En 2015, dans son film « Derrière les Fronts », Alexandra Dols interviewait Khader Adnan. Il en était à sa 10ème arrestation et à sa troisième grève de la faim.
Khader Adnan était boulanger à Arrabeh près de Jénine et son père travaillait sur les marchés.
Dans cette interview, Khader Adnan expliquait ce qu’est la détention administrative.
L’internement administratif, hérité de l’occupation britannique, permet une détention arbitraire sans délit défini, sans procès, sans avocat, sans limite de temps (i.e. renouvelable autant de fois que l’occupant le décide) et sans jugement.
Les Israéliens l’ont récupéré de l’arsenal répressif du colonialisme britannique qui, dans la Palestine mandataire, a été utilisé contre Juifs et Arabes.
Des centaines de Palestiniens sont en détention administrative. Leur seule arme : la grève de la faim.
Avant d’être expulsé de son pays, Salah Hamouri était en détention administrative et avait fait une grève de la faim.
Khader Adnan avait utilisé cette arme au moins à trois reprises et avait fait céder ses geôliers qui avaient fini par le libérer.
Cette fois-ci, il n’a pas survécu. Il est mort au bout de 88 jours, les Israéliens ayant refusé de le libérer pour le faire hospitaliser. Comme l’Irlandais Bobby Sands dont il portait la mémoire, mort en 1981 après 66 jours de grève de la faim.
Quel était donc le « crime » de Khader Adnan ? Il ne lui était reproché aucun acte précis. Non, il aurait été juste le chef (??) du Jihad Islamique. Cet argument se heurte au refus de lui faire un procès où il aurait pu justifier sa participation à la Résistance. Les Palestiniens qui résistent sont tous susceptibles de subir cet internement. Et il y a un consensus en Israël pour « anéantir » le Jihad Islamique (le terme a été utilisé par Merav Michaéli, dirigeante du Parti travailliste). Vis-à-vis du Jihad Islamique, les exécutions extrajudiciaires et les emprisonnements sans jugement sont devenus la règle.
L’État d’Israël, qui commet tous les jours les pires exactions et des exécutions extra-judiciaires, a décidé que de nombreux partis politiques palestiniens étaient terroristes : Hamas, Front Populaire de Libération de la Palestine, Jihad Islamique … Sans compter des groupes informels comme la « Tanière des Lions ». L’occupant arrête et, le plus souvent, tue sans procès toute personne soupçonnée d’appartenir à l’un de ces partis ou groupes.
Où est la justice ? Cette justice que nous considérons comme une des valeurs juives fondamentales.
L’UJFP :
– réaffirme que, face à l’occupation et l’oppression, résister est un droit, que cette résistance soit pacifique ou armée. Cela fait partie du droit international, tel qu’il a été défini après 1945.
– réaffirme que la détention administrative qui permet l’arbitraire le plus total et qui est massivement utilisée contre les Palestiniens, est illégale et doit être condamnée. Rappelons que l’internement administratif est une arme des dictatures. Certains de nos parents l’ont connu dans les camps d’internement de Vichy.
– salue la mémoire de Khader Adnan.
– réaffirme son soutien à tous les prisonniers politiques palestiniens. Toute paix juste passe par leur libération sans condition.
La Coordination nationale de l’UJFP, le 2 mai 2023