Le 26 janvier à 7h du matin, l’armée israélienne a attaqué le camp de réfugiés de Jénine dans le nord de la Cisjordanie occupée.
Face au silence et aux mensonges des médias, donnons la parole à N. qui a pu appeler quand les communications ont été rétablies : « le commando est arrivé en voiture camouflée en véhicule commerçant. Des missiles ont été tirés sur les maisons. Une voisine (il s’agit de Oum Ziad) qui ouvrait sa fenêtre au troisième étage a été abattue par un sniper. Le fils de mon amie K. est à nouveau à l’hôpital, une balle dans la cuisse. Le commando est reparti à 10 h. Il y a 9 morts » (un dixième mourra de ses blessures. Parmi les morts, il y a trois frères).
Pour l’armée israélienne, « Tsahal a neutralisé des terroristes qui préparaient une attaque ». On glisse le mot « Jihad Islamique » qui signifie droit de tuer sans honte et sans jugement. Réaction des dirigeants occidentaux ? Rien. Ah si, une peur d’une « nouvelle escalade ». Et on déplore que l’Autorité Palestinienne ait annoncé la « suspension » des accords sécuritaires. C’est la seule chose tangible qui ait été signée à Oslo il y a 30 ans : que l’occupé assure la sécurité de l’occupant ! Et ça, l’Occident y tient.
Faut-il rappeler qu’au regard du droit international, l’occupation de la Cisjordanie est illégale. Les 17.000 habitants du camp de Jénine ont déjà subi de très nombreuses attaques, dont la boucherie perpétrée par les troupes de Sharon en avril 2002. Ses habitants sont les descendants de Palestiniens chassés des villes et villages du nord de la Palestine historique en 1948 et interdits de revenir chez eux en violation flagrante de la résolution 194 de l’ONU. Quel que soit le type de résistance de la population, il est criminalisé par l’occupant : Bilal al-Saadi, président du « théâtre de la liberté » de Jénine, est en prison depuis septembre 2022. Et Zakaria Zubeidi, grand résistant de ce camp et animateur du théâtre est un des prisonniers qui avait pu s’échapper de la prison de Gilboa en septembre 2021 avant d’être capturé à nouveau.
Les dirigeants qui se taisent ou mentent sur Jénine ne peuvent pas ignorer que le droit à la résistance fait partie du droit international. D’ailleurs eux-mêmes glorifient certaines résistances.
Le 27 janvier, un jeune homme a ouvert le feu près d’une synagogue de Neve Yaakov, une des nombreuses colonies de Jérusalem Est où l’occupant s’efforce de rendre minoritaires les Palestiniens dans ce qui aurait dû être leur capitale. Sept fidèles (dont une Ukrainienne) et l’auteur de l’attentat sont tués. Les réactions internationales sont immédiates. Le gouvernement états-unien parle de « faits épouvantables », d’attaque « terroriste » et ajoute : « nous sommes solidaires du peuple israélien ». L’ambassade de France n’est pas en reste en parlant « d’attaque terroriste la plus meurtrière depuis des décennies » et en reprenant la propagande israélienne : « attaque commise le jour de commémoration de la Shoah ». Et bien sûr cette ambassade appelle toutes les parties « à éviter des actions susceptibles d’alimenter l’engrenage de la violence ». Pour l’ambassade de France, l’opération « Bordure Protectrice » qui a fait 2.400 morts à Gaza en 2014 n’est pas une attaque terroriste. Et cette même ambassade n’a jamais réagi aux nombreux rapports établis sur les maisons détruites ou confisquées à Jérusalem, les enfants arrêtés ou abattus, la torture légalisée …
Neve Yaakov est une colonie illégale selon le droit international. L’assaillant était le petit-fils d’un Palestinien assassiné par un colon, crime resté impuni. Il ne s’agit pas de justifier ou de juger. Toutes les occupations cruelles, toutes les négations des peuples autochtones ont entraîné des réactions de ce type. Cela a été vrai en Algérie, au Vietnam ou dans l’Europe occupée par les Nazis. Il ne peut pas y avoir de paix sans justice.
Les termes utilisés par les représentants des pays occidentaux traduisent une mentalité coloniale. Ils montrent qu’on n’est pas sorti de la « guerre du bien contre le mal » et des horreurs qu’elle a causées. Ils montrent une fois de plus la complicité éhontée des gouvernements occidentaux dont le nôtre avec l’apartheid, l’épuration ethnique et l’occupation israéliennes.
L’UJFP lance un appel aux sociétés civiles occidentales. Une partie de l’issue de cette guerre dépend de nos capacités à forcer nos gouvernements complices à changer de politique et à sanctionner l’occupant. Comme cela s’est fait autrefois pour l’Afrique du Sud.
La Coordination nationale de l’UJFP, le 29 janvier 2023