Gérard Filoche a fait un faux pas, il est le premier à le reconnaître en retirant immédiatement une caricature antisémite et complotiste trop vite retweetée. Il s’est immédiatement excusé de cette erreur. Mais c’est sans compter avec l’offensive du moment. Dézinguer tout ce qui peut l’être avec tous les arguments (fielleux) possibles et toutes les campagnes de diabolisation de ce qu’il faut abattre : les représentants de l’antiracisme politique, tout particulièrement ceux d’entre eux qui revendiquent l’auto-organisation, les antisionistes, les antilibéraux, tout ce qui caractérise notre camp contre l’offensive néo conservatrice…Et qui caractérise aussi les néocons qui nous attaquent : ultralibéraux, sionistes et racistes.
La particularité de l’affaire Filoche est qu’elle se joue à l’intérieur du parti socialiste notamment où certains réclament son exclusion, et qu’en ce sens elle ne peut manquer d’en évoquer une autre, celle de Moshe Machover, né à Tel Aviv cofondateur du Matzpen, parti antisioniste israélien exclu du Labour party anglais pour antisémitisme. Bien sûr la taille et la santé du parti anglais défie ce qui reste du groupe PS français aujourd’hui. D’ailleurs après une rude bataille, il a été réintégré. Mais le fond de l’affaire et le « mouvement » sont très semblables ; dans les deux cas il s’agit d’éradiquer ce qui porte dans le PS la voix de l’antilibéralisme et de la critique d’Israël. L’arme est la même : une accusation d’antisémitisme qui ne vise par ailleurs en aucune manière à combattre réellement le racisme. Or les deux hommes sont au-dessus de tout soupçon, même si le Français a trébuché, rien ne permet dans le parcours du fondateur de SOS racisme, de rattacher Filoche à l’antisémitisme. De même on a fait dire aux textes de l’Anglais Machover ce qu’ils ne disaient pas pour mieux l’attaquer, en assimilant sa critique de l’idéologie et des crimes de l’État israélien à de l’antisémitisme. Tous les moyens sont bons, fausses lectures, cabales, erreurs guettées à la loupe, déformation de propos, et s’exercent quotidiennement dans la presse et chez les commentateurs français aussi. Il faut en tous cas se souvenir que le sionisme n’est pas le fait de l’extrême droite au pouvoir en Israël aujourd’hui, et qu’il a d’abord été soutenu par l’internationale socialiste et le PS.
Il s’agit bien, comme le dit un autre socialiste, de faire rendre gorge, et d’exclure du débat public Plenel et Médiapart, Bouteldja et le PIR, Filoche dans un Parti socialiste dont Boniface a déjà dû subir les foudres, Obono mise au pas dans une France Insoumise qui prête allégeance à la LICRA ; on assiste à un véritable nettoyage politique !
C’est une bataille qui vise notre camp politique tout entier. Celui de la résistance d’aujourd’hui et de demain, au racisme, au libéralisme, au sionisme. Un camp dont les membres doivent tous être protégés, sans considération de ce qui ne peut que relever d’un débat interne et bienveillant, et qui ne survivrait pas aux solidarités sélectives. Évidemment nous sommes solidaires de Plenel, de Boniface, de Filoche, de Morin, et de tous ceux qui sont attaqués aujourd’hui parce que porteurs d’une critique du monde libéral et d’un autre projet, de la défense des Musulmans attaqués, de la défense des Palestiniens.
Si nous nous avisions d’exclure de cette solidarité nos camarades des groupes antiracistes, musulmans ou du PIR, des personnalités racisées comme Danièle Obono ou diabolisées comme Houria Bouteldja, cela signifierait de fait que nous adoptons l’agenda raciste et racisant de nos adversaires.Et cela signerait l’arrêt de mort de la constitution si nécessaire du camp de la résistance. (Quel meilleur exemple pour illustrer le terme de « racisé » que le parcours médiatique de Danièle Obono, élue de la république qui n’a cessé d’être interpellée sur et renvoyée à sa condition de noire et d’immigrée !)
Nous espérons que toutes celles et ceux qui comprennent l’enjeu de ne pas marcher dans la combine clivante de l’adversaire et de faire front, solidaires de tous, vont très rapidement exprimer clairement cette solidarité. Ce qui nous semble être le seul moyen d’éviter que la parabole du pasteur Martin Niemöller ne s’applique à nous-même :
« Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste.
Quand ils ont enfermé les sociaux-démocrates, je n’ai rien dit, je n’étais pas social-démocrate.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester. »
Le Bureau national de l’UJFP, le 21 novembre 2017