Le bateau, qui a pris la mer cet été depuis son port d’attache finlandais, a fait escale en Corse et en Italie.
Ajaccio, correspondance.
L’Estelle est un fier trois-mâts finlandais de 53 mètres. Initialement prévu pour la pêche en mer d’Islande, il a été racheté dernièrement par le comité suédois « Un bateau pour Gaza ».
Certains militants nordiques à son bord ont participé aux précédentes « flottilles de la liberté », qui ont essayé de forcer le blocus en 2010 et 2011. Cette année, ils ont décidé de repartir seuls à l’aventure, en effectuant un long tour d’Europe, pour mobiliser l’opinion publique. Partie de Norvège, au début du mois d’août, l’Estelle a fait étape en Bretagne, puis en Espagne, avant de rejoindre Ajaccio, où elle a été accueillie par les militants du comité Corsica-Palestina et des élus de Corse, dont le président de l’Assemblée territoriale, Dominique Bucchini (PCF). La goélette est arrivée jeudi dernier au soir à La Spezia, en Italie. Sur le quai, des centaines de militants attendaient l’Estelle. Toute la nuit, avec des syndicalistes des chantiers navals, ils se sont relayés pour monter la garde autour du bateau. L’an dernier, deux navires avaient été sabotés par des plongeurs dans les ports grecs.
Le capitaine est finlandais, l’équipage suédois et norvégien. À bord, il y a huit marins professionnels, mais quiconque embarque doit prendre ses heures de quart. Tout l’équipage est volontaire et bénévole. Les marins naviguent habituellement sur des tankers ou des ferries. Ils ont choisi de rejoindre bénévolement l’aventure : « Je fais ce voyage pour pouvoir dire à mes enfants que j’ai fait quelque chose de bien dans ma vie », explique Charlie, de quart aux petites heures du matin, en regardant le soleil se lever au-dessus du Cap corse.
« Nous voulons mettre en œuvre un principe de solidarité active, en étant tous bien conscients des risques que nous prenons », relève Ann Ighe, porte-parole du comité suédois. En 2011, les rares bateaux de la seconde Flottille de la liberté qui n’ont pas été bloqués en Grèce ont été arraisonnés par l’armée israélienne avant de pénétrer dans les eaux territoriales, les membres des équipages ont été détenus plusieurs jours avant d’être expulsés.
L’Estelle ne pourra pas accoster à Gaza, car le port a été totalement détruit par les bombardements israéliens, durant l’opération « Plomb durci », et il devra mouiller au large. Il est prévu que les petits bateaux des pêcheurs palestiniens, cantonnés dans la limite des trois milles maritimes, viennent aider à décharger la cargaison. Cependant, les marins vont tenter, toutes voiles déployées, de forcer l’embargo. « Nous savons bien que nos chances de passer sont minimes, reconnaît le capitaine Mika, mais elles ne sont pas nulles : le blocus de Gaza ne s’appuie sur aucune base juridique, les Israéliens peuvent tenter de nous détourner ou de nous arraisonner, mais ils peuvent aussi choisir de nous laisser passer. »
Jean-Arnault Dérens