Madame, vous avez relaté le discours du président de la République prononcé devant la gare de Pithiviers pour le 80e anniversaire de la Rafle du Vel d’Hiv et vous avez écrit : « le chef de l’Etat a répété la responsabilité de la France dans la déportation et l’assassinat de 8000 juifs et il a fustigé la falsification de l’Histoire portée par le polémiste d’extrême droite ».
8000 juifs ? Un chiffre en totale contradiction avec les pratiques et les précisions économiques habituelles pourtant fouillées propres à votre journal.
8000 juifs dont le président de la République a dit qu’ils parlaient en yiddish, façon de dire qu’ils étaient des étrangers.
8000 juifs dont nous ignorons sous votre plume le nombre exact d’hommes, de femmes et d’enfants, toutes et tous essentialisés sous le terme juif, réduits à une entité indistincte.
8000 juifs quand nous connaissons parfaitement le nombre exact d’hommes, de femmes et d’enfants arrêtés au cours de cette rafle soit : 13152 personnes, réparties comme suit :
Hommes : 3118, femmes : 5919, enfants : 4115.
Personnes sans enfant immédiatement transférées à Drancy puis déportées : 4952.
Personnes enfermées au Vel d’Hiv : 8157 dont les 4115 enfants. Toutes transférées ensuite à Pithiviers et Beaune la Rolande avant d’être livrées aux nazis, déportées.
Les 8000 juifs que vous évoquez ne seraient alors qu’une partie des hommes, des femmes et des enfants internés dans le Loiret, un chiffre rond en somme, pour solde de tout compte avec l’Histoire.
La falsification de l’Histoire – Madame – commence précisément dans ces approximations, ces réductions et ces imprécisions, elles ouvrent les voies à la réécriture de l’Histoire.
Georges Gumpel
Enfant juif français caché en 1943/1944,
Fils de Déporté, mort à Melk, camp annexe de Mauthausen.
Partie civile au procès de Klaus Barbie.