Israël. Liste noire et peine de mort au menu de Netanyahou

La majorité au pouvoir en Israël durcit les lois contre les migrants et les « terroristes ». Une liste d’organisations internationales interdites de territoire est publiée.

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Manifestation, le 26 janvier 2017, à Jérusalem, de demandeurs d’asile africains montrant le portrait des migrants tués après avoir été expulsés. M. Kahana/AFP

La droite et l’extrême droite israéliennes se sentent pousser des ailes. En l’espace de quelques semaines, via le gouvernement ou leur majorité à la Knesset (le Parlement), elles ont pris une série de mesures au caractère nettement fascisant. Qu’on en juge : le 3 janvier, Israël a annoncé le lancement d’un programme destiné à imposer à près de 40 000 migrants en situation irrégulière de choisir entre leur expulsion ou leur incarcération. La majorité sont des Érythréens et des Soudanais qui ne peuvent rentrer chez eux, au vu de la situation. Le régime érythréen a été accusé par l’ONU de crimes contre l’humanité « généralisés et systématiques ». Quant au Soudan, son président, Omar Al Bachir, fait l’objet de mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre, contre l’humanité et génocide. Qu’à cela ne tienne, Tel-Aviv s’est empressé de signer des accords avec le Rwanda et l’Ouganda afin qu’ils acceptent sur leur sol les migrants chassés d’Israël et à qui il aura été remis un billet d’avion et près de 3 000 euros. Pour solde de tout compte ? Le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) a exprimé son inquiétude face aux mesures du gouvernement israélien, rappelant notamment qu’Israël avait « des obligations légales s’agissant de la protection des réfugiés ».
Nettoyer Israël de tout ce qui n’est pas juif

Benyamin Netanyahou semble bien disposé à aller jusqu’au bout sur toutes les questions qui, à terme, reflètent son but ultime : nettoyer Israël de tout ce qui n’est pas juif, purifier la société israélienne en utilisant tous les moyens à disposition et, s’ils ne sont pas suffisants, en faisant voter de nouvelles lois à la Knesset. Un projet de loi prônant la peine de mort pour les « terroristes », c’est-à-dire, dans le vocabulaire de l’extrême droite israélienne, les Palestiniens, a été adopté toujours le 3 janvier, en lecture préliminaire au Parlement. La peine capitale est prévue dans la loi militaire israélienne en Cisjordanie occupée, mais n’a jamais été prononcée. Jusqu’à présent, son application nécessitait l’accord unanime des trois juges du tribunal. La majorité (deux sur trois) suffirait désormais si le texte était définitivement adopté.

Enfin, ce pays, qui se présente comme « la seule démocratie du Moyen-Orient », se comporte en réalité comme la pire des dictatures. Les autorités israéliennes viennent en effet de publier une liste de 20 organisations de par le monde dont les membres ne seront plus autorisés à entrer en Israël à cause de leur soutien à la campagne Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS). En tête de liste européenne, l’Association France Palestine solidarité (AFPS). On trouve également des organisations britanniques (dont l’une dans laquelle se trouve Jeremy Corbyn, dont on se demande comment fera Israël s’il devient premier ministre de Grande-Bretagne !), mais aussi américaines comme The American Friends Service Committee, lauréate du prix Nobel de la paix en 1947, pour avoir aidé et sauvé des victimes du nazisme, ainsi que Jewish Voice for Peace.

En clair, Tel-Aviv interdit même à des juifs de se rendre en Israël ! Notons que l’occupation étant ce qu’elle est, il sera donc impossible à ces organisations de rencontrer les associations palestiniennes en Cisjordanie, puisque, pour s’y rendre, il faut passer par Israël. « Nous ne nous laisserons pas intimider, a fait savoir Bertrand Heilbronn, président de l’AFPS. Nous allons demander d’urgence un rendez-vous au président de la République et au ministre des Affaires étrangères. »

Par Pierre Barbancey. Publié sur le site de l’Humanité le 9 janvier 2018.

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Grand reporter