Mise à jour de la situation humanitaire #235 | Bande de Gaza

Le 5 novembre 2024

(extraits)

Faits marquants

  • Depuis près d’un mois, les autorités israéliennes bloquent toutes les tentatives des organisations humanitaires pour livrer de la nourriture aux habitants des zones assiégées du gouvernorat de Gaza Nord.
  • Dans le centre et le sud de Gaza, plus de 100 cuisines produisant 400 000 repas par jour risquent de fermer en raison de pénuries d’approvisionnement.
  • La situation des soins de santé dans le nord de Gaza reste critique : l’hôpital Kamal Adwan a été touché à deux reprises au cours de la semaine écoulée et l’hôpital Al Awda s’est vu refuser l’acheminement de fournitures vitales.
  • Plus de 42 millions de tonnes de décombres et une grande concentration d’engins explosifs dangereux constituent une menace imminente pour les civils, tandis que l’entrée de personnel et d’équipements spécialisés et la conduite d’activités de neutralisation des munitions explosives sont restreintes.
  • Dix pour cent des journalistes travaillant à Gaza ont été tués depuis octobre 2023, rapporte le Syndicat des journalistes palestiniens, alors que les autorités israéliennes interdisent toujours l’entrée des journalistes étrangers.

Évolution de la situation humanitaire

  • Des bombardements israéliens aériens, terrestres et maritimes continuent d’être signalés dans la bande de Gaza, entraînant de nouvelles victimes civiles, des déplacements et la destruction d’infrastructures civiles. Dans le gouvernorat de Gaza Nord, l’armée israélienne mène une offensive terrestre depuis le 6 octobre, et des combats ont été signalés entre les forces israéliennes et les groupes armés palestiniens. Le siège israélien renforcé imposé depuis lors, en particulier autour de la zone du camp de réfugiés de Jabalya, signifie que presque aucune aide humanitaire n’a pu entrer. Dans le même temps, la région a connu de graves perturbations des communications, y compris de l’internet. Le 4 novembre, les Nations unies et leurs partenaires estimaient qu’environ 100 000 personnes avaient été déplacées en quatre semaines du gouvernorat de Gaza Nord vers la ville de Gaza et qu’il restait entre 75 000 et 95 000 personnes dans Gaza Nord. Le nombre de morts dans le gouvernorat de Gaza Nord au cours du mois dernier s’élèverait à des centaines, voire à plus de 1 000, une source – la défense civile palestinienne (PCD) – estimant qu’il a atteint 1 300. En outre, depuis le 31 octobre, des dizaines de Palestiniens ont été observés en train d’évacuer le nord de Nuseirat, à Deir al Balah, vers le sud, dans un contexte d’intensification des hostilités, y compris des frappes aériennes et des bombardements, qui auraient fait à plusieurs reprises des victimes en masse (voir ci-dessous).

  • Selon le ministère de la santé de Gaza, 330 Palestiniens ont été tués et 1 124 ont été blessés entre les après-midi du 29 octobre et du 5 novembre. Entre le 7 octobre 2023 et le 29 octobre 2024, au moins 43 391 Palestiniens ont été tués et 102 347 ont été blessés, selon le ministère de la santé à Gaza.

[…]

  • Faisant référence à certains incidents meurtriers signalés entre le 28 octobre et le 3 novembre, ainsi qu’à deux incidents au cours desquels d’une part le véhicule d’un membre du personnel de l’UNICEF a essuyé des tirs dans le nord de la bande de Gaza et d’autre part plusieurs enfants ont été blessés près d’une clinique de vaccination contre la polio dans le gouvernorat de Gaza-ville, la directrice générale de l’UNICEF, Catherine Russell, a déclaré qu’il s’agissait « d’exemples supplémentaires des graves conséquences des frappes aveugles sur les civils dans la bande de Gaza ». Le directeur régional de Save the Children a également averti que si « la communauté internationale n’intervient pas rapidement, une génération entière d’enfants de Gaza sera anéantie, ainsi que leur avenir « .
  • Décrivant la situation au nord de la bande de Gaza comme « apocalyptique », les directeurs de 15 organisations et consortiums humanitaires et des Nations Unies qui font partie du Comité permanent inter-organisations (IASC), le forum de coordination humanitaire le plus ancien et le plus élevé du système des Nations Unies, ont renouvelé leur appel à toutes les parties qui se battent à Gaza pour protéger les civils, ont demandé à l’État d’Israël de « cesser son assaut sur Gaza et sur les humanitaires qui tentent de l’aider », et ont appelé les États membres à exercer leur influence pour assurer le respect du droit international. Constatant que l’aide de base et les fournitures vitales ont été refusées alors que les bombardements et autres attaques se poursuivent, ces responsables ont souligné que « le mépris flagrant de l’humanité la plus élémentaire et des lois de la guerre doit cesser », que les attaques contre les civils et les infrastructures civiles restantes doivent cesser, que l’aide humanitaire doit être facilitée et que les marchandises commerciales doivent être autorisées à entrer dans la bande de Gaza.
  • La situation sanitaire reste critique dans les hôpitaux Kamal Adwan, Al Awda et Indonesien dans le gouvernorat de Gaza Nord. Kamal Adwan « a été réduit d’un hôpital aidant des centaines de patients avec des dizaines de travailleurs de la santé, à une coquille vide », a rapporté le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, le 1er novembre. Le troisième étage de l’hôpital a été directement touché à deux reprises, le 31 octobre et le 3 novembre. La première attaque a déclenché un incendie qui a touché l’entrepôt de médicaments, détruisant une partie des fournitures que l’OMS avait livrées, et a endommagé la station de dessalement du service d’hémodialyse. Le directeur de l’hôpital a indiqué que quatre membres du personnel médical avaient été blessés en tentant d’éteindre manuellement l’incendie en raison du manque de ressources. La deuxième attaque signalée, le 3 novembre, a blessé six enfants hospitalisés dans l’établissement, dont l’un dans un état critique, et a endommagé des réservoirs d’eau. Elle a eu lieu peu après qu’une mission dirigée par l’OMS, menée conjointement avec l’OCHA, l’UNMAS et l’OHCHR au milieu d’un bombardement intensif, ait réussi à livrer 20 000 litres de carburant, ainsi que des fournitures médicales et chirurgicales, 150 unités de sang et 60 boîtes de nourriture sèche et d’eau à Kamal Adwan, et à transférer 25 patients, ainsi que 37 accompagnateurs, à l’hôpital Al Shifa, dans la ville de Gaza. En ce qui concerne le second incident, le chef de l’OMS a déclaré qu’il était « consternant que les hôpitaux de Gaza continuent d’être attaqués, que les patients continuent d’être blessés et que les travailleurs de la santé et les humanitaires continuent de travailler dans des conditions qui mettent leur vie en danger ». Plus tôt, le 31 octobre, Médecins Sans Frontières (MSF) a reçu la confirmation qu’un chirurgien orthopédique de MSF, qui avait abrité et soutenu l’intervention sanitaire d’urgence à l’hôpital Kamal Adwan, avait été détenu par les forces israéliennes, ainsi que plusieurs autres membres du personnel médical, lors du raid sur Kamal Adwan le 26 octobre. Dans un message audio du 4 novembre, le directeur de l’hôpital a réitéré le besoin urgent de déployer des ambulances et des équipes chirurgicales spécialisées, soulignant que les patients continuaient d’arriver au service d’accueil et d’urgence de Kamal Adwan, tandis que ceux qui ne pouvaient y accéder étaient « abandonnés à leur sort » dans les rues et que beaucoup restaient coincés sous les décombres sans possibilité de les sauver.
  • Entre-temps, l’hôpital Al Awda est presque sur le point d’être contraint de cesser ses activités. Bien que la mission conduite par l’OMS le 3 novembre ait pu atteindre Al Awda et transférer cinq patients en état critique et leurs cinq accompagnateurs à l’hôpital Al Shifa, les autorités israéliennes n’ont pas autorisé la livraison de fournitures vitales à l’établissement. Dans un communiqué de presse, le directeur général de l’Association communautaire et de santé d’Al Awda a indiqué que carburant, médicaments, consommables médicaux, unités de sang, nourriture et eau faisaient cruellement défaut, ajoutant que depuis l’intensification des opérations militaires dans le nord de la bande de Gaza, six employés de l’hôpital avaient été blessés lors d’attaques visant l’établissement, l’un d’entre eux ayant perdu un membre, et que toutes les ambulances avaient été mises hors d’état de fonctionner. Pour sa part, l’hôpital indonésien, qui était auparavant hors service, aurait repris une partie de ses activités et reçu des patients le 29 octobre, bien que le Groupe Santé ne dispose d’aucune information sur les conditions dans l’établissement et qu’aucun carburant, ni aucune autre fourniture médicale essentielle, n’ait pu lui être acheminé. (……)
  • Toujours dans la ville de Gaza, le « mini-hôpital » récemment réhabilité d’Al Shifa, qui ne représente qu’une partie de la structure de soins de santé plus vaste qui a été détruite en avril, est désormais un point de référence essentiel pour le nord de Gaza et un « exemple de résilience », a souligné le représentant de l’OMS dans les Territoires palestiniens occupés, le Dr Richard Peeperkorn. L’établissement comprend un service d’urgence, des salles d’opération et une unité de soins intensifs, avec une moyenne de neuf opérations chirurgicales par jour. Une unité d’hémodialyse dotée de 25 machines permet également de sauver la vie de 63 patients souffrant de problèmes rénaux. Les efforts se poursuivent pour augmenter les capacités, avec de nouvelles équipes médicales d’urgence déployées à la fois à Al Shifa et à l’hôpital Al Ahli voisin le 3 novembre pour soutenir le personnel de santé local. Autre nouvelle positive, l’hôpital pédiatrique Al Rantisi, dans la ville de Gaza, devrait reprendre ses activités la semaine prochaine, après avoir été touché et contraint de fermer en novembre 2023, rapporte le groupe sectoriel Santé.
  • La troisième phase de la campagne de vaccination d’urgence contre la polio a débuté le 2 novembre dans certaines parties du nord de la bande de Gaza. Au 4 novembre, 105 261 enfants de moins de 10 ans avaient été vaccinés et 83 867 enfants âgés de 2 à 10 ans avaient également reçu une supplémentation en vitamine A. Au total, 216 équipes de vaccination ont été déployées sur 106 sites fixes et 209 mobilisateurs sociaux se sont engagés auprès des communautés pour les sensibiliser à l’effort de vaccination. Afin d’assurer la plus grande couverture possible, quatre sites ont continué à administrer le vaccin le 5 novembre. L’OMS signale que, par rapport au premier cycle mené en septembre, la zone de la pause humanitaire convenue a été considérablement réduite, se limitant à la ville de Gaza, mais le comité technique de lutte contre la poliomyélite a décidé de poursuivre la campagne pour atténuer le risque d’un long retard et saisir l’occasion de vacciner les enfants récemment déplacés du nord de la bande de Gaza vers la ville de Gaza. Bien que géographiquement plus restreinte, la campagne n’a pas été exempte d’incidents. Le 2 novembre, l’OMS a signalé que le centre de soins de santé primaires de Sheikh Radwan avait été touché alors que des parents amenaient leurs enfants se faire vacciner, faisant six blessés, dont quatre enfants.
  • Selon les récentes « évaluations rapides » de la FAO, près de 15 000 bovins, soit 95 % du total, sont morts et presque tous les veaux ont été abattus, tandis que moins de 25 000 moutons (environ 43 %), quelque 3 000 chèvres (environ 37 %) et 34 000 oiseaux (1 % du secteur avicole) sont encore en vie. Ces pertes dramatiques s’ajoutent aux dégâts considérables subis par les infrastructures agricoles et aux restrictions permanentes qui entravent l’entrée à Gaza d’intrants agricoles essentiels, de fourrage et de kits vétérinaires. La combinaison de ces facteurs constitue un obstacle majeur à la réhabilitation des systèmes alimentaires locaux, perpétuant la dépendance des populations à l’égard d’une aide humanitaire de plus en plus réduite. Non seulement le dernier rapport FAO/PAM sur les zones de famine, publié le 31 octobre, place la bande de Gaza parmi les cinq territoires « les plus en alerte “ en termes de conditions d’insécurité alimentaire catastrophiques, aux côtés du Soudan, du Sud-Soudan, d’Haïti et du Mali, mais la situation à Gaza est ” la plus aiguë », selon l’économiste en chef du PAM, Arif Husain, car 91 % de la population est confrontée à des niveaux d’insécurité alimentaire de crise ou pire, et l’économie s’est réduite à environ un sixième en l’espace d’un an, dans un contexte de pertes humaines généralisées, de destruction des infrastructures, de déplacements et d’insuffisance de l’aide humanitaire.
  • A l’approche de l’hiver, le manque de nourriture et d’autres fournitures humanitaires vitales entrant dans la bande de Gaza pourrait bientôt dégénérer en famine, prévient le PAM. En octobre, environ 1,7 million de personnes, soit 80 % de la population, n’ont pas reçu leurs rations alimentaires mensuelles dans la bande de Gaza, et le nombre de repas cuisinés distribués quotidiennement est tombé à 450 000, soit une baisse de 25 % par rapport à la fin septembre, rapporte le groupe sectoriel de la sécurité alimentaire (FSS). De nombreuses cuisines ont été contraintes de fermer, et pour celles qui restent opérationnelles, les partenaires ont dû ajuster le contenu des repas pour faire face aux pénuries d’approvisionnement. La chute dramatique de l’aide humanitaire est exacerbée par une grave pénurie de produits commerciaux : pas plus de 100 camions de produits commerciaux seraient entrés dans la bande de Gaza entre le 1er et le 26 octobre. Depuis près d’un mois, toutes les tentatives des partenaires humanitaires pour accéder à la population de Gaza Nord et lui fournir une aide alimentaire ont été refusées et les huit cuisines qui étaient opérationnelles dans le gouvernorat ne fonctionnent plus ou sont inaccessibles en raison des hostilités en cours.

[…]

Le rapport complet (en anglais) est ici

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