Interrogé par la police, accablé par des accusations de corruption, menacé de poursuites devant les tribunaux pour financement électoral illicite, prise d’intérêts, népotisme, détournement de fonds publics et autres malversations, au plus bas des sondages pour sa gestion catastrophique du pays, le Premier ministre a fini par jeter l’éponge. Olmert a annoncé qu’il ne sera pas candidat à sa succession lors des primaires de son parti, Kadima, en septembre. Puisque c’est le dirigeant du parti majoritaire à la Knesset qui occupe le poste de Premier ministre, son annonce équivaut à une démission comme chef du gouvernement. C’est dans ce contexte qu’il a dévoilé, le 12 août, les contours de son « plan de paix » qui, dans la configuration politique actuelle, n’a aucune chance d’aboutir. Ça se ressemble comme deux gouttes d’eau à celui proposé par un de ses prédécesseurs, l’ancien Premier ministre travailliste (et actuel ministre de la Défense) Ehud Barak, présenté à Yasser Arafat en la présence de Bill Clinton à Camp David en l’an 2000, juste avant l’éclatement de la deuxième Intifada.
Dans son plan, Olmert propose la création d’un État palestinien dans l’intégralité de la Bande de Gaza et dans 93 % de la Cisjordanie, avec un corridor routier qui lie les deux territoires. Tous les colons israéliens se trouvant sur le territoire de ce futur État palestinien seront évacués. À premier coup d’œil un tel plan peut paraître raisonnable, mais il y a un hic. Tout d’abord, ce corridor routier serait placé sous souveraineté israélienne, avec la promesse d’Olmert que l’armée israélienne n’y établira pas de point de contrôle. Compte tenu de l’expérience des Palestiniens en la matière, leur méfiance est compréhensible.
Selon le plan d’Olmert, Jérusalem restera annexé à Israël et les Palestiniens doivent se contenter d’établir leur capitale à Ramallah, autre point de discorde majeur. Olmert propose le droit au retour des réfugiés palestiniens… mais uniquement dans le futur État palestinien. Israël n’accueillera pas un seul réfugié sur son sol. Quant aux colons évacués, ils ne seront pas nécessairement rapatriés en Israël. Au contraire, ils seront incités à élire domicile dans les grands blocs de colonies situés dans la partie de la Cisjordanie qui, elle, seraient annexée à Israël. Notons que ces zones comptent parmi les plus fertiles de la région, avec les plus nombreuses sources d’eau. Mais bon prince, Olmert offre aux Palestiniens en échange de ces territoires perdus une superficie équivalente de terres… en zone aride dans le désert du Néguev !
Ce n’est pas tout. D’habitude, un traité de paix se fait entre deux États souverains ou entre deux peuples souverains. Pourtant, Olmert conditionne son plan de paix à des modifications politiques profondes. Pas de son propre gouvernement, mais du gouvernement palestinien ! Il exige de l’Autorité palestinienne des « réformes internes » (Olmert, le corrompu, demande ça aux Palestiniens). De plus, il somme le président Mahmoud Abbas de reprendre le contrôle de la Bande de Gaza aux islamistes du Hamas (pourtant majoritaires aux dernières élections législatives). Attitude dominatrice de puissance occupante.
Loin de reconnaître le droit à l’autodétermination du peuple palestinien, Olmert exige de lui un gouvernement à sa botte comme condition politique pour mettre fin à l’occupation. Très loin de respecter les normes internationales en matière de démocratie, un tel procédé bafoue le droit dans la plus pure tradition colonialiste. Les Palestiniens n’ont pas tardé à réagir au plan de « paix » d’Olmert. Saeb Erekat, un des principaux négociateurs palestiniens, l’a qualifié de « ridicule » tandis qu’Abou Rdaïnah, porte-parole de Mahmoud Abbas, a rappelé la position traditionnelle de l’OLP et de l’Autorité palestinienne en la matière. En effet, son peuple ne peut accepter « qu’un État palestinien avec une continuité territoriale, avec la sainte Jérusalem comme capitale, sans colonies, et sur les frontières du 4 juin 1967. » Côté israélien, le commentaire d’Idan Kveiler en dit long sur la crédibilité d’Olmert auprès du peuple israélien. Selon ce spécialiste politique de Galeï Tsahal, la radio militaire, Olmert « n’arrive même pas à trouver de majorité pour faire passer de simples décisions budgétaires. Alors pour un tel plan de paix, il n’a aucune chance d’obtenir le soutien de la Knesset. »