Les Juifs religieux et le sionisme

Quels sont les liens entre la fondation de l’Etat d’Israël et la religion juive ?

Celle-ci a-t-elle porté au cours de l’histoire une aspiration à la création d’un Etat juif autour de Jérusalem ?

Quel rôle joue aujourd’hui la religion juive dans les lois et le fonctionnement de l’Etat d’Israël ou dans la colonisation des territoires occupés ?

À ces questions, il n’y a pas de réponses simples.

1) La religion juive aux origines. Une religion nationale confrontée à la question de l’exil.

La Bible hébraïque est un assemblage d’histoires, de légendes, de textes de lois, de poèmes, de prophéties, de réflexions philosophiques composés principalement en hébreu et un peu en araméen. On y trouve la Torah (ou Pentateuque car composée de cinq livres : la Genèse, l’Exode, le Lévitique, les Nombres et le Deutéronome). Suivent les Prophètes qui racontent l’histoire du peuple d’Israël de la conquête de Canaan à l’exil (à Babylone). Enfin les Ecrits regroupent des homélies, des psaumes, des poèmes, des prières, des proverbes probablement écrits tardivement pendant les périodes perses et hellénistiques (du VIe au IVe siècle avant JC).

Les archéologues ont commencé à s’intéresser à la Palestine dès le milieu du XIXe siècle. Ils pensaient trouver les preuves archéologiques du caractère historique du récit biblique. Presque à la même époque, l’Allemand Schliemann trouvait le site de Troie et imaginait trouver les traces de la guerre racontée par Homère. Pourquoi risquer cette comparaison entre la Bible et « l’Iliade et l’Odyssée » ? Dans les deux cas, il s’agit de textes fantastiques qui fondent des peuples et des identités. Ces textes ont été écrits à partir de traditions orales. Mais l’archéologie révèle des réalités beaucoup plus compliquées. À Troie, on a trouvé de nombreuses couches superposées correspondant à plusieurs époques très distinctes. Mais aucune d’entre elles ne semble correspondre à la « Guerre de Troie » qui fait partie de notre culture. Plus personne ne croît dans l’ancienne religion grecque et il a été facile d’admettre que le récit d’Homère a été fabriqué à partir de diverses traditions orales et de légendes anciennes. En dehors de l’intérêt stratégique du contrôle des détroits, rien ne prouve qu’une coalition de toutes les cités grecques se soit constituée pour ce contrôle. Avant le texte d’Homère, il y avait plein de cités grecques rivales. Après, il y a une conscience d’un destin commun.

En Palestine, les premiers archéologues ont multiplié les erreurs grossières. Il faut dire que de nombreuses traditions protestantes font une lecture littérale de la Bible. Les conquêtes coloniales européennes en Amérique du Nord ou en Afrique du Sud se sont largement inspirées du texte sur la conquête sanglante de Canaan par Josué. Donc ces premiers archéologues croyaient en l’historicité du texte biblique.

Dans le désert du Néguev, à 30 Km d’Eilat, ils ont appelé « mines du roi Salomon » des mines de cuivre qui sont manifestement égyptiennes et plus anciennes (datant de Ramsès II). À Hatzor ou Meggido, ils ont trouvé des ruines de forteresses, mais là encore, les méthodes modernes de datation montrent qu’elles sont soit antérieures, soit postérieures à l’époque de David et Salomon. À Jérusalem, le site est occupé depuis plusieurs millénaires, mais on ne trouve pas grand-chose correspondant au Xe siècle av JC et à la magnificence du royaume présumé de Salomon.

Petit à petit, le doute s’est installé chez les archéologues. Il y a aujourd’hui un large consensus sur le fait que les principaux épisodes de la Bible sont légendaires. Ce consensus inclut des archéologues religieux comme Jean-Baptiste Humbert qui est dominicain et dirige l’école biblique et archéologique française de Jérusalem.

Deux des archéologues les plus réputés d’Israël (Israël Finkelstein qui dirige l’Institut d’archéologie de l’université de Tel-Aviv et a travaillé dans les fouilles de Meggido et Neil Asher Silberman) ont rassemblé ces doutes devenus des certitudes dans le livre « La Bible Dévoilée » (Éditions Bayard, 2002). Il y a des discussions sur certaines hypothèses faites par les auteurs mais pas sur les faits principaux. Dans son livre « Comment le peuple juif fût inventé ? » (Éditions Fayard, 2008), l’historien israélien Shlomo Sand reprend à son compte ces faits. En gros, les épisodes de l’arrivée des Hébreux depuis la Mésopotamie (via Harran) sous la conduite d’Abraham, de l’entrée puis de la sortie d’Egypte sous la conduite de Moïse et enfin de la conquête sanglante de Canaan par Josué sont très largement légendaires. Le récit biblique contient de nombreuses contradictions et ces faits sont infirmés par les fouilles archéologiques ou les documents des autres civilisations.

Il y a même des doutes sérieux sur l’existence du « royaume unifié » de David et Salomon. L’archéologie infirme cette existence car à l’époque présumée du roi Salomon, Jérusalem n’était apparemment qu’une bourgade.

Ces découvertes archéologiques ont bien sûr des conséquences sur le présent. De nombreux événements récents sont liés au récit biblique : le massacre de 29 Palestiniens en train de prier du caveau des patriarches. Ce massacre, perpétré par le colon Baruch Goldstein le 25 février 1994, correspond au « tombeau d’Abraham » vénéré à la foi par les religions musulmane et juive. Aujourd’hui, 250000 colons de Cisjordanie (sans compter Jérusalem) vivent dans des colonies dont la plupart ont des noms bibliques (Shilo, Efrat, Eli …). Pour eux, les Palestiniens sont des intrus et ils se considèrent comme les successeurs de Josué ayant fait leur retour en Judée-Samarie. Les chrétiens sionistes, très puissants aux Etats-Unis financent très fortement la colonisation parce qu’ils ont associé les Arabes au mal, à Armageddon et à la catastrophe de la défaite du roi Josias face aux troupes égyptiennes. À Silwan (Jérusalem Est), des maisons palestiniennes sont détruites pour faire place à un musée du roi David.

Si le récit biblique est légendaire et si les fêtes religieuses juives (Pessah, Soukkot …) se rapportent à des événements non historiques, d’où viennent les Hébreux ? Comment et quand a été écrite la Bible ?

Les avis sont partagés sur l’origine des Hébreux. La première mention d’Israël, cité comme peuple cananéen soumis, se trouve sur la stèle du pharaon égyptien Mérenptah (1207 av JC). Aucune allusion n’existe quant à leur monothéisme alors que l’Egypte a déjà connu avec Akhénaton une courte expérience monothéiste. En fait le territoire correspondant à ce qui est aujourd’hui Palestine/Israël est une région clé convoitée par les grands empires Hittites, Egyptiens, Assyriens, Babyloniens, Perses et il est peu probable qu’un grand royaume indépendant ait pu exister face à ces convoitises.
Les archéologues divergent sur l’origine des Hébreux. Pour certains, ce seraient des Cananéens. Pour d’autres, des pasteurs vivant en bordure du désert et commerçant avec les Cananéens. La destruction des villes cananéennes par les Peuples de la Mer les aurait poussés à devenir aussi agriculteurs et à migrer vers les collines. Là où le récit biblique est vraisemblable, c’est quand il fait sentir qu’à tout moment, plusieurs peuples et plusieurs religions ont cohabité sur cette terre. Au côté des Hébreux et des Cananéens, il y a des Philistins, des Moabites, des Iduméens, des adorateurs de Baal ou d’autres divinités. Dans le récit biblique, Josué a beau massacrer tous ses ennemis, il y en reste toujours.
Il est peu probable que les deux royaumes (Israël et Juda) aient jamais été unifiés. Il n’est pas resté grand chose du souvenir du royaume d’Israël, détruit en 722 av JC par les Assyriens avec la déportation d’une partie de la population en Mésopotamie.

D’où l’hypothèse que le Livre, la Bible, soit postérieur à cette période. Pour Finkelstein et Silberman, la Bible a été essentiellement écrite dans le royaume de Juda, sous le règne du roi Josias au VIIe siècle av JC. À cette époque, le royaume est tout petit et fort peu peuplé. Il est entouré par de très puissants voisins. Josias sera tué face aux Egyptiens et peu après, les Babyloniens prendront Jérusalem, détruiront le Temple et déporteront la population. Pour d’autres, la Bible serait encore postérieure et daterait de l’exil à Babylone (VIe siècle av JC). La Bible donne aux Juifs une histoire et une raison d’être qui sont fantastiques : ce peuple serait venu de Mésopotamie et aurait été en esclavage en Egypte, les deux grands empires menaçants. Il faut sans doute voir ce livre comme un récit fondant un peuple en lui donnant une histoire et une identité nationale dignes. Quant au monothéisme juif, il n’est pas si exceptionnel. Il est en tout cas postérieur à l’expérience monothéiste égyptienne.

C’est la Bible qui va permettre la survie de la religion hors du contexte territorial où elle est née. C’est en tout cas le Livre qui permet aux Juifs de continuer d’exister pendant l’exil de Babylone, de ne pas disparaître comme le royaume d’Israël peu de temps avant et même, pour une partie d’entre eux, d’être autorisés à revenir à Jérusalem par l’empereur perse Cyrus à la fin du VIe siècle av JC. Si les Juifs vont devenir plus tard le peuple du Livre, c’est en quelque sorte parce que le Livre a fondé le peuple et sa religion.

2) La religion, ciment des communautés juives dispersées

La dispersion desJuifs est très antérieure à la destruction du deuxième temple par les troupes de Titus en 70 ap JC. Une partie des Juifs est restée à Babylone et s’est répandue en Orient. Plus à l’ouest, il y a eu d’importantes communautés juives assez tôt à Alexandrie et même à Rome.

Au IIe siècle av JC sur le territoire actuel d’Israël/Palestine, un conflit divise les Juifs entre ceux qui acceptent l’Hellénisation et ceux qui la refusent. La dynastie des Maccabées qui s’installe à l’issue d’une révolte contre les Séleucides symbolise l’indépendance juive et s’appuie sur un fort sentiment à la fois religieux et national.

Cette question religieuse va devenir centrale lors de la conquête romaine. Traditionnellement, les peuples soumis finissent par accepter les institutions romaines et superposent les dieux romains à leurs propres dieux (c’est clair en Grèce ou en Gaule). En Palestine, une partie des Juifs va accepter cette « romanisation », mais une autre va totalement la refuser, pour des raisons à la fois religieuses et nationales. L’historien juif Flavius Josèphe sera d’abord révolté contre les Romains. Puis, il se ralliera à l’empire dont il deviendra citoyen. Dans son introduction au livre de Flavius Josèphe (« la guerre des Juifs »), l’historien Pierre Vidal-Naquet décrit une véritable guerre civile entre Juifs à l’intérieur de la ville de Jérusalem assiégée par les troupes de Titus. Avant de se révolter contre Rome, les zélotes commettront de nombreux massacres contre les Juifs romanisés. Et à Massada, ils préfèreront le suicide à la reddition. Ce courant à la fois religieux et nationaliste préfigure un peu ce qui est à l’œuvre aujourd’hui. Il y avait déjà, il y a 2000 ans, un antagonisme entre Juifs acceptant le monde extérieur et Juifs estimant que le mélange est impossible et que les Juifs ne peuvent vivre qu’entre eux. En même temps, cette époque est celle d’une très grave crise de la religion juive avec l’apparition de nombreux courants ou sectes. Et bien sûr du christianisme qui a été au début une branche du judaïsme.

De nombreux historiens ont longtemps affirmé qu’après la prise de Jérusalem par Titus (70 av JC), des centaines de milliers de Juifs auraient quitté la Palestine et se seraient répandus autour de la Méditerranée. C’est en contradiction avec l’histoire de la dernière révolte juive (Bar Kokhba, 132-135 ap JC) contre laquelle Rome a été obligée de dépêcher 12 légions (1/3 de l’armée !). On sait aujourd’hui qu’il était impossible que la terre puisse nourrir à cette époque une population supérieure à 700 000 ou 800 000 habitants dans cette région. Shlomo Sand a recherché des livres ou des documents sur cet exil, il n’en a pas trouvé. Et il conclut dans son livre qu’il n’y a eu « ni exil, ni retour ».
Pourtant, il y a consensus sur l’idée que les Juifs représentaient entre 5 et 10% de la population de l’empire romain au moment de son apogée et on trouve des synagogues de cette période un peu partout. D’où viennent ces Juifs ? Quand la crise de la religion romaine traditionnelle est devenue aiguë, de nombreuses religions se sont trouvées en concurrence : christianisme, culte de Mithra et … judaïsme. Cette religion était alors prosélyte et il y a eu des convertis dans toutes les régions de l’empire. Cette phase prosélyte du judaïsme va s’arrêter dans l’empire quand l’empereur Constantin fait du christianisme la religion officielle au début du IVe siècle ap JC. De nombreux Juifs vont rallier la nouvelle religion dominante alors que les conversions au judaïsme vont se poursuivre plus tard au Yémen avec le royaume juif Himyarite, en Afrique du Nord où de nombreuses tribus Berbères se convertissent, au Kurdistan ou dans l’empire Khazar, empire à la fois turc et slave entre Caspienne et Mer Noire (IX et Xe siècle ap JC).

Il n’y a pas de race juive. Les Juifs d’aujourd’hui sont principalement des descendants de convertis alors que les descendants des Hébreux sont essentiellement la population qui est toujours restée en Palestine. La diaspora juive correspond à la dispersion de la religion mais pas à la dispersion d’un peuple. Elle a donné lieu à la naissance de plusieurs peuples (séfarade, judéo-arabe, ashkénaze, falasha …) ayant une communauté de destin liée à la religion. La diaspora n’est pas une parenthèse de l’histoire juive. Elle est son centre. C’est dans la diaspora que sont apparus les langues juives, les traditions, les rites et même les hérésies (Caraïtes, Sabbatéens).

Au Moyen Age, la majorité des Juifs vivent en petites communautés dans des pays musulmans ou chrétiens. Les musulmans leur appliquent le statut de dhimmi, réservé à toutes les religions du livre, qui codifie les droits et les devoirs de ces religions. Ce statut a permis aux Juifs, jusqu’à l’apparition du colonialisme occidental, de pouvoir partiellement s’auto administrer autour de leur religion et leurs traditions. Contrairement à ce qui s’est passé dans le monde chrétien, il n’y a pas eu de massacre spécifique contre eux en terre d’islam.

Dans le monde chrétien, l’antijudaïsme est apparu très tôt et a provoqué dans de nombreux pays des expulsions ou des confiscations de biens. Les chrétiens ont inventé toute une série de stéréotypes contre les Juifs, le plus grave étant celui de déicide. Ils leur ont interdit, sauf rares exceptions, la possession de la terre. Ils les ont enfermés dans des quartiers spécifiques (juderias, ghettos …). S’il y a eu quelques moments fastes dans l’histoire du judaïsme européen (sous Charlemagne, dans les premiers temps de l’Espagne chrétienne ou du royaume de Pologne), cette histoire est ponctuée de nombreux massacres (les croisades, l’inquisition…). Dans l’Europe chrétienne, les Juifs jouent un rôle original (banquiers ou usuriers, artisans, intermédiaires entre les seigneurs et la population) qui fait qu’on a besoin d’eux, mais qu’il est très pratique de se débarrasser d’eux et de les spolier. Parce qu’ils sont « le peuple du Livre », les Juifs savent lire et ont parmi eux des médecins et des intellectuels.

Les différentes communautés juives dispersées ont des relations entre elles. C’est d’ailleurs par des Juifs andalous que l’on connaît l’histoire de la conversion de certains Khazars au judaïsme.

L’histoire des Juifs espagnols est exemplaire. Au XIVe siècle, les Juifs forment 5 à 10% de la population de l’Espagne. Ils parlent une langue espagnole (le ladino). Certains des leurs occupent des postes importants. Et pourtant, en 1391, un gigantesque pogrom qui commence à Ecija en Andalousie aboutit au massacre de 100000 Juifs et à un siècle d’agonie du judaïsme espagnol. Une moitié des Juifs se convertit et parmi les antisémites les plus fanatiques, il y aura de nombreux convertis. En 1492, les derniers Juifs doivent quitter l’Espagne, principalement vers le Maghreb et l’empire ottoman. Les persécutions vont se poursuivre contre les convertis (les marranes) avec la « limpieza de sangre » (pureté du sang). De nombreux marranes seront tués ou quitteront l’Espagne. Certains reviendront au judaïsme, mais cet épisode chrétien modifiera leur foi, avec notamment une volonté d’ouverture sur le monde. Certains chrétiens garderont plus ou moins consciemment le souvenir de leurs origines juives. L’expulsion des Juifs et des Maures d’Espagne préfigure les temps modernes : les nouveaux Etats centralisés ne tolèrent pas la diversité, surtout religieuse.

3) Le messianisme. « L’an prochain à Jérusalem ». Sabbatéisme et Frankisme.

Le judaïsme est une religion messianique. Les Juifs attendent la venue du Messie. Leur religion se rapporte (comme le Christianisme et l’Islam) à un autre monde très lointain et à une autre époque. Faut-il voir dans la phrase traditionnelle : « l’an prochain à Jérusalem », prononcée régulièrement lors des fêtes de Pessah une aspiration messianique à revenir à Jérusalem, voire à y reconstruire le Temple et un Etat juif ? En fait, non ! Il y a toujours eu sur le territoire actuel d’Israël/Palestine, après la défaite face aux Romains, une petite minorité juive, plutôt moins importante en proportion que le nombre de Juifs dans des pays voisins (Egypte, Mésopotamie, Perse …). Quand en 1492, l’empire ottoman offre l’asile aux Juifs chassés d’Espagne, ils s’installent à Salonique, Smyrne, Sarajevo, mais pas à Jérusalem. Il y aura bien une petite communauté de Juifs espagnols à Safed, mais c’est en Galilée, pas en Judée. Il faut comprendre que cette phrase sur Jérusalem est essentiellement symbolique, un peu comme la prière musulmane qui est tournée vers le Mecque. Même quand le voyage sera devenu possible, il n’y aura jamais de pèlerinage vers le mur des lamentations à l’image du pèlerinage de La Mecque chez les musulmans.

À partir du XVIIe siècle, les différentes communautés juives connaissent des bouleversements. En 1648, les troupes du Cosaque Khmelnitsky déclanchent des pogromes terribles en Ukraine. Cette même année, un Juif de Smyrne, Sabbataï Tsevi, se proclame le Messie. Il aura un succès très important parmi les Juifs notamment à Salonique, mais aussi chez les musulmans. Dans son livre « Vidal et les siens » (1989) sur l’histoire de son père, Edgar Morin raconte l’épopée sabbatéenne. Arrêté en 1666, Sabbataï se convertit à l’islam et beaucoup de ses fidèles reviennent à leur religion d’origine. Les Sabbatéens subsisteront jusqu’au XXe siècle (Mustafa Kemal était l’un deux), mais cet épisode bouleversera le judaïsme. Un phénomène un peu semblable aura lieu en Pologne avec le Frankisme. Le philosophe Gershom Scholem y a vu les origines du judaïsme laïque.

Au XVIIIe siècle, la majorité des Juifs européens vit en Pologne et en Ukraine. Cette région deviendra la zone de résidence de l’empire russe avec les annexions faites par l’impératrice Catherine. C’est là que naît le hassidisme avec le rabbin Israël Ben Eliezer, devenu Baal Shem Tov. Un de ses descendants sera Nahman de Bratslav qui attirera au début du XIXe siècle des milliers de hassidims autour de la ville ukrainienne d’Ouman. C’est à cette époque que des Juifs religieux commencent à voyager et même à s’établir en Palestine, notamment à Jérusalem en provenance aussi bien de Pologne que du Maroc.

4) La religion et l’émancipation des Juifs. Religieux face aux socialistes et aux sionistes.

La Haskala est un mouvement de pensée juive fortement influencé par le mouvement des Lumières qui naît en Europe à la fin du XVIIIe siècle. Un de ses représentants fut le Gaon de Vilnius (Wilno en polonais). La Haskala va contribuer à laïciser les communautés juives et va les pousser à s’intégrer dans les sociétés où elles vivent dès que ce sera possible. En Europe de l’Ouest, l’émancipation des Juifs commence en France et en Allemagne. En France avec l’Abbé Grégoire au moment de la Révolution, les Juifs deviennent des citoyens. Avec Napoléon, ils seront des « Français de confession mosaïque ». En Allemagne, ils sortent du ghetto et, s’ils se convertissent, accèdent à des postes dirigeants. Rapidement, les Juifs vont constituer une partie très importante de l’élite intellectuelle allemande. Cette émancipation transforme l’antijudaïsme chrétien en antisémitisme racial. Partout en Europe, les Juifs, considérés comme cosmopolites et inassimilables, constituent un obstacle majeur à la volonté des nationalistes de construire des Etats ethniquement purs.

La grande majorité des Juifs vit en Europe orientale. Ils sont un million au moment où l’empire russe annexe la plus grande partie de la Pologne et plus de 6 millions vers 1880 quand les pogroms déclanchent le début de l’émigration vers les Etats-Unis. Leurs conditions sociales se sont considérablement modifiées. Les shtetls, ces bourgades juives, se sont à la fois industrialisées et prolétarisées. Les hassidims sont nombreux, mais ils apparaissent de plus en plus archaïques face aux mutations sociales. Les Juifs forment une population très pauvre, mais intellectuelle, privée de toute citoyenneté et persécutée ouvertement. Dès la fin du XIXe siècle, beaucoup perdent la religion et s’engagent dans des mouvements révolutionnaires. Il s’agit peut-être d’une forme de transposition du messianisme. On trouve en nombre des Juifs dans tous les partis et mouvements révolutionnaires et en premier lieu dans un parti révolutionnaire juif, le Bund, qui prône l’autonomie culturelle des Juifs, sur place et donc sans territoire spécifique, dans le cadre de la révolution mondiale. Les Bundistes luttent contre les pogromistes et défendent ardemment la langue yiddish. Pour eux, les rabbins sont des arriérés, voire des collaborateurs avec l’oppression tsariste.

C’est à cette époque, dans le cadre de la montée des mouvements nationalistes, que naît le sionisme. Dès le départ, il théorise la séparation, l’impossibilité du mélange entre Juifs et « Goys ». Pour les sionistes qui s’inspirent des idées nationalistes de l’époque, il faut un Etat juif. La majorité des fondateurs du sionisme n’étaient pas croyants (beaucoup étaient socialistes). Ils envisageront de nombreuses hypothèses sur la création de l’Etat juif. Ils choisiront la Palestine pour des raisons essentiellement opportunistes. Dès que ce choix est fait, la Bible, en laquelle ils ne croyaient pas, devient un livre historique censé justifier les conquêtes à venir.
Dans la situation révolutionnaire de l’empire russe des années 1900, plusieurs courants s’affrontent dans le monde juif. Du côté des « laïques modernistes», il y a les socialistes qui nient la spécificité de l’oppression des Juifs et pensent que l’antisémitisme disparaîtra avec la révolution, les Bundistes qui lient l’émancipation des Juifs à l’émancipation de l’humanité et les sionistes qui appellent les Juifs à partir vers la Palestine. Face à eux, le monde religieux s’est structuré. Ces années sont celles de l’apparition ou du développement de groupes puissants haredim (ultra orthodoxes) issus du hassidisme : les Loubavitchs dont l’origine remonte au XVIIIe siècle en Biélorussie et la dynastie Satmar apparue en Roumanie vers 1890. Autre groupe ultra orthodoxe, Nétourei Karta apparaîtra plus tard en 1938.

Dans cet éclatement du monde juif, chaque groupe jouera sa propre partition : les socialistes et communistes juifs joueront un rôle majeur dans la révolution russe. Les Bundistes connaîtront leur apogée avant cette révolution. Ils seront plus tard décimés par le stalinisme et le génocide nazi. Jusqu’à la guerre, les sionistes seront minoritaires face aux socialistes comme l’attestent les élections qui ont lieu dans les zones juives de Pologne et de Lituanie. En 1939, moins de 5% des Juifs du monde entier ont émigré en Palestine. Et il y en aurait sûrement eu moins si les Etats-Unis ne s’étaient pas fermés à l’immigration dès 1924.

Les religieux disparaissent en URSS après 1917 et sont progressivement marginalisés dans les autres pays européens. Ils sont hostiles au départ pour la Palestine, mais trouvent difficilement leur place dans le monde moderne. Un des grands rabbins Loubavitch, Dov Baer Schneerson accusera les sionistes de promouvoir une identité juive démunie de toute allégeance à la Torah.
En Palestine, les Juifs palestiniens dont la présence est antérieure au sionisme sont hostiles à la création d’un Etat juif. Dans son livre « au nom de la Torah, une histoire de l’opposition juive au sionisme » (presses de l’université Laval, 2004), Yakov Rabkin relate le premier assassinat politique perpétré contre un Juif par les sionistes. Il s’agit de Jacob de Haan, assassiné en 1924. Mandaté par un parti religieux, il dénonçait la déclaration Balfour. Pour les Juifs palestiniens, il était clair qu’un Etat juif mettrait fin à la coexistence avec les chrétiens et les musulmans.

Ceux qui ont construit les institutions du Yichouv (= implantation juive en Israël, c’est l’ancêtre de l’Etat israélien) et qui ont initié la dépossession des Palestiniens de leur pays étaient quasiment tous laïques ou athées. Les religieux présents en Palestine étaient indifférents ou hostiles au projet sioniste. Pour certains, le projet d’Etat Juif se substituait au Messie et c’était inacceptable. Il y a une exception : le rabbin Avraham Isaac Kook, dès les années 1930, élabore les principes du sionisme religieux, symbiose entre religion et colonisation. Le sionisme religieux moderne s’est beaucoup inspiré du rabbin Kook.

5) Les Juifs religieux face à l’Etat d’Israël : de l’indifférence à l’adhésion.

Le génocide nazi a frappé indistinctement tous les Juifs, sionistes ou pas, religieux ou pas. Il a définitivement anéanti le Yiddishland, ce territoire entre Baltique et Mer Noire où les Juifs formaient une importante minorité. La moitié des six millions de morts n’étaient pas croyants. L’extermination a soulevé une importante interrogation : comment Dieu a-t-il pu laisser faire cela ? Il y a eu et il y a encore quelques réponses de Juifs religieux qui considèrent que les Juifs ont été punis pour s’être éloignés de la foi et de la pratique religieuse.

Après 1945, il ne reste plus qu’un seul courant politique actif parmi les Juifs, c’est le sionisme. D’autant que l’antisémitisme persiste en Europe orientale devenue communiste. Il y a eu un consensus des grandes puissances pour la création de l’Etat d’Israël pour se dédouaner du passé récent et pour en finir avec le « problème juif » en Europe. La communauté internationale a fait payer aux Palestiniens l’antisémitisme européen et le génocide.

Les forces politiques israéliennes qui gagnent la guerre de 1948 et créent l’Etat d’Israël sont principalement des laïques. Ben Gourion et son parti sont dans la IIe internationale. Il y a eu pendant cette guerre du côté juif une importante minorité de droite, héritière idéologique de Vladimir Jabotinsky. Les groupes terroristes (Irgoun, groupe Stern) ne se définissent pas comme des religieux, mais comme des nationalistes. Les Juifs orthodoxes qui vivent en Palestine à l’époque sont peu nombreux, essentiellement regroupés dans le quartier Mea Sharim à Jérusalem. Ils n’ont pas combattu pendant la guerre.
Dès la fondation de l’Etat, des décisions fondamentales sont prises. L’Etat d’Israël se définit comme Etat juif, il faut donc définir qui est juif. Seuls ceux-là ont le droit d’émigrer en Israël et peuvent accéder à la citoyenneté. D’autant qu’en refusant d’appliquer dès 1949 la résolution 194 des Nations Unis qui prévoit explicitement le droit au retour des réfugiés palestiniens, le jeune Etat appelle explicitement tous les Juifs à s’installer en Israël, qu’ils aient subi ou non des persécutions.

Les religieux vont jouer un rôle très supérieur à leur importance numérique puisqu’ils vont être chargés progressivement de définir ce qui est juif et ce qui ne l’est pas. Dans la loi, on est juif si on est de mère juive ou si on se convertit. Le nouvel Etat n’est pas laïque : les mariages et les enterrements sont exclusivement religieux. Pour échapper au mariage religieux, il faut se marier à l’étranger et certaines agences israéliennes se sont spécialisées pour organiser des mariages à Chypre. Les enterrements laïques ne sont possibles qu’en de rares kibboutz. Les Palestiniens d’Israël sont définis comme «Arabes chrétiens » ou «Arabes musulmans » (mais surtout pas comme des « Palestiniens »).
Les grands rabbins d’Israël donneront leur mot à chaque émigration nouvelle. Ils seront directement responsables des discriminations subies par les Juifs venus d’Inde ou plus récemment par les Falachas venus d’Ethiopie. La justification vient du fait que leur façon de pratiquer la religion est jugée non conforme.

À l’école, l’enseignement de l’histoire juive laisse une large place à la religion. Les religieux obtiennent des fonds importants pour financer les yeshivas (les écoles religieuses) et les jeunes Juifs orthodoxes peuvent être exemptés du service militaire (trois ans pour les hommes, deux ans pour les femmes).
Le système électoral israélien repose sur la proportionnelle intégrale. Avec 8 à 10% des députés, les partis religieux constituent une force d’appoint indispensable pour constituer une majorité parlementaire. Dans son livre « Vaincre Hitler » (Fayard, 2007), l’ancien président de la Knesset (Avraham Burg qui a rompu avec l’idéologie dominante) parle longuement de son père Yossef Burg. Celui-ci fut très longtemps ministre et représenta le parti religieux allié aux travaillistes.

On voit donc que la création de l’Etat d’Israël a modifié l’attitude de beaucoup de Juifs orthodoxes par rapport au sionisme et à l’Etat d’Israël. Il reste pourtant après 1948 des courants orthodoxes antisionistes, en particulier Satmar et Nétourei Karta.

Pendant les années 1950 et 1960, la plupart des Juifs qui vivaient dans les pays arabes émigrent en Israël. Ils sont majoritairement religieux. Ils ont une histoire douloureuse. Ils étaient autochtones. Leur histoire n’est pas liée au génocide nazi. Le colonialisme et le sionisme ont provoqué leur départ pour un pays où ils vont subir des discriminations sociales. Ils vont souvent renforcer les partis religieux. Il y aura même après 1984, en plus des partis religieux traditionnels « ashkénazes » un parti religieux « séfarade » : le Shass.

6) La conquête de 1967 et l’apparition du courant national-religieux.

La guerre de 1967 et la conquête de territoires nouveaux marquent un tournant fondamental comme l’a montré l’écrivain Tom Segev. La colonisation des territoires occupés a été immédiatement planifiée et c’est un ministre « laïque » et « de gauche » (Yigal Allon) qui a donné son nom à un plan toujours appliqué. Il prévoyait la colonisation de la plus grande partie de la Cisjordanie et la rétrocession du reste à la Jordanie. À l’époque, le gouvernement travailliste ne dispose pas en nombre suffisant de colons prêts à partir pour s’installer dans les territoires palestiniens. Les disciples du rabbin Kook vont alors jouer un rôle majeur. Avec des moyens militaires et financiers considérables fournis par le gouvernement, ils vont installer dans toute la Cisjordanie un très grand nombre de colonies.

En quelques dizaines d’années, le courant « national-religieux » (pour reprendre l’expression de Yakov Rabkin) va représenter presque un quart de la population israélienne et il est majoritaire à Jérusalem. À l’ancien parti religieux Agoudat Israël, historiquement antisioniste, ont succédé des partis hégémoniques chez les colons. Le Parti National Religieux qui fut celui du très modéré Yossef Burg est devenu un parti d’extrême droite. Une de ses branches s’est fondue pendant une période dans « l’Union Nationale », avec d’autres partis prônant le « transfert des Palestiniens » au-delà du Jourdain. Un de ses dirigeants, Effie Eitam, a créé le « nouveau sionisme national religieux ».
Du côté des Juifs venus des pays arabes, le Shass a eu de grands succès électoraux, dus en partie à ses œuvres sociales qui aident des populations défavorisées. Son fondateur, le rabbin Ovadia Yossef est connu pour ses déclarations au vitriol contre les Arabes (des « serpents »), les Juifs laïques, les rescapés du génocide, les femmes, les homosexuels …, ce qui ne nuit pas à sa popularité.

Les 250 000 Israéliens installés à Jérusalem Est et les 250 000 autres installés dans les colonies de Cisjordanie ne sont pas tous des intégristes religieux. Il y a parmi eux des « banlieusards » attirés par les loyers à bas prix ou par un cadre de vie agréable. Mais toute cette population vote massivement pour les partis religieux. Le Gush Emonim (Bloc de la Foi) les structure et s’oppose à toute évacuation de territoires. Au contraire, il organise les extensions de colonies, les constructions de nouveaux appartements et les colonies dites « sauvages ». Pour ces colons, Dieu a donné la terre de Judée-Samarie au peuple juif et tout retrait territorial est un retrait du judaïsme. Dans ces conditions, aucun dialogue avec la population palestinienne n’est possible. On assiste aujourd’hui à une extension des colonies, à une « colonisation spatiale » où les colonies encerclent les villes palestiniennes. C’est au nom de Dieu que plusieurs centaines de colons se sont installés dans le centre historique d’Hébron où ils lancent sur la population palestinienne leurs ordures.
Dans une société éclatée, le courant national-religieux offre aux jeunes Israéliens un projet. Et il attire. Depuis quelque temps, ses militants acceptent de faire leur service militaire. Des rabbins justifient les crimes ou exactions commis contre les Palestiniens dont l’armée est accusée. Cela a été le cas lors de l’opération « Plomb Durci » contre la Bande de Gaza. Le grand rabbin de Safed, Shmuel Eliyahou, explique que la Torah interdit de louer un appartement à des Arabes. Une pétition signée par de nombreux rabbins l’approuve.
L’ancien militant d’extrême gauche Marius Schattner a écrit « Israël, l’autre conflit : laïcs contre religieux ». Sa fille est devenue ultra orthodoxe. Nombreuses sont les familles israéliennes de tradition laïque dont des membres sont conquis par le courant national-religieux, seule force idéologique à s’exprimer partout.

La colonisation religieuse a modifié le judaïsme. De nombreuses personnes qui n’ont pas grand-chose à voir avec le judaïsme se retrouvent dans les colonies. C’est le cas de certains immigrants venus de l’ex-URSS (une bonne partie d’entre eux ne sont pas juifs, tout au plus ils ont un ancêtre juif). En 2002, un groupe d’Aymaras de Bolivie a été converti au judaïsme et est venu s’installer dans une colonie.

Tous les Juifs religieux ne sont pas des fers de lance de la colonisation. Satmar et Nétourei Karta ont conservé leur antisionisme. Par contre, les Loubavitchs ont évolué. Un de leurs principaux donateurs, le diamantaire Lev Levaïev a beaucoup construit à Jérusalem Est et en Cisjordanie.

Nétourei Karta va au bout de sa démarche en défendant ouvertement les Palestiniens et en prônant la disparition de l’Etat Juif. Un de ses membres, le rabbin Moshé Hirsch a été nommé par Yasser Arafat ministre des affaires juives dans le premier gouvernement palestinien (1994).

Le philosophe Yeshayahou Leibowitz était profondément religieux et il a été un des premiers Israéliens à critiquer radicalement la colonisation, en parlant même de « judéo nazis ».

Dans les manifestations pacifistes contre la construction du mur ou les destructions de maisons, on rencontre régulièrement des Rabbins pour la Paix. Ce courant existe aussi aux Etats-Unis. Ces rabbins entretiennent un dialogue judéo-musulman. Max Warschawski, ancien rabbin de Strasbourg et père du militant anticolonialiste Michel Warschawski, appartenait à cette mouvance de Juifs religieux opposés à la colonisation.

7) La religion comme définition d’Israël et comme vecteur de la colonisation.

La guerre israélo-palestinienne n’est pas une guerre religieuse. Mais la religion étant instrumentalisée à cet effet, elle pourrait le devenir.

Aussi bien les fondateurs du sionisme que ceux du mouvement national palestinien étaient des laïques. Le sionisme a plusieurs aspects : nationaliste, colonialiste, messianique. La question religieuse s’est rajoutée récemment. Ce qui est en cause, ce n’est pas la religion juive, c’est son instrumentalisation par un courant idéologique qui oppose à présent Dieu au droit international et oppose des raisons religieuses à toute restitution des territoires occupés.
Depuis 1948, les laïques ont toujours été majoritaires en Israël. C’est de moins en moins le cas. Le judaïsme laïque recule dans cette société. Les intégristes se sentent suffisamment forts pour attaquer régulièrement la Gay Pride de Jérusalem.

Régulièrement dans les sondages israéliens, une majorité de la population se prononçait contre les colons. Leur religiosité et leur rêve de reconstituer une société antique mythique faisaient peur. Ce n’est plus le cas. Une majorité de l’opinion veut désormais conserver l’essentiel des colonies. L’irruption d’une extrême droite religieuse ne scandalise plus. En 1985, le parti Kach du rabbin Meïr Kahane (assassiné à New-York en 1990), avait été interdit pour racisme. Les mêmes types de propos sont aujourd’hui régulièrement repris sans sanctions par des dirigeants de divers partis et par des chefs religieux.
En Palestine avec le Hamas qui a gagné les dernières élections palestiniennes ou au Liban où le Hezbollah a construit sa légitimité en jouant un rôle majeur dans l’évacuation des troupes israéliennes, la religion structure de plus en plus l’opposition à Israël. On imagine l’embrasement de la région si certains fanatiques ultra orthodoxes mettaient leurs menaces à exécution en s’attaquant à l’esplanade des mosquées avec l’idée à terme de reconstruire le Temple.

Dans les universités israéliennes, aucun étudiant ne pourrait faire une thèse ou des travaux de recherche sur l’historicité du récit biblique. Et c’est pourtant la croyance massive en cette historicité qui est le moteur d’une colonisation dont on ne voit pas la fin.

Pierre Stambul, intervention faite à Besançon le 15 mars 2011 dans le cadre de l’université ouverte.