En finir avec les camps

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Nous ne possédons pas encore les mots pour décrire le monde nouveau dans lequel nous entrons.

Pas de mots neufs pour nommer les événements qui défilent sous nos yeux, rien pour les intégrer dans des analyses nouvelles avec un vocabulaire neuf, lui aussi.

Aujourd’hui, seules nos références anciennes, nos mots anciens nous aident encore à penser, à nommer ce à quoi nous assistons.

Les actes ignominieux perpétrés ces dernières heures aux CRA du Mesnil Amelot et de Vincennes, par leur violence et leur inhumanité assumée, nous renvoient aux vieux démons qui bornent notre histoire récente, aux noms des lieux qui la ponctuent.

Des bagnes de la IIIe République, aux camps de regroupement d’où sont partis des convois complets à destination des camps d’extermination nazis – Drancy, Pithiviers et Beaune la Rolande – l’Histoire ne se répète pas mais bégaie.

En réalité, une obstination jamais démentie à enfermer, à déporter ; une obstination aveugle à la domination – encadrée par des lois ou non – une violence d’État continue, marquée d’infamie mais pleinement assumée, sans discontinuité, depuis maintenant 75 ans.

Avec seulement des trêves devant la poussée du mouvement populaire.

Nous ne le répéterons jamais assez, avec nos pauvres mots bientôt incompréhensibles ou simplement démodés, la persistance des dominés, la persistance de l’enfermement, du camp, des CRA aujourd’hui, la persistance de la déportation – massive ou individuelle – la persistance du non-droit érigée en politique d’État, est la marque indélébile des gouvernements français successifs depuis Vichy.

Le CRA du Mesnil Amelot, celui de Vincennes et tous les autres centres de rétention semblables sont aujourd’hui le bubon pestilentiel de cette maladie jamais éradiquée.

L’UJFP exige la libération immédiate des retenus 1 et la suppression des CRA aussi bien en France que dans les DOM-TOM.

La Commission antiracisme politique
Pour la Coordination nationale de l’UJFP, le 13 avril 2020.


Note-s
  1. Sur les vingt-quatre CRA français, quatorze sont désormais vides et quatre comptent moins de cinq personnes encore retenues. Mais il reste en région parisienne quarante-sept personnes au Mesnil-Amelot et une cinquantaine à Vincennes.[]