Nous sommes presque deux ans après, jour pour jour, de l’annonce d’une réunion interministérielle par N. Sarkozy, censée mettre en œuvre un plan de guerre contre la délinquance et les comportements de « certains parmi les gens du voyage et les Roms ». C’était le 21 juillet 2010, suite au meurtre de Luigi Duquenet, un jeune Gitan, par un gendarme. C’était aussi le moment où une certaine affaire Woerth – Bettencourt faisait des vagues. Le sujet des Rroms a beaucoup servi de fumigène dans cette ambiance hautement sensible pour le gouvernement précédent.
Deux ans après, le gouvernement a changé et l’actuel président a promis le changement. Pour maintenant. Tout est une question de définition des mots « changement » et « maintenant ». Car « maintenant », c’est toujours, et toujours, ça peut durer plus ou moins. Les récentes déclarations de M. Valls c’est presque maintenant, mais on a du mal à y voir quelque changement en ce qui concerne le traitement des Rroms. En effet, le ministre se dit obligé de poursuivre les expulsions des Rroms, au point même d’imiter non seulement les méthodes, mais aussi le vocabulaire de M. Hortefeux. M. Valls ne parle pas d’expulsions, mais de « démantèlements », un mot qui évoque plutôt des réseaux et qui n’avait pas été choisi au hasard par Hortefeux. D’ailleurs, faut-il le rappeler, à cette période là, M. Hortefeux avait repris la fameuse formule de Charles Maurras « la France n’est pas un terrain vague », pour justifier les « démantèlements des camps ». Heureusement, M. Valls ne va pas aussi loin.
Pourtant, le candidat Hollande avait promis qu’il n’y aurait pas d’expulsion sans solutions de relogement. Exit déjà cet engagement, par le fait du ministre de l’intérieur ?
Le candidat Hollande avait aussi promis que le nouveau gouvernement ouvrirait l’accès au travail aux ressortissants roumains et bulgares. Valls annonce déjà une couleur totalement différente, en déclarant « Je ne suis pas sûr qu’on règlera uniquement le problème par la question de l’accès au travail ». Est-on donc partis pour le maintien des mesures transitoires qui excluent de fait les Roumains et les Bulgares du droit au travail ?
Alors oui, nous autres, Rroms, sommes inquiets… pour le gouvernement. Car, au fond, ni le communiqué de l’Elysée du 21 juillet 2010, ni l’état major de la guerre contre les tsiganes réuni une semaine plus tard à l’Elysée, ni le discours de Grenoble n’ont apporté de grands changements dans la vie des Rroms. Les expulsions se sont tout simplement poursuivies, baptisées désormais « démantèlements » par quelqu’un qui citait Maurras. Elles sont peut être devenues un peu plus intenses et violentes qu’auparavant, c’est tout. Le problème c’est que, à chaque fois qu’on parle de nous, qu’on nous montre de doigt, c’est surtout pour cacher d’autres problèmes qui ne nous concernent pas, du genre… Woerth, Bettencourt, Karachi…. Lesquels, cette fois-ci ???? Peut-être rien de très grave, juste une divergence passagère. Rappelez-vous : Claude Guéant, prédécesseur de M. Valls a déclaré suite à la nomination de ce dernier place Beauvau que, si c’était à lui de choisir, il aurait choisi … Manuel Valls !
Courage, gouvernement Ayrault ! Vous pouvez vous en sortir ! Nous, on s’en sort depuis 700 ans envers et contre tout. C’est juste une question de valeurs à respecter, et ce n’est pas très compliqué.
Association « La voix des Rroms »
50, rue des Tournelles
75003 PARIS