Photo : des soldats israéliens dans le village de Naqoura, au sud du Liban, le long de la frontière avec Israël. © Ilia Yefimovich/dpa /ABACAPRESS.COM
Selon le New York Times, des civils Palestiniens sont contraints d’explorer des maisons ou tunnels potentiellement piégés à l’explosif par le Hamas. L’armée israélienne les capturerait et les enverrait dans des zones dangereuses. Une pratique qui se serait généralisée depuis un an, selon le quotidien états-unien.
Publié le 17 octobre 2024
Théo Bourrieau
Il s’agit d’une accusation martelée par l’armée israélienne depuis le 7 octobre : le Hamas se servirait des civils palestiniens comme des boucliers humains, Tel-Aviv n’ayant alors d’autre choix que de perpétrer un massacre au nom de la « lutte contre le terrorisme ». Dans une longue et riche enquête, nourrie de nombreux témoignages de civils palestiniens mais aussi de soldats israéliens, le New York Times révèle pourtant que l’armée israélienne utilise des Palestiniens comme boucliers humains dans la guerre dans la bande de Gaza. Ces civils seraient capturés puis envoyés dans des zones dangereuses et mortelles, notamment dans des tunnels et des habitations potentiellement piégés à l’explosif par le Hamas.
Un témoignage recueilli par le quotidien états-unien est particulièrement frappant. Mohammed Shubeir, un jeune Palestinien de 17 ans raconte avoir été arraché à sa famille à Khan Younès, dans le sud de Gaza, pour le « forcer à marcher, menotté, dans les ruines de sa ville natale », à la recherche d’explosifs posés par le Hamas. « Les soldats m’ont envoyé comme un chien dans un appartement piégé », affirme l’adolescent. « Je pensais que ce serait les derniers moments de ma vie », se rappelle le jeune palestinien, quand il voit le long du mur qu’il longe des fils attachés à des explosifs.
Au-delà de ce cas, cette enquête du New York Times révèle que soldats et agents de renseignement israéliens ont régulièrement utilisé depuis le 7 octobre 2023 des civils gazaouis pour explorer des zones possiblement piégées et ainsi éviter de mettre des soldats israéliens en danger. Si le journal états-unien n’est pas en mesure de documenter l’ampleur précise de la pratique, il certifie qu’elle a été utilisée par au moins 11 escadrons dans cinq villes de Gaza.
Le quotidien explique s’être entretenu avec sept soldats israéliens qui ont observé ce genre de situation ou y ont même participé, ces derniers expliquant que cette conduite était monnaie courante. Le New York Times démontre qu’il s’agit d’une « stratégie » organisée par l’armée dans la mesure où elle nécessite une coordination entre plusieurs services des forces israéliennes et une importante préparation.
Ces pratiques contreviennent non seulement au droit international, que Tel-Aviv à l’habitude de bafouer, mais aussi au droit israélien. « Si les faits présentés dans cet article sont exacts, ils sont tout à fait inacceptables », a déclaré le porte-parole du département d’État, Matthew Miller. « Rien ne peut justifier l’utilisation de civils comme boucliers humains », a-t-il ajouté estimant que « plus encore qu’une enquête, s’ils constatent des violations, les gens doivent être tenus pour responsables, et ils doivent prendre des mesures pour s’assurer que ces pratiques ne se répètent pas ».
Ces révélations corroborent d’autres enquêtes, notamment celle du journal israélien progressiste Haaretz, qui décrivait il y quelques mois comment des jeunes civils palestiniens portaient des vêtements militaires israéliens pour servir de bouclier humain. En juin, le média international Al Jazeerah, révélait lui aussi des preuves fournies par des soldats israéliens de cette pratique inhumaine et illégale.