Non aux discriminations, l’islamophobie est un racisme.
Une fois de plus, le principe de laïcité est totalement dévoyé afin de stigmatiser les mamans portant le foulard et les musulmanes et musulmans en général.
Le dernier évènement est l’agression odieuse d’une maman par un élu d’extrême droite en plein Conseil Régional. Ce qui nous donne néanmoins l’occasion de découvrir avec perplexité le féminisme de dernière minute de Blanquer, pour qui « le voile n’est pas souhaitable » car ce n’est pas « sa vision de l’émancipation de la femme ». Malheureusement ce féminisme de façade est depuis trop longtemps l’argument-prétexte d’hommes et de femmes pour déverser leur haine islamophobe et raciste.
Rappelons que l’article 1er de la loi de 1905 assure la liberté de conscience et le libre exercice des cultes. Il s’agit de protéger les citoyennes et les citoyens contre toute discrimination. Les libertés de conscience et de pratique supposent la liberté d’expression. La loi ne renvoie certainement pas la pratique religieuse au domaine de l’intime et ne demande pas à ce que nous soyons toutes et tous des clones, habillé.e.s et pensant de la même manière.
L’article 2 précise que c’est l’État qui est neutre, et donc ses représentants également. L’espace public n’est pas concerné. En 2013, le Conseil d’État réaffirme clairement que les parents participant aux sorties scolaires ne sont pas soumis au devoir de neutralité. Enfin la Convention européenne des droits de l’homme garantit la liberté de conscience, de pensée et de religion.
Au-delà du droit, qui est clair dans la lettre et dans l’esprit, la stigmatisation des musulmanes et des musulmans est un sujet politique qui pourrit le débat public depuis plus de trente ans : elles et ils sont les boucs émissaires qui visent à détourner des vraies questions, sociales et politiques.
Cet été, Macron, en difficulté face au mouvement des gilets jaunes, a choisi de relancer le « débat » sur l’immigration dans cette optique. Il apporte sa pierre à l’édifice de décennies de discours anti-immigration et antimusulmans, qui imprègnent aujourd’hui l’ensemble du champ politique et médiatique.
Les discours de haine de l’autre ont maintenant droit de cité, sous couvert de défendre une identité française immuable et totalement fantasmée.
La réalité des chiffres et des phénomènes, pourtant très étudiés par les démographes, sociologues et autres politologues, n’a plus aucune importance. Seules comptent la manipulation et la désinformation. A l’instar des conditions d’accueil, ou plutôt de non-accueil des migrants en France, laissés à la rue, harcelés par la police, et sans aucune aide ou revenus, les politiques voudraient nous faire croire qu’on les accueille trop bien et qu’on encourage « l’appel d’air ».
Les musulmanes et les musulmans seraient des millions, organisés pour « grand remplacer » la population 100 % française et ne seraient pas capables de s’intégrer, voulant imposer la charia au pays des lumières.
Aujourd’hui, et le mouvement des gilets jaunes en est une preuve éclatante, la France souffre de la précarité, du chômage de masse, de misère, des politiques des gouvernements successifs qui ont orchestré la casse des services publics (on pense notamment à l’école, à l’hôpital, à l’enseignement supérieur), la destruction de notre système de retraites. Et que fait le pouvoir ? Il provoque un débat sur le voile !
Nous qui vivons dans les quartiers populaires, vivons au jour le jour depuis des années les violences policières et les discriminations de tous ordres. La casse des services publics nous impacte en premier lieu. Et le problème ce sont les « mamans voilées » qui accompagnent des enfants au parc ou au musée ?
Non, le problème ce sont les violences policières qui éclatent au grand jour depuis une année, malgré l’impunité dont bénéficient les forces de l’ordre. Où est la justice sociale dans ce pays, quand c’est Assa Traoré, qui demande justice et vérité pour la mort de son frère Adama, mort dans une gendarmerie il y a trois ans, qui se retrouve convoquée par la police sous des prétextes scandaleux.
Où est la justice lorsque l’IGPN déclare qu’il n’y a pas de problème à ce que 151 enfants de Mantes-la-Jolie aient été mis à genoux et humiliés pendant plusieurs heures par la police ? Ces images ont fait le tour du monde et sont la honte de notre pays. Comment se fait-il que dans le climat de fascisation de la société et des esprits, ce soient des militants antifascistes comme Antonin Bernanos qui soient en détention pendant des mois pour une pseudo-affaire de bagarre de rue, alors qu’on déroule le tapis rouge médiatique pour des gens comme Zemmour ? Jusqu’où va-t-on aller dans un ultra-libéralisme économique qui détruit nos vies et notre planète ? Et le problème serait un morceau de tissu sur la tête de certaines femmes ?
Les femmes musulmanes n’ont pas besoin d’être libérées, ou éduquées, elles sont capables de faire leurs choix. Le port du foulard n’est pas univoque, elles peuvent choisir de le porter ou de ne pas le porter pour diverses raisons, qui ne regardent qu’elles, et n’ont pas à se justifier de leurs choix. Les féministes se sont-elles battues pour que nous soyons toutes obligées de porter une jupe courte ou pour que nous soyons toutes libres de nos corps et de nos choix vestimentaires ?
Ce processus de déshumanisation de celles d’entre nous qui portent le foulard est total, puisque personne ou presque ne s’interroge sur ce qu’elles ressentent, ce que vivent leurs enfants qui sont traumatisés par le traitement infligé à leurs mamans, le tout dans une école qui ensuite leur dispensera le catéchisme républicain « liberté, égalité, fraternité », et le décalage total entre ce discours qu’on leur sert et ce qu’ils observent chaque jour.
De quelle force et de quelle dignité doivent faire preuve ces mères de famille pour tenir le coup, pour leurs enfants.
Nous appelons la gauche politique, syndicale et sociale ainsi que certaines féministes à faire leur introspection, car ils et elles ont participé, par leurs propos contre les femmes qui portent le foulard notamment, à faire le lit de ce climat nauséabond que plus personne ne peut nier.
Nous appelons au réveil des consciences individuelles mais aussi à un réveil politique collectif. Des heures sombres nous reviennent en mémoire quand nous voyons les images des jeunes de Mantes agenouillés, des appels à la délation de la part des plus hautes instances de l’État, de certains présidents d’université et des médias qui débattent sur la signification de la barbe.
Les musulmanes et les musulmans, et singulièrement les mamans qui portent le foulard, subissent de plein fouet cette violence, dans la rue, sur leur lieu de travail, à l’école, dans les médias.
Au lieu de regarder ce que pointe le doigt inquisiteur, laïcard et nationaliste, qui pointe l’autre, le différent, l’étranger, regardons plutôt qui pointe ce doigt, ce gouvernement et cette classe politique qui précarisent et des médias qui relaient complaisamment.
Cela sape les bases du vivre ensemble, pour le bénéfice d’un système économique au service de quelques-uns.
Non, l’ennemi n’est pas le musulman, le migrant !!!
Nous nous joignons à l’appel des mamans du Mantois qui appellent à un grand rassemblement contre l’islamophobie samedi 19 octobre à 14 heures à République.
Nous marcherons également derrière elles et leurs enfants, pour la justice et la dignité, le 8 décembre à 14 heures au départ de Barbès.
Communiqué du Collectif Mamans toutes égales.