Par Raphaël Porteill
Pierre Stambul, un des porte-parole de l’UJFP, est l’auteur de plusieurs ouvrages sur la question du sionisme et de la Palestine. Dans son dernier livre, le propos est toujours très engagé et pourra sans doute heurter quelques sensibilités car il est aussi, surtout, un propos critique et lucide sur ce que recouvre le sionisme. Il en retrace l’histoire en soulignant avec force que le discours dominant n’est pas loin s’en faut le discours des réalités du sionisme. Pour l’auteur, l’histoire du sionisme est trop souvent appuyée sur des mensonges et si le sionisme est bien une forme de nationalisme, il est aussi une idéologie criminelle en ce qu’il entend réduire la présence palestinienne en « Terre sainte » en vue de son appropriation. En cela, il considère que c’est aussi une idéologie suicidaire car une injure à l’histoire et la mémoire des Juifs.
Ce livre fait œuvre utile en démontrant que le comportement de ceux qui prétendent parler au nom des juifs est devenu criminel et profanateur de la mémoire du judaïsme, laïc ou religieux. Dans ce sens, l’auteur souligne que l’État d’Israël, en tant qu’État juif selon la loi de juillet 2018, et déjà auparavant, opprime, discrimine, humilie, contrôle, réprime, torture et tue,les palestiniens, dans une version génocidaire depuis octobre 2023.
Les vingt chapitres, qui ordonnent le livre sont de tailles et de contenus variables (et auraient pu être organisés de manière différente), exposent de manière claire les questionnements principaux relatifs au sionisme aussi bien dans sa dimension historique revisitée pour la circonstance que dans celui du champ politique (sionisme de gauche —de droite) que dans sa dimension contemporaine en expliquant son rôle dans la construction de l’État d’Israël et par voie de conséquence ses effets directs sur les Palestiniens, ignorés, invisibilisés et plus récemment génocidés. L’auteur invite aussi à réfléchir à l’antisémitisme et égratigne largement tous ceux et toutes celles qui, en France, assimilent antisionisme et antisémitisme en leur disant qu’ils font fausse route : combattre l’antisémitisme et soutenir les droits du peuple palestinien, c’est une seule et même lutte.
Pierre Stambul porte également un regard critique sur le processus d’Oslo (considéré comme une illusion), l’histoire des Palestiniens (entre exil, expulsion, fragmentation et résistances) ainsi que la nature de l’État israélien (État juif, démocratique ou d’apartheid ?) de sorte, dans les deniers moments de l’ouvrage, à replacer le 7 octobre 2023 dans un contexte sociohistorique plus large. Ce faisant, il invite à aussi réfléchir sur le rôle des autres États (dont les États Arabes) : complices ou acteurs d’un génocide dont l’auteur ne tait en aucun cas la dramatique réalité. Reste pour lui une ultime question : comment en sortir après cette (nouvelle) séquence meurtrière ? La réponse est, selon lui, conditionnée à la capacité du peuple palestinien à rester uni et à la solidarité de la société civile internationale, moyens de faire appliquer le droit international, imparfait certes, mais fondement d’une grammaire commune, d’un avenir commun.
Cet ouvrage est donc fort utile pour mieux faire face à la propagande dominante qui tend à criminaliser tous les soutiens aux droits des palestiniens, qui réduit à néant toute discussion. Il est incontestablement un outil d’éveil citoyen et humaniste.
Editions Acratie, La Bussière, 2024, 180 p., 14 €)
Notes de lecture parues dans la revue Recherches internationales, n° 131, Hiver 2024
Raphaël Porteilla
Pierre Stambul s’exprime sur son dernier ouvrage « Du projet sioniste au génocide »
