendre. Nul ne parle de notre droit à nous défendre contre un État dirigé par des criminels.

Israël est un État qui a mis en vigueur un système d’apartheid depuis bien des décennies.

Israël commet des crimes contre les Palestiniens depuis sa formation. Avant même que l’État d’Israël soit établi, les milices sionistes soumettaient déjà les Palestiniens à un nettoyage ethnique.

Le droit humanitaire international est censé protéger les opprimés et les dépossédés. Mais les gouvernements du monde entier sont plus enclins à soutenir l’occupant et le dépossesseur.

Personne ne vient à notre secours ou ne défend nos droits. Nous sommes seuls ici et en souffrances, livrés à nous-mêmes avec de nombreux pays puissants qui vont jusqu’à s’opposer à notre droit même de nous défendre contre la puissance militaire grotesque des Israéliens.

Les dirigeants dans le monde se contentent tout à fait de regarder ailleurs alors que nous sommes bombardés.

Qui va défendre nos droits aux Nations unies et devant la Cour pénale internationale ?

Source : The Electronic Intifada

Traduction BP pour l’Agence média Palestine

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