Lettre ouverte à la Maire de Barcelone

Cette lettre ouverte est adressée par des membres juifs de JUNTS, association catalane judéo-palestinienne 

Lettre ouverte à la Ada Colau, maire de Barcelone

La “Journée internationale consacrée à la mémoire des victimes de l’Holocauste”, commémore le jour où les troupes soviétiques libérèrent le camp de concentration d’Auschwitz et découvrirent l’horreur du génocide nazi. Pour nous, membres juifs de Junts, Associació de Catalana de Jueus i Palestins, le sens que nous lui donnons est de renforcer notre engagement à lutter contre toute forme de racisme et de fascisme. Nous nous sentons les héritiers d’une tradition qui, depuis près de deux siècles, défend la libération et l’émancipation, non seulement des juifs, mais du reste de l’humanité. C’est pourquoi aujourd’hui, en plein XXIe siècle, nous assistons avec beaucoup d’indignation et de préoccupation à la dérive fasciste et raciste de la société israélienne, un fait que beaucoup attribuent au nouveau gouvernement récemment constitué, mais qui est en réalité une conséquence des racines du projet sioniste qui, dès le départ excluait le peuple originel de la Palestine. L’État colonial est né dans la violence d’une opération d’épuration ethnique qui expulsa les trois quarts de la population palestinienne en 1948 et qui se perpétue à travers l’occupation militaire, ce qui dérive en une corruption morale que dénonçait déjà le philosophe juif Yeshayahu Leibowitz en 1967.

Aujourd’hui nombreuses sont les personnes et organisations juives qui appartiennent à un large spectre politique, aux États-Unis, en Europe et en Israël même, qui dénoncent l’occupation et l’apartheid que subit la population palestinienne et qui exigent à leurs gouvernements qu’ils appliquent des sanctions. Un État juif, c’est-à-dire un État qui privilégie les droits d’un groupe ou ethnie sur un autre, est tout simplement incompatible avec la démocratie.

L’accusation d’antisémitisme est l’anathème que l’État d’Israël utilise pour faire taire les voix critiques de sa politique. Invitées par Unidas Podemos, trois camarades –une juive et deux israéliens – sont allés en novembre au Congrès des Députés expliquer pourquoi la critique du sionisme et de l’État d’Israël est légitime et nécessaire et pourquoi elle n’a rien à voir avec la judéophobie. Il est évident qu’en se proclamant représentant des juifs du monde, l’État d’Israël, avec sa politique  de violation systématique des droits de la population palestinienne, est celui qui contribue à la judéophobie. En tant que Barcelonais mais aussi en tant que juifs et Palestiniens, nous soutenons complètement la proposition de mettre un terme à un jumelage qui n’a aucun sens dans le contexte politique actuel d’une répression féroce du peuple palestinien (231 personnes assassinées dont 61 enfants en 2022) et d’une colonisation qui se poursuit. Nous voulons, de Barcelone, envoyer un signal clair que les Droits humains doivent prévaloir sur toute autre considération. Sans doute, le geste symbolique consistant à mettre fin à un accord de coopération avec la capitale de l’État israélien marquerait un précédent dans l’histoire de la solidarité internationale.