Selon Al-Hayat, quotidien de langue arabe publié à Londres, de nombreux soldats israéliens vendent des armes aux Palestiniens, voire au Hezbollah libanais, afin d’arrondir leurs fins de mois.
Israël reproche souvent à l’Egypte de ne pas sévir assez fermement contre un trafic en faveur du Hamas, des armes passant fréquemment à travers la frontière égyptienne vers la Bande de Gaza. Mais le président égyptien, Hosni Moubarak, affirme que ces armes proviennent d’Israël même !
De fait, depuis le début 2006, trente-cinq soldats israéliens ont été inculpés pour avoir volé du matériel dans les casernes. Que ce petit trafic lucratif ait permis aux combattants palestiniens de monter plusieurs opérations militaires au cours des dernières années est un secret de Polichinelle.
Le commandement de Tsahal reconnaît le phénomène et le prend très au sérieux. Ce trafic insolite, qui n’a rien de nouveau, est en train de prendre de l’ampleur. Des rapports des renseignements militaires israéliens reconnaissent que des armes et munitions, dérobées dans les arsenaux, ont réapparu dans des mains palestiniennes à Gaza, Tulkarem, Naplouse et Jénine. Au cours des quatre dernières années, on parle de 2 345 pièces (fusils, mitraillettes, grenades, mortiers et roquettes) ainsi que de dizaines de milliers de munitions. En 2006, par exemple, 24 000 balles se sont volatilisées. En octobre 2007, 15 roquettes antichars ont disparu d’un terrain d’entraînement du plateau du Golan, zone sous haute surveillance militaire. Le fait que ce vol ait été commis par des effectifs de Tsahal ne fait aucun doute.
Par ailleurs la justice israélienne est saisie de nombreux dossiers concernant des transactions clandestines d’armes à la frontière libanaise, certains datant d’avant le conflit avec le Hezbollah en août 2006. Selon les responsables militaires israéliens, la majorité de ces vols sont commis par des soldats se trouvant dans une situation financière dégradée. À noter que le tiers des troupes est composé de réservistes, qui risquent de se trouver au chômage au bout de leur période annuelle de service militaire obligatoire.
Pour essayer de faire face à ce problème, le chef d’état-major, le général Gaby Ashkenazi, a annoncé un renforcement des moyens d’investigation et une multiplication des inspections surprises. On voit donc là un nouvel effet pervers de l’occupation et de son coût économique et social dans une société hypermilitarisée. Face à la colère prévisible de l’opinion israélienne, Tel-Aviv devrait faire preuve d’un peu plus d’humilité la prochaine fois qu’il a envie de se dérober devant ses responsabilités en accusant le gouvernement égyptien d’un manque de surveillance à la frontière avec la Bande de Gaza.
Un reportage à ce sujet citant Al-Hayat et des sources officielles israéliennes a paru dans le bimensuel Courrier International. Pour le texte de cet article, voir Les armes à Gaza seraient aussi israéliennes dans la rubrique Textes divers.
– Richard Wagman