Madame la Maire de Lille,
J’apprends qu’il est question de sanctionner trois agents de la Mairie de Lille pour refus d’obtempérer à l’ordre de minute de silence organisée pour commémorer les assassinats de la semaine dernière. Une telle décision me semble incroyable. Comment la Maire d’une grande ville de France, de surcroît membre du Parti Socialiste, peut-elle se livrer à un tel manquement à la liberté d’expression des employés de la Mairie qu’elle dirige.
Enseignant à la retraite depuis quinze ans, je peux vous assurer que si j’avais encore été en activité, j’aurais refusé cette minute de silence imposée par l’Administration.
L’Etat, en la personne du Président de la République, a transformé l’émotion qui s’est développée dans le pays après les meurtres de la semaine dernière en opération à grand spectacle ; d’une certaine façon, cela relève de l’imposture. Il faudrait pour montrer patte blanche d’une part participer à une minute de silence imposée et d’autre part se réfugier dans le nouveau slogan à la mode « je suis Charlie ». Cette participation à la bêtise ambiante serait ainsi la preuve que l’on condamne les assassinats perpétrés par des terroristes se réclamant de l’Islam. Il m’est impossible d’accepter que l’on fasse de ce rituel imbécile une preuve de bonne foi quant à la condamnation des assassinats. Ce serait prendre les citoyens pour des imbéciles prêts à accepter les injonctions des autorités dites supérieures. Ce serait imposer à ces mêmes citoyens une forme d’expression imposée et tout cela au nom de la défense de la liberté d’expression. Sans oublier que cette mascarade est une injure à la mémoire de Cabu et Wolinsky qui ont appris à nombre de personnes de ma génération la valeur de l’irrespect. Mais il est vrai que, Cabu et Wolinsky assassinés, il est préférable d’en faire des icônes, cela peut toujours servir.
Je vous demande donc, Madame la Maire de Lille, de mettre fin à ces poursuites imbéciles contre des employés qui, pour des raisons que nous n’avons pas à juger, ont refusé de participer à la mascarade officielle.
Je vous prie Madame la Maire de Lille de recevoir l’expression de ma considération.
Rudolf Bkouche,
ancien professeur à l’Université de Lille 1
PS : Je me permets de vous informer que cette lettre sera diffusée autant que nécessaire. Il est inadmissible qu’un gouvernement dit de gauche joue sur les émotions populaires à la façon des pires Etats totalitaires, montrant ainsi le mépris qu’il porte au peuple. Il est tout aussi inadmissible que des édiles, au nom de je ne sais quelle unité nationale se plient à ce jeu.