Lettre de la maire de Strasbourg à Emmanuel Macron à propos de la nouvelle mosquée

Strasbourg, le 24 mars 2021

Monsieur le Président de la République.

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, m’a interpellée publiquement hier matin sous la forme d’un simple tweet lancé sur les réseaux sociaux, suite à l’adoption par le Conseil municipal de Strasbourg, le 22 mars 2021, d’une délibération favorable au principe d’une subvention relative à la construction d’une mosquée.

Le versement ultérieur de la subvention est assorti de conditions strictes : présentation d’un plan de financement robuste et transparent, confirmation par le porteur du projet de son adhésion aux valeurs de la République.

La délibération du 22 mars est parfaitement conforme au droit local spécifique à l’Alsace-Moselle. Elle est également conforme au double principe d’équité entre les cultes et de continuité républicaine. Ln effet, des responsables politiques locaux et nationaux dialoguent depuis de nombreuses années avec les dirigeants de Milli Gorus et la première pierre de la mosquée a été posée en 2017, en présence de mon prédécesseur et de l’ancien préfet Jean-Luc Marx.

Par ailleurs, depuis mon élection en juillet 2020 jusqu’au tweet publié le 23 mars par le ministre de l’Intérieur, l’État n’a formulé aucune alerte sur ce projet ni sur l’association qui le porte. Le ministre de l’Intérieur, que j’ai pourtant accueilli à Strasbourg début 2021, n’a émis aucune mise en garde à ce sujet, ni pendant sa visite, ni après. La Préfecture ne m’a pas davantage adressé une quelconque mise en garde.

Monsieur le Président, l’adhésion pleine et entière aux valeurs de la République et la souveraineté de la France face aux risques d’ingérence étrangère, sont autant de sujets qu’il convient de traiter avec précision et sérieux. Le dialogue avec les élus locaux ne peut se résumer à ces échanges informels. Je souhaite ainsi que l’État partage les éléments dont il dispose afin de pouvoir garantir le respect des valeurs de la République sur notre territoire.

Chacune et chacun, à sa place, doit prendre ses responsabilités. Je prends les miennes en vous proposant par ce courrier un échange constructif et républicain qui nous permettrait d’agir véritablement de concert, de mettre en œuvre des politiques conjointes dans les meilleurs délais, sur la base des éléments concrets que vous pourrez me transmettre.

Résolument engagée pour Strasbourg, je n’accepterai ni la stigmatisation de notre territoire ni de ses habitants, qui aspirent à vivre dans la paix et la sérénité dans notre République.

Je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, à l’expression de ma très haute considération.

Jeanne BARSEGHIAN