Israël et la suprématie blanche – une nouvelle aube pour une relation séculaire ?

Revital Madar interviendra dans le cadre du séminaire « The White West 2 »
à La Colonie le dimanche 16 juin de 17h25 à 17h55

« On ne peut pas, même s’il y a des décades entre (les deux événements, ndlr), tuer des millions de juifs pour faire venir des millions de leurs pires ennemis après ».  » (Karl Lagerfeld, 2017).

Pour beaucoup en Israël, la montée des partis de droite en Europe représentait une occasion de renverser l’UE, une institution longtemps perçue en Israël comme pro-palestinienne. La criminalisation récente de l’expression du soutien au mouvement BDS en Allemagne, où il équivaut maintenant à de l’antisémitisme, et la déclaration d’Emmanuel Macron selon laquelle l’antisionisme est une nouvelle forme d’antisémitisme, ont rendu l’antisémitisme précieux pour Israël. En tant que concept, l’antisémitisme a connu une sorte de renaissance en tant qu’outil de propagande avec la nouvelle définition de l’IHRA qui fait de toute critique de l’État d’Israël un acte d’antisémitisme.

De l’autre côté de l’Atlantique, les tenants de la suprématie blanche de Charlottesville ont déclaré que « les Juifs ne nous remplaceront pas » et la fusillade dans la synagogue de Pittsburgh a été l’attaque la plus meurtrière jamais perpétrée contre la communauté juive aux États-Unis – deux événements qui ont marqué, de manière très explicite, que les nouveaux alliés d’Israël dans le monde ne peuvent limiter leur haine à l’encontre des seuls Arabes et des personnes de couleur. Le gouvernement israélien a ignoré ce fait, tout comme il l’a fait pour la loi polonaise sur l’Holocauste et les nombreuses déclarations antisémites faites par Trump, Bolsonaro, Urban et d’autres. L’antisémitisme, ses porte-parole l’ont dit à maintes reprises, est le fléau de la gauche. Les faits mis à part.

Au-delà des gains politiques que ces alliés promettent à l’apartheid rampant d’Israël, je voudrais discuter de ce que ce soutien, tant de la part des partis de droite que des partis « centraux » en Europe, dévoile sur la perception qu’a l’Europe du Juif. Dans quelle mesure le soutien d’Israël est-il conditionné par la perception durable du juif en tant que catégorie raciale et que nous dit-il de l’appartenance des juifs à la communauté européenne, toujours imaginée comme blanche ? Considérant notre tendance à traiter le fascisme et le colonialisme comme deux phénomènes historiques distincts, et à comprendre l’antisémitisme dans le cadre du premier, dans quelle mesure la réduction de la judéité d’Israël au tribalisme mondial est-elle liée au fait que c’est un projet colonial encouragé et soutenu par une Europe nouvellement dépourvue de Juifs ?