Lettre ouverte à Monsieur Thibaud PHILIPPS

A Strasbourg, le conseil municipal dirigé par Jeanne Barzeghian a refusé de voter la déclaration de l’IHRA. Depuis lors, la Maire et son équipe sont soumis à un feu nourri d’injures et de menaces, même violentes. Notre lettre est une réponse au départ du maire d’Illkirch  (grande ville de  banlieue de Strasbourg) de la majorité, et aux votes prévus dans les autres instances régionales.

Lettre ouverte à Monsieur Thibaud PHILIPPS
Maire d’Illkirch-Graffenstaden

La presse locale s’est faite l’écho de votre soutien inconditionnel à la définition de l’antisémitisme de l’IHRA (Alliance Internationale pour la mémoire de l’Holocauste) prétendument « non amendable » au motif qu’elle a été adoptée « ailleurs en France et à l’international »… DNA 28/04/21
Vous ignorez très certainement la genèse de ce texte et les réserves qu’il suscite en France et partout dans le monde :

  • pour son auteur principal Kenneth Stern, avocat américain et directeur du Bard Center for the Study of Hate, en raison de l’ajout d’exemples qui servent pour la plupart à assimiler la critique d’Israël à l’antisémitisme et qui n’étaient pas présents dans la définition initiale de 2016. Kenneth Stern conteste fermement l’usage de sa définition à des fins politiques et affirme qu’il est un obstacle à la liberté d’expression et de critique d’un Etat.
  • pour de nombreuses organisations en France, dont la Ligue des droits de l’Homme, au motif que l’adoption d’une définition spécifique de l’antisémitisme « fragilise l’approche républicaine du combat antiraciste » et ouvre la voie à des « atteintes au droit de pouvoir critiquer un Etat et sa politique ».
  • pour les 200 signataires, des universitaires du monde entier, de la récente Déclaration de Jérusalem sur l’antisémitisme (JDA), publiée ce jeudi 25 mars. Elle rappelle dans son préambule que « la définition de l’IHRA n’est pas claire sur des points essentiels et qu’elle est largement ouverte à différentes interprétations, elle a semé la confusion et suscité la controverse, affaiblissant ainsi la lutte contre l’antisémitisme ».
  • pour de nombreuses organisations juives de part le monde (USA, Canada, France…), la demande de l’IHRA est fallacieuse : « Ne vous y trompez pas, légiférer sur la définition de l’IHRA ne concerne pas la sécurité juive. La seule chose qu’elle garantit, c’est l’impunité pendant des décennies de violation du droit international » (https://jewishvoiceforpeace.org/ihra/)

C’est sous la pression d’organisations juives radicales ou évangélistes, soutenant la politique israélienne de colonisation et d’apartheid, que le Président des États-Unis Donald Trump a signé le premier un décret adoptant ce qui était une définition de travail, comme un texte de référence, et ces organisations n’ont de cesse depuis de l’imposer aux États, aux ONG, aux collectivités.

Nous sommes attachés au respect des droits de l’Homme et à celui du Droit international, nous appelons les conseils de la Ville de Strasbourg et de l’EMS à ne pas céder à l’instrumentalisation d’un débat légitime à des fins politiciennes.

Perrine OLFF RASTEGAR (CJACP et UJFP) et Mireille CASTERA (CJACP et UJFP)